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dont on nous a donné à peu près le sens, le prêtre s’est placé auprès du groupe des pleureuses, il a récité de nouveau quelques prières ; une femme est sortie du cercle, a fait plusieurs signes de croix ; elle a baisé la main et le livre du prêtre arménien ; cette cérémonie a duré fort long-temps ; on a prié devant plusieurs tombes ; à chaque prière, on donnait au prêtre une pièce de monnaie ; les scènes de deuil se sont enfin terminées par un festin qui n’avait rien de triste, car toutes les femmes étaient persuadées que les mânes de leurs parens se trouvaient au milieu d’elles, et qu’ils prenaient leur part du banquet funèbre.

La scène que je viens de vous raconter n’est autre chose qu’un anniversaire ; les femmes arméniennes viennent, selon l’usage de leur culte, honorer la mémoire de leurs parens qui ne sont plus. Elles emmènent avec elles des pleureuses qui s’associent à leur douleur et qu’on paie en raison de leur désespoir ; je m’étonne qu’un sentiment aussi naturel que celui qui nous fait honorer les morts, se manifeste d’une manière si diverse, et que les regrets de l’amitié ou de la famille ne parlent pas chez tous les peuples la même langue. Nous avons vu que, chez les Turcs, la religion défend de pleurer et de gémir aux funérailles ; ici au contraire, c’est une œuvre méritoire, une chose qui plaît à Dieu, que de se désoler sur un tombeau. Nous avons des moyens plus solennels, mais peut-être moins ex-