Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/314

Cette page n’a pas encore été corrigée

fort ne l’a remplacé. Serait-il donc vrai que l’empire ottoman, qui avait tant de peine à subsister avec les janissaires, ne pût vivre sans eux ? Ce corps redoutable imprimait un mouvement à la nation, et depuis qu’il n’est plus, il n’y a dans les esprits qu’incertitudes, contradictions, découragement. Partout l’absence de ce qui fait la puissance et la vie des sociétés. Les Turcs n’ont plus ni la volonté d’obéir, ni la force de résister ; ils ne peuvent ni s’associer à la révolution présente, ni en faire une autre. Lorsqu’on examine ce singulier état d’une nation, on ne s’étonne plus de l’esprit de fatalisme qui s’accrédite chaque jour davantage et qui consiste à laisser aller les choses comme il plaît à Dieu.

Je ne vous ai parlé jusqu’ici que des Turcs de Stamboul ; l’impulsion qu’on a voulu donner à la nation, si on en croit, ceux qui ont parcouru les provinces, n’a guère dépassé les murailles de Constantinople ; dans l’Anatolie, comme nous avons pu le voir, rien n’est changé aux vieilles opinions ; à Brousse qui n’est qu’à vingt lieues de Constantirnople, tous les Osmanlis portent encore la barbe, la robe flottante et le turban tel qu’on le portait avant la révolution. À mesure qu’on avance vers le Taurus, la répugnance pour le fesse et pour tous les signes de la réforme devient plus grande et plus générale : les Turcs de l’Asie-Mineure, plus superstitieux, plus ignorans que ceux du reste de l’empire,