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un e ¤0¤ Le rot Podiébrad, dont il avait épousé la fille, était attaché à la secte des hussites ; sur les instances du clergé catholique de Bohême, et à la prière du pape, Corvin déclara la guerre à ce prince ; il s’empara de la Moravie, de la Silésie, de la Lusace, et se fit élire roi de Bohême par les états catholiques assemblés à Ohnutz, le 3 mai 1460. Podiébrad étant mort en N71, Corvin se mit sur les rangs, afin d’être reconnu légalement par les états du royaume ; on donna la préférence à Wladislas, fils aîné de Casimir lV, roi de Pologne. Cependant, voyant leur roi sans cesse occupé hors de ses frontières, à des guerres étrangères aux intérêts de la nation, les Hongrois ne cachaient point leur mécontentement ; plus des trois quarts des comtés du royaume avaient formé un parti, dans lequel se jeta, avec le haut clergé, le savant Jean Witez, qui avait élevé et instruit le roi dans sa jeunesse, et qui depuis était devenu archevêque de Gran. On offrit la couronne à Casimir, frère cadet de Wladislas, roi de Bohème ; ce prince entra en Hongrie à la tête d’une armée, qui se fortifiait tous les jours par l’arrivée des mécontents. Matthias accourut à la tête de ses vieilles bandes ; les factieux, déconcertés par la rapidité de sa marche, abandomtèrent l’armée polonaise, qui sortit avec précipitation du territoire hongrois. Peu après, Corvin se vit, avec 6,000 hommes, œmé dans Breslau par les rois de Pologne et de Bohême, qui étaient dix fois plus forts que lui ; les ayant éloignés par la sagesse de ses mesures, il reprit la Silésie et la Lusace. La paix se fit enfin en M78, à des conditions très-glorieuses pour Matthias, qui, en conservant le tit1·e de roi de Bohême, ainsi que Wladislas, gardait pour lui les provinces de Moravie, de Silésie et de Lusace. Les woywodes de Transylvanie, de Walachie et de Moldavie cherchaient à se rendre indépendants ; ils profitaient de toutes les favorables pour attaquer Corvin ; chaque fois, ce prince les fit centrer dans le devoir. Après avoir pris la Servie et la Bosnie, Mohammed ll menaçait en même temps l’Allemagne et l’Italie ; les papes, pour arrêter cet ennemi formidable de la chrétienté, avaient jeté les yeux sur Corvin, que l’on regardait comme un des premiers généraux de son temps ; malheureusement ce pri11ce était trop occupé d’autres projets ; ses guerres avec les Turcs furent mêlées de succès et de revers ; il entra souvent sur leur territoire, et eux pénétrèrent plus d’une fois au delà des frontières de la Hongrie ; Bajazet, successem· de Mohammed, recherche l’amitié de Matthias, espérant que, par le moyen de ce prince, il parviendrait à retirer son frère Zizime des mains des chevaliers de Rhodes ; mais ses propositions furent toujours rejetées. Corvin mourut le 5 avril N90, dans sa 47° amiée, d’une attaque d’apoplexie, qui l’emporta en trois jours. C’est à ce prince que l’armée hongroise doit son organisation. Avant lui, elle ne consistait qu’en cavalerie levée à la hâte ; chaque soldat s’armait et s’équipait comme ll voulait. Corvin se forma un corps d’infanterie ; qu’il appelala garde noire ; c’est au milieu de ces

1 l l COR vielllesbandesqu’ilatl’i-onta tous les dangersàBreslau, à Barnia et dans d’autres circonstances périlleuses ; enfin c’est cette infanterie qui lui asmra partout la victoire. Il lui donnait l’exemple d’une intrépidité dont l’histoire nous a conservé un grand nombre de’traits ; nous n’en rapporterons qu’un seul. Pendant qu’il faisait le siège de Neustadt, en Autriche, nm envoyé du sultan Bajaset vint le trouver ; Matthias lui dit de le suivre et de lui exposer le sujet de sa mission. On se trouvait tellement exposé au feu des assiégés, que l’ambassadeur eürayé balbutiait, ne pouvant se rappeler ce que son maître l’avait c, hargé de dire. Corvin le rassurait en riant ; il £s’arrêta et donna tranquillement sa réponse au milieu du feu le plus vif. L’envoyé turc, qui ne se ’ rappelait ni ce qu’il avait dit, ni ce qu’on lui avait répondu, demanda une seconde audience ; Matthias le congédia, en se moquent de sa pusillanimité. Ce prince montra souvent la plus sévère loyauté envers ses ennemis. Les deuxtils de Podiébrad étant venus, à son invitation, le voir à Olmutz, le légat du pape lui fit observer qu’il n’avait donné li ces deux princes aucune assurance parécrit, et qu’il étaitle maître de les faire arrêter. À à qui tenez-vous.un tel discours ? lui dit Corvin. Sachez qu’un signe de ma part estsacré ; ilvautmieuxqueles paroles écrites que donnent les lâches qui vous ressemblent Un autre trait, que l’on.cite· de lui, marque l’homme grand, mais soumis aux faiblesses de l’humanité. Un émissaire s’était engagé à faire périr Podiébrad parle fer, si on voulait lui donner cinq cents ducats. Le roi avait promis la récompense. Ce malhemuux, après avoir cherché-inutilement l’occasion d’exécuter le coup qu’il méditait, vient dire à Corvin qu’il avait un moyen sur de donner du poison à Podiébrad. Retires-vous, lui dit ce prince ; contre mes ennemis, je n’emploie que l’épée ; » il fit avertir Podiébrad de ne manger qu’après avoir fait goûter les mets à éelui qui les aurait préparés. Jean de Cisinge, neveu du savant Witez (voy. Cnsmes), étant mort dans la disgrâce du roi, les chanoines de sa cathédrale avaient laissé son corps sans sépulture ; le roi, lorsqu’il l’apprit, lem· en marqua son indignation. sNe savez-vous donc pas encore, leurécrivitil, que je ne fais la guerre qu’aux vivants et jamais aux morts ? n Corvin, dans sa jeunesse, avait été parfaitement instruit dans les sciences ; il parlait la plupart des langues vivantes, et s’exprimait avec une grande facilité en latin ; il connaissait les aute1u-s de l’antiquité, surtout ceux qui ont rapport àlasciencemilitaire. llaimaitàs’entreteniràtable avec des hommes instruits ; il protégeait les sciences ; la nation hongroise lui doit des établisse- y ments très-utiles. Avant lui, quelques écoles avalmt e étéétabliesparLouisl*’ ;Matthiasconç¤rt, en 1465, ’ le dessein d’érlger une université ; le pape Paul II t l’y autorise par un bref adressé à, Witei, qui le secondait dans ses grands desseins. Le prince avait le projet de bâtir une ville savante qui put contenir quarante mille étudiants avec leurs maîtres, médecins, chirurgiens, et autres personnes nécessaires i