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d’énormes couches de rochers, de profondes cavernes, nulle part un espace de terre où puisse végéter un arbre, où puisse croître la moisson. Telle est le pays par les Cacovouniotes (mauvais montagnards), la plus féroce et la plus sauvage des peuplades du Magne, malheur au navire qui échoue devant cette côte, ou que le calme retient dans le voisinage ! Le Mamiote du promontoire Ténare, foulant un sol qui ne produit rien, regarde la mer comme son domaine ou son héritage, tout ce qu’il voit passer sur cette mer lui appartient par droit de conquête : les tempêtes lui apportent des tributs, les écueils deviennent ses auxiliaires ; le désespoir des marins fait sa joie, et c’est pour lui que l’or vient de l’Aquilon.

Je vous invite à lire, dans les anciens voyageurs, ce qu’ils nous disent des brigandages de ce peuple. Comme aujourd’hui les pirates sont fort à la mode chez nous, et qu’on en fait des héros de romans, je ne crains pas de m’étendre sur ce chapitre. Les pirates de Cacovounia ont le teint hâlé ; ils sont coiffés d’un bonnet ou d’une calotte de fer, ils portent des vêtemens couleur de terre, pour n’être pas aperçus de ceux qu’ils veulent surprendre. Les femmes, les enfans, s’associent à leurs expéditions : les papas eux-mêmes montent quelquefois dans les chaloupes armées pour la course et disent qu’ils vont recueillir la dîme du butin. Tout le peuple des Cacocouniotes est exercé au maniement des armes. On