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plus solennels de la mort. Dans leur opinion, les morts ne sont pas seulement heureux parce qu’ils sont en paradis, mais parce qu’ils sont dans un repos parfait, parce qu’il ne se fait autour d’eux aucun bruit, aucun mouvement.

Mahomet s’est occupé de faire un paradis pour ses disciples, mais il faut croire que les Turcs s’en sont fait un autre à leur manière et selon, leurs goûts. Le paradis des Turcs est une immobilité complète ; aussi les voit-on, dès cette vie, prendre le plus qu’ils peuvent de larges à-comptes sur le bonheur de la vie future ; quelle différence trouve-t-on, en effet, entre un Turc fumant son chibouk, accroupi sur un divan, et celui qui est couché sous la pierre du sépulcre. Vous vous rappelez, sans doute, cette épitaphe de La Fontaine, dans laquelle il divisait la vie en deux parts dont il voulait passer

L’une à dormir et l’autre à ne rien faire.

Il y a bien peu d’Osmanlis qui ne consentît à prendre pour lui l’épitaphe de notre fabuliste.

Le deuil des Arméniens et des Grecs ne ressemble point à la douleur calme et silencieuse des Turcs ; les Grecs surtout ne pleurent jamais un de leurs amis ou de leurs proches, sans que le public en soit averti et que tous les échos en retentissent. Hier matin je fus réveillé par des cris qui remplissaient tout le quartier de Péra. Je demandai s’il était ar-