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leurs épaules, et couraient plutôt qu’ils ne marchaient, comme si c’eût été une affaire pressée, et que la tombe n’eut pas le temps d’attendre. J’ai demandé à notre grec Dimitri pourquoi on courait ainsi en portant un mort. — C’est pour obéir au prophète, car le prophète a dit : Si le mort est du nombre des élus, il est bon de le faire parvenir en diligence à sa destination, et s’il est du nombre des réprouvés, il est également bon de s’en décharger. Le mort était enveloppé d’un linceul bordé de rouge ; au-devant du cercueil, on avait placé un bouquet de basilic et de giroflée ; ce bouquet reposait sur une étoffe verte qui avait couvert le tombeau de Mahomet à Médine. Chaque mosquée principale possède un pareil morceau d’étoffe, destiné à orner le cercueil des morts au moment des funérailles. Une vingtaine de Turcs suivaient le convoi, et tous ont porté le mort à leur tour, car il n’y a point d’action plus méritoire chez les musulmans que celle de porter un cercueil sur ses épaules, et celui qui fait quarante pas, chargé de ce fardeau sacré, a effacé quarante de ses péchés dans le livre de l’éternel. La bière a été déposée sur un banc de pierre en face de la mosquée (les morts n’entrent jamais dans les mosquées). Alors ceux qui suivaient le cortège ont été faire leurs ablutions dans le bassin d’une fontaine voisine ; puis un vieil iman est arrivé, et les assistans se sont placés sur trois rangs autour du mort. Le prêtre musulman s’est approché du cercueil, et