château ; seulement il l’attribue non à Thomas, mais à Pierre Corneille, probablement dans la pensée que les sages avis qu’il contient auront plus de poids sous le nom de ce dernier. Les Œuvres choisies ont encore été publiées : Paris, avec les chefs-d’œuvre de Thomas, 1822, 5 vol. in-8o, port. ; ibid., avec de nouvelles remarques de Ch. Nodier et P. Lepeintre, 1824-25, 2 vol. in-8o, port., faisant partie de la Bibliothèque dramatique ; ibid. (sans commentaires précédées de la vie de Corneille par Fontenelle, et avec des préfaces et avertissements, 1825, 5 vol. in-18, dans le Répertoire publié par Ladrange, et séparément ; ibid., avec les examens de Voltaire et de Laharpe, etc., 1825, 4 vol. in-8o. Les curieux recherchent la tragédie de Rodogune imprimée à Versailles, dans l’appartement et sous les yeux de madame de Pompadour, 1760, in-4o, avec des figures dessinées par Boucher. Les ouvrages de P. Corneille, outre ses pièces de théâtre, ses examens et ses discours dont on a déjà parlé, sont : 1° Mélanges poétiques, Paris, 1632, à la suite de Clitandre, in-8o : ce sont les premiers essais de l’auteur. Ce recueil est très rare. 2) Œuvres diverses, précédées d’une préface historique et bibliographique par l’abbé Granet, et de la Défense du grand Corneille, par le P. Tournemine, Paris, 1738, in-12 de 461 pages. Ce volume renferme les essais qui formaient le recueil des Mélanges, divers poÊmes composés à la louange de Louis XIV et du dauphin (de 1665 à 1680), avec les traductions latines de plusieurs poèmes par Santeul et le P. la Rue, et d’autres poésies françaises et latines sur différents sujets. L’éditeur y parle d’une traduction en vers des deux premiers livres de la Thébaïde de Stace, faite par Corneille, et imprimée vers l’an 1671 ; mais tout porte à croire que Corneille en a supprimé avec soin les exemplaires, puisqu’il a été impossible d’en retrouver un seul. 3° Lettre apologétique du sieur Corneille, contenant sa réponse aux observations faites par le sieur de Scudéry, sur le Cid, Rouen, 1637, in-8o ; 4° Imitation de Jésus-Christ, traduite et paraphrasée en vers françois, Rouen, 1666, in-4o. Les 20 premiers chapitres du 1er livre avaient été publiés en 1661. Cette paraphrase a eu, au moins, quarante éditions. 5° Louanges de la Ste. Vierge, composées en rimes latines par St. Bonaventure, et mises en vers françois, Rouen, 1665, in-12, insérées dans les Œuvres diverses publiées par l’abbé Granet. 6° Office de la Ste. Vierge, traduit en français, tant en vers qu’en prose, avec les sept Psaumes pénitentiaux, les Vespres et Complies du dimanche, et tous les hymnes du Bréviaire romain, Paris, 1670, in-12. On trouve encore diverses poésies latines et françaises de Corneille dans les Triomphes de Louis le Juste, dans les Epinicia Musarum, à la louange du cardinal de Richelieu, dans les Recueils de Sercy, dans la Guirlande de Julie, parmi les poésies du P. la Rue, celles de Santeul, etc. (Voy. aussi les articles Aubignac, Baretti, Lavau.)V. F.
CORNEILLE (Thomas), frère de Pierre, naquit, vingt ans après lui, à Rouen, le 20 août 1625, et, tant que le grand Corneille vécut, fut appelé Corneille le jeune. « C’était, dit Voltaire, un homme d’un très-grand mérite et d’une vaste littérature ; et, si vous exceptez Racine, auquel il ne faut comparer personne, il était le seul de son temps qui fût digne d’être le premier au-dessous de son frère. » Il fit ses études chez les jésuites. Pendant sa rhétorique, il composa une comédie en vers latins, que son régent trouva supérieure, et qu’il crut devoir substituer à celle qu’il avait faite lui-même pour la distribution des prix. Ayant achevé ses études, Thomas vint à Paris, où les succès de son frère l’engagèrent sans doute à suivre la carrière du théâtre. Voltaire a dit qu’il fit trente-trois pièces de théâtre, comme son aîné ; mais on en compte quarante-deux. Nous en donnerons ici la liste, parce qu’elle ne se trouve exacte et complète ni dans l’Histoire de l’Académie, ni dans les Recherches de Beauchamps, ni dans la Bibliothèque du Théâtre-Français, attribuée au duc de la Vallière, ni dans les autres recueils ou répertoires dramatiques. La première pièce de Thomas Corneille, les Engagements du hasard, fut représentée, en 1647, sur le théâtre de l’hôtel de Bourgogne. Le sujet et les situations sont pris dans deux pièces de Caldéron. Le Feint Astrologue, imité du même auteur, fut joué en 1648 ; Don Bertrand de Cigaral (1650), dont le fonds appartient à don Francisco de Roxas, fut représenté avec succès à Paris, et sur le théâtre de la cour. Le sujet de l’Amour à la mode (1653) est pris dans une pièce d’Antonio de Solis ; celui du Berger extravagant (1634), pastorale burlesque, dans un roman satirique de Sorel, qui porte le même titre. Les Illustres Ennemis (1654) précédèrent le Charme de la voix, (1655), imitation d’Augustin Moreto, qui n’obtint aucun succès. Le Geôlier de soi-même, ou Jodelet prince (1655), est le même sujet que Scarron avait traité ou plutôt défiguré, sous le titre du Gardien de soi-même. Toutes ces comédies, en 5 actes et en vers, offrent des intrigues espagnoles. Jusque-là Thomas Corneille avait imité son frère. L’un et l’autre consacrèrent à Thalie les premières années de leur carrière théâtrale ; l’un et l’autre publièrent à peu près le même nombre de comédies, avant de s’essayer dans la tragédie. Mais si Thomas obtint plus de succès que Pierre dans ses débuts, il resta dans la suite bien loin derrière lui. Il fit jouer cinq tragédies dans l’espace de quatre années : Timocrate (1656), Bérénice (1657), la Mort de l’empereur Commode (1658), Darius, et Stilicon (1660). Timocrate eut un succès prodigieux ; on le joua sans interruption pendant six mois. Louis XIV alla le voir au théâtre du Marais. La pièce avait eu quatre-vingts représentations, et le public ne cessait de la redemander. Les comédiens se rebutèrent les premiers. L’un d’eux s’avança un jour sur le bord du théâtre, et dit : « Vous ne vous lassez point d’entendre Timocrate ; pour nous, nous sommes las de le jouer. Nous courons risque d’oublier nos autres pièces ; trouvez bon que nous ne le représentions plus. » Après ce succès inouï, les amis de Thomas, croyant que désormais il ne pouvait plus ajouter à sa gloire, lui conseillèrent de ne plus travailler pour le théâtre. Les représentations de Timocrate