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semble quelquefois aux étrangers qu’il n’y a dans une ville musulmane que cinq ou six noms propres pour tous les habitans ; si on publiait chez les Turcs un dictionnaire biographique un peu volumineux, les noms s’y ressembleraient tellement que l’œil le plus exercé pourrait à peine les distinguer les uns des autres, et que la gloire elle-même aurait de la peine à reconnaître les siens.

Parmi les hommes que la faveur de sa hautesse a élevés dans les derniers temps, je ne dois pas oublier Moustapha-Effendi ; il était, il y a quelques années, garçon de café aux Eaux douces d’Asie. Le sultan remarqua sa bonne mine et l’admit dans le caïque impérial ; il finit par l’admettre auprès de sa personne. Moustapha apprit à écrire, et devint secrétaire du sultan. Depuis ce temps, il est dans les conseils de son maître ; on sait peu de chose sur sa vie ; il a établi des manufactures, tenté quelques expériences agricoles, introduit en Turquie des colons anglais et des charrues américaines ; tous ces essais ont médiocrement réussi, mais l’ont servi auprès du sultan. Moustapha-Effendi a de la finesse et de la douceur, de l’esprit de conduite ; il a vingt-cinq ou vingt-six ans, une jolie, figure, un air efféminé, ce qui a fait dire à la malignité turque que l’histoire secrète du maître est écrite quelquefois sur le front de son esclave. On assure que le nouveau favori dirige la politique, particulière de Mahmoud, et que toutes les grandes affaires ne se traitent plus