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vases, dont l’un renfermait de l’eau, l’autre des confitures ; elle m’a offert ensuite des fruits, portant chaque fois la main gauche à son front. Je n’ai jamais tant regretté qu’en cette occasion, de ne pas parler la langue du pays. J’ai échangé avec les deux femmes qui étaient devant moi, des paroles que personne ne pouvait traduire ; cependant, tout ce que j’ai dit, quoique en langue française, a été fort bien compris ; j’ai, entendu de même ce qu’on m’a dit en grec moderne, car il y a dans le cœur humain des sentimens qui ont reçu de Dieu le don des langues, et dont les accens pour être entendus, ont rarement besoin d’interprètes.

Bientôt je suis resté seul, livré à mes réflexions ; une foule de voix confuses se faisaient entendre dans le voisinage ; j’ai regardé par la fenêtre, et j’ai reconnu que ces voix partaient d’une école d’enfans grecs. Tous les élèves lisaient à la fois dans le même livre et prononçaient ensemble les mêmes mots ; c’est le mode d’enseignement adopté dans toutes les écoles primaires, soit parmi les Grecs, soit parmi les Turcs. De la fenêtre où j’étais, je pouvais voir la principale mosquée d’Artaki et l’église des Grecs. Le minaret qui s’élance dans les airs, et le toit modeste de l’église chrétienne, représentent très-bien, d’un côté, l’esprit dominateur du Coran et de l’autre, l’humilité de l’Évangile. La présence des deux cultes donne à la piété une sorte d’émulation, et soutient de part et d’autre la fer-