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passe plusieurs années dans cette île, on n’y trouverait que des précipices et des déserts ; le premier aspect de l’île a en effet quelque chose de rude et de sauvage qui rappelle d’abord les images du poète exilé. Mais, au rapport des voyageurs qui l’ont parcouru ; l’intérieur du pays renferme des vallons fertiles des terres auxquelles « l’automne, ne refuse point ses fruits, ni l’été ses moissons. » La Corse a plusieurs villes ou fleurissent le commerce et l’industrie ; les arts même y sont cultivés, et l’île pourrait être comparée à plusieurs provinces de France, si les habitans des montagnes n’étaient pas restés barbares. Là, on retrouve encore les passions des âges les plus grossiers, les querelles de la jalousie, les vengeances héréditaires, la fureur du meurtre. Les lois de la métropole n’ont pu discipliner ces peuplades sauvages ; de même que le territoire de la Corse se partage entre la culture et le désert ; ainsi la population se trouve partagée entre la civilisation et la barbarie. On pourrait croire qu’il y a dans cette île deux peuples et deux pays différens, qu’une partie est réunie à la France, et que l’autre ne l’est pas encore. Dans les villes et dans les campagnes cultivées, la population est française par ses lois, par ses usages et ses manières partout ailleurs, le nom de la France est à peine prononcé, à peine connu, et les habitans des montagnes ne sont guères plus Français que les aigles, qui planent au-dessus de leurs têtes, ou que les bêtes