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gardes de l’aga, debout autour de nous, donnaient à ce banquet quelque chose de grave et de solennel.

Pendant le souper, Osman me demandait si j’étais content de ma journée et si je ne regrettais pas les dix heures de fatigue que j’avais passées au milieu des ruines. « Il faut que cette vallée ait vu de bien grandes choses, ajoutait-il pour que vous preniez tant de peine pour reconnaître ce qui subsiste encore ? » Une extrême curiosité et le désir de savoir, animaient toutes les paroles de l’aga. Éphèse était devenue son bien, et jamais le nom d’Éphèse n’avait retenti à son oreille. Je lui ai donc prononcé ce nom, qui lui révélait un ancien monde, un monde qui, pour lui, n’avait jamais existé. Je n’ai point entrepris de lui raconter l’histoire d’Éphèse et de ses âges glorieux ; il eût été inutile de dire à Osman que cette cité avait reçu dans son sein les plus grands capitaines de l’antiquité, tels qu’Alexandre, Annibal, Antiochus, Manlius, Auguste et Pompée. À quoi bon lui parler de Lucullus qui venait y étaler son luxe et la pompe de ses fêtes ; de Cicéron, qui s’était rendu sur ces rives pour y admirer les chefs-d’œuvre d’Apelle, de Praxitèle et de Scopas ? J’ai mieux aimé lui parler des choses qui étaient plus près de lui, et qu’il pouvait plus facilement comprendre. Je lui ai appris que, malgré le long espace qui la sépare aujourd’hui de la mer, Éphèse avait autrefois un