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que de vous avoir parlé de son esprit superstitieux, car elle a pour moi des soins touchans et ma santé l’occupe sans cesse. Quand la pauvre femme me voit triste, elle s’assied, à mes côtés, me serre affectueusement la main, me dit parfois comme Thétis à son fils Achille : τεκνον, τι κλαιεὶς ; Mon fils, pourquoi pleurez-vous ? Sa fille, de dix-huit ou vingt ans, a eu long-temps la fièvre comme, moi. Les amulettes, les ex-voto, les prières des papas, l’eau merveilleuse de quelques fontaines du Bosphore, rien ne pouvait guérir la jeune Maria. Le jour de mon arrivée à Thérapia, je lui ai fait prendre du sulfate de kinin, dont j’ai toujours ma provision, et ce remède lui a coupé la fièvre. Le même jour, sa mère avait allumé à la chapelle grecque un nouveau cierge devant l’image de la Panagia, et vous pensez bien que c’est la Vierge et non point le kinin qui a eu les honneurs de la guérison.

La petite cité de Thérapia n’est guère habitée que par des Grecs ou des Arméniens. Les Turcs y sont en très petit nombre ; mais la présence de ces familles musulmanes ne laisse pas que d’être pour les chrétiens un sujet d’ennui. Dernièrement, deux Osmanlis, ivres à moitié, se sont emparés d’un Grec qui cheminait tranquillement dans la rue, et voulaient, sans autre forme, de procès lui faire donner la bastonnade. Le pauvre raya aurait infailliblement reçu quelques douzaines de coups de bâton,