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de là, sans sortir de la vigne, on nous a montré un cimetière juif ; sur deux tombes récentes, nous avons remarqué une couronne de laurier assez bien sculptée ; tandis que le tombeau du Héros de l’Iliade n’est recouvert que d’un humble gazon, on s’étonne de trouver cet emblème de la valeur sur le sépulcre de deux Israélites qui ont sans doute passé un vie obscure et pacifique dans la petite ville de Kounkalé.

Le tertre qu’on appelle tombeau d’Achille, a son histoire qui remonte aux temps les plus reculés. Les générations qui suivirent le siège de Troie, gardèrent religieusement la mémoire du fils de Pélée. Sa tombe devint bientôt l’objet de la vénération des peuples. On y bâtit un temple, on y éleva des autels : le souvenir d’un héros si redouté des Troyens dut mêler une espèce de terreur au respect qu’on avait pour sa mémoire ; personne n’eût osé passer la nuit devant son tombeau, car on croyait le voir sortir couvert de ses armes et brandissant sa lance. Ainsi le caractère impétueux d’Achille en faisait un dieu. Il faut croire que les anciens qui révéraient surtout les personnages de l’Iliade, s’arrêtèrent principalement aux caractères les plus passionnés pour en faire l’objet de leur idolâtrie. On adora la colère d’Achille comme on adora la violence d’Ajax : on peut dire qu’au temps du paganisme les passions humaines s’étaient emparées du ciel et que chaque fois qu’il se montrait