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Je ne m’étendrai pas beaucoup ici sur la partie historique, car les poètes ont plus parlé de Cérigo que les historiens et même les voyageurs. Dans l’antiquité, elle fut long-temps sous la domination de Lacédémone ; elle subit ensuite le joug des Romains. Dans le moyen-âge, elle appartint d’abord aux empereurs de Bysance, puis à Venise, enfin aux Turcs. Les Anglais l’ont fait comprendre dans la catégorie des îles Ioniennes. Le léopard britannique y a succédé au Croissant et au lion de Saint-Marc. La politique anglaise ne pouvait négliger une île que les marins ont appelée la Lanterne de l’Archipel, et qui peut offrir une station commode au milieu d’une mer orageuse. Quoique le gouvernement des Anglais soit fort modéré, ils ne sont pas aimés des habitans dont la plupart passent dans la Morée. Nous en avons vu plusieurs à Navarin, qui nous disaient beaucoup de mal de ceux qu’ils appellent les habits rouges. Toutefois, on doit s’applaudir de voir l’île la plus voisine des Maniotes gouvernée par une nation civilisée qui ne manque pas de motifs pour faire la guerre aux pirates, et qui a plus de moyens qu’il n’en faut pour réprimer leurs excès. Thucydide dit, dans son histoire, que les Lacédémoniens avaient occupé l’île de Cythère pour défendre les côtes de la Laconie contre l’invasion des pirates. Aujourd’hui, tous les pirates sont sur les côtes de la Laconie, et l’ile de Cérigo servira peut-être à en préserver l’Archipel.