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despotisme, à moins qu’il ne veuille donner sa démission ; car toute autorité qui s’élève, lui porte ombrage, et la famille même du despote ottoman ne trouve pas grâce devant les jalousies du pouvoir. Ajoutez à cela que les chefs de l’Empire ne se marient jamais, et que le titre d’épouse est inconnu au sérail : en voyant cette quantité d’esclaves destinés à perpétuer la famille impériale, je me demande quelquefois jusqu’où doit aller la parenté des sultans du côté des femmes, et si les successeurs d’Osman ne pourraient pas être appelés aussi les fils de la pluie, les fils des nuées[1]. De ce désordre, ou plutôt de cette absence de la famille est née chez les Osmanlis une égalité insouciante, triste et sauvage, qui exclut l’esprit d’émulation et les sentimens généreux, avec laquelle il n’y a ni gloire, ni société, ni patrie. Chez les anciens, l’esclavage d’un certain nombre d’hommes donnait quelques avantages à la cité, et tournait, au profit de la liberté des citoyens ; chez les musulmans, l’esclavage ne profite à personne. Les esclaves que le despotisme favorise, que la famille reçoit dans son sein, sont en Turquie comme ces plantes parasites qui se mêlent à la moisson et lui dérobent les sucs de la terre et les rosées du ciel.

Ce qu’il y a de plus étrange dans cet empire ottoman auquel les pays étrangers donnent des soldats, des ministres et des chefs, chez ce peuple à

  1. Ces mots sont une grande injure chez les Turcs.