Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/85

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

est la seule qui soit restée debout pendant la guerre, on a dû s’y réfugier de toutes les parties de la Grèce. La population a dû s’accroître aussi, depuis que Naupli est devenue le siège du gouvernement. La ville a beaucoup de cafés qui sont toujours pleins quelques-uns sont bruyans et peu sûrs pour les étrangers. Ce qui frappe surtout ceux qui arrivent, c’est que, hors des bazars qui offrent quelque mouvement on ne rencontre dans les rues et dans les maisons, que des gens désœuvrés ; la misère et l’oisiveté, voilà les deux caractères distinctifs de cette population, qui est comme un résumé de celle de la Grèce. Une ville peuplée d’oisifs et de misérables ne doit pas être facile a gouverner, et je m’étonne qu’on ait fait un crime au président d’y avoir établi une police. Là se trouvent rassemblés tous les genres de prétentions et tous les genres d’infortunes. Naupli est devenue l’asile de tous ceux que la guerre a ruinés, de tous ceux qui se vantent d’avoir sauvé la patrie : ce qui suffirait peut-être pour peupler la cité. Ceux qui ont fui pendant la guerre viennent solliciter des indemnités ; ceux qui ont combattu des honneurs, de l’argent et du pouvoir. Après ceux qui mendient ainsi des pensions ou des places, viennent ceux qui implorent la pitié des passans. Cette misère, qui était venue au-devant de nous jusque dans la rade, nous la rencontrons à chaque pas dans la ville ; les uns, à qui on a coupé la main, lèvent au ciel leurs bras mutilés ; les autres montrent