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baïdjan, vers la fin de l’empire des Ilèdes, et peu d’années avant l’avènement de Cyrus au trône de Perse (soit vers 564 avant J.-C.), il passe sa jeunesse dans la pratique de la sagesse et de la vertu, et médite une réformation religieuse. l’abaissement des Mèdes conquis par les hordes belliqueuses de Cyrus excite encore en lui ce désir dont l’accomplissement rendra du moins une espèce de suprématie à la nation subjuguée, et tempérera l’orgueil des vainqueurs. C’est donc lorsque toute l’Asie en deçà de l’lndus obéit au neveu de Cyaxare (536 avantl.-C.), ou peu après le commencement de ce nouvel état de choses, qu’il prélude à l’exécution de son projet par un voyage dans l’lran, c’est-à-dire dans la Bactriane, la Médie, et toutes les contrées situées à l’ouest du Sindh et à l’orient du Tigre. La vue des obstacles qu’il sera obligé de surmonter, de l’indocilité des Perses, du peu de bonne foi et de bienveillance des mages, actuellement dépositaires des systèmes religieux. lui fait verser des larmes : il sort de l’lran, les yeux humides et le cœur rempli d’amertume en songeant à la tâche épineuse qu’il s’est imposée (534). Cependant il n’y renonce pas, et soit pour attendre des temps plus heureux, soit pour ajouter à la somme de ses connaissances en astronomie, en physique et en philosophie naturelle, se préparer à l’exécution des merveilles que l’ignorance publique regarde comme des miracles, irréfragables témoins d’ime révélation, et rédiger cette encyclopédie religieuse qu’il va prêcher sous le nom de Zend-Avesta ou parole de vie, il’met la mer Caspienne entre lui et l’Iran, et se confme dans une retraite studieuse, tantôt au sommet des montagnes arméniennes, tantôt au sein de la populeuse et savante Babylone, observatoire perpétuel des Chaldéens, asile des sages de la Judée, but des pèlerinages scientifiques de Pythagore. Pendant qu’il converse, qu’il écrit, qu’il observe, l’empire passe en d’autres mains, et le sceptre de Cyrus, soustrait à la furibonde démence de Cambyse par l’artifice d’un faux Smerdis, se fixe eniin dans la maison du fils d’Hystaspe. C’est ce prince qui doit fondre en un corps des membres pèle-mèle et violemment réunis sous sa domination, et promulguer le Zend-Avesta. Zoroastre, âgé de quarante-deux ans, parait, sans doute de concertavec Darius, au milieu de la Bactriane, que ce prince visite momentanément ; et l’écIat des prodiges qu’il exécute confond et irrite ses ennemis. Aussi, tandis que le monarque, son prosélyte, veut déjà remplir ses provinces d’Atechgåhs, tantôt ils s’efforcent de noircir Zoroastre par des calomnies bientôt réfutées pa r le prophète et punies par le prince, tantôt ils excitent en secret es sujets à prendre les armes. Ainsi l’ancienne capitale de l’Assyrie, choquée peut-être de ce qu’on veut épurer son sabéisme, aussi ancien que le monde, et lui substituer la pyrodulie et la pyrométrie, se déclare indépendante du royaume


d’lran ; et cette guerre de la partie ancienne de la Perse contre la partie touranienne ne se termine par la victoire qu’après une sanglante alternative de revers et de succès et un intervalle de quatre ans. instruit par cette lutte, Darius n’emploie plus que la douceur et la persuasion pour convertir. Il envoie ses fils dans les diverses provinces, plante le célèbre cyprès, et institue le pèlerinage. Des brahmes mêmes viennent comme pour disputer contre l’excellence de la nouvelle religion, qu’au fond ils ne devaient pas plus haïr que l’ancienne, puisque ni l’une ni l’autre n’était celle des Védas et des Beths, et ils cédent, dès le commencement de l’entrevue, la victoire à Zoroastre. Rentrés ensuite dans leur patrie avec des croyances différentes de celles qu’ils avaient emportées, ils veulent sans doute y étendre le zoroastrisme ; et Darius prète à leur éloquence le secours de ses soldats ; mais, pour indemnité, il annexe à ses vastes domaines quelques peuples de l’Inde (les Orites, les Arbites, les Pasirites, etc.). C’est sans doute au milieu de ces événements que Zoroastre meurt au comble de la gloire, et dirigeant, du fond des temples de la Bactriane, ou du haut du cyprès, qu’il a fait qualifier du titre d’arbre de vie, les affaires religieuses de l’empire de Perse. Au reste, nous devons rappeler que, selon quelques écrivains orientaux modernes, il meurt au sac de Balkh, avec Lohrasp, père de Darius. Mais comme cette version ne s’appuie ni sur la majorité ni sur l’authenticité des témoignages, on peut sans scrupule la négliger ; et c’est à tort que l’abbé Foucher, s’en exagérant l’importance (voy. le Mëm. déjà cité, Mém. de l’acad. du îmeript., t. 27), a été conduit, eu grande partie par ces renseignements, à imaginer ses deux Zoroastres. L’abdication de Lohrasp, sa retraite, sa vie monacale, sa mort violente au milieu des sujets qu’il commandait, malgré son grand âge, et au milieu des nombreux sectateurs de la nouvelle religion, sont peut-être aussi des faits d’une autre époque, gratuitement transportés sous Darius, et rattachés sans raison à la vie de Zoroastre. Peut-être aussi ne sont-ils qu’une altération presque méconnaissable de l’histoire du faux Smerdis, prédécesseur et non père de Darius, assassiné au milieu de ses mages par les satrapes perses. Confondant ce massacre, immortalisé dans la suite par l’institution d’une féte dont Hérodote traduit le nom par celui de Magophonie (massacre des mages), avec celui dont les Scythes purent se souiller dans leurs guerres avec l’Iran, les modernes Asiatiques s’imaginèrent probablement que cette vaste boucherie tenait à une invasion étrangère et non à une réaction politique, à un changement de dynastie, à un revirement de la puissance momentanément reconquise par les Mèdes, et presque aussitôt ravie à ceux-ci par les Perses. Ils pensèrent aussi que ce prince, toujours enfermé au milieu de ses mages, avait abdiqué pour se livrer aux pratiques