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la voix d’Homère ? pourquoi, aux accens de cette voix immortelle, le sépulcre ne rendrait-il pas sa noble proie ? Supposons donc que les portes Scées viennent de sortir du sein des ruines, et que les pauvres chaumières de Bournarbachi ont fait place aux tours superbes de la ville de Priam.

La vue des portes Scées nous rappelle une des scènes les plus touchantes de l’Iliade ; j’ouvre le sixième livre, et je vois d’abord arriver une femme avec un enfant dont la beauté est semblable à celle d’un astre qui se lève sur l’horizon : j’aperçois en même temps un guerrier, à la démarche noble, et couvert de son casque où brille un panache ondoyant ; ce guerrier, c’est le brave Hector, la dernière espérance d’Ilion ; cette femme, c’est la fille du grand Ætion, la vertueuse Andromaque ; cet enfant, c’est le jeune Astianax. Hector, en voyant son fils, le carresse d’un sourire ; Andromaque, tout en pleurs, s’approche de son époux l’embrasse tendrement, et d’une voix entrecoupée de sanglots : « Homme trop magnanime, s’écrie-t-elle, votre courage va faire votre perte ; vous n’ayez aucune compassion de votre fils, de ce faible enfant, de votre femme qui va être si malheureuse,… ne vous exposez donc point au plus affreux de tous les malheurs… Restez au pied de ce rempart, d’où vous pourrez veiller sur vos soldats qui défendent la colline dès figuiers sauvages, le seul endroit par où les Grecs puissent escalader les murs de Troie. »