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qui tous les pays fournissent des femmes, les serviteurs manquent à l’état, les épouses et les enfans à la famille. La population turque diminue sensiblement, tandis qu’on voit s’accroître chaque jour la population des autres nations indigènes qui n’ont point d’esclaves, et qui se contentent, de leurs propres femmes, des femmes nées dans le pays. Les femmes sont pour les Osmanlis une production exotique qu’on fait venir de loin, que la guerre faisait abonder et qui devient plus rare dans la paix ; aujourd’hui les bazars ne sont plus approvisionnés que par la Circassie et quelques pays d’Afrique. Plusieurs des marchands avec lesquels je me suis entretenu, regrettent le temps passé, et prévoient une époque où il n’y aura plus d’esclaves, ce qu’ils regardent comme un grand malheur ; je suis loin de trouver à cela un grand malheur ; mais on doit au moins y voir une grande révolution dans les mœurs du peuple et l’état de la société.

Si je demeurais longtemps à Constantinople, j’irais souvent au bazar des esclaves, et je ne manquerais pas d’interroger les marchands sur les progrès ou la décadence de leur commerce. J’irais au bazar pour savoir où en est l’empire, où en sont les institutions de la Turquie, comme chez nous on va à la Bourse pour savoir où en est le crédit public.

P. S. Dans votre dernière lettre, vous demandez des nouvelles de la fugitive Lesbienne qui