Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 45.djvu/609

Cette page n’a pas encore été corrigée

596 ZOR ZOR


le besoin d’être gouverné d’après des lois fixes et une règle uniforme ; La religion seule, dans les temps reculés où la civilisation était encore si imparfaite, pouvait remplir un tel but, et réunir en un faisceau les divers royaumes soumis par le génie de Cyrus. Aussi ne conteste-t-on point que les opérations de Zoroastre furent faites dans un but et dans un sens politiques autant que dans des vues religieuses. C’est ce que la lecture du Vendídad et du Boundehech achève de mettre hors de doute. Enfin les Perses et les mahométans nous présentent aussi souvent leur Ke-Gustasp à lsthakar qu’à Balkh, alors chef-lieu du magisme et métropole de la nouvelle religion. Or, lsthakar est Persépolis, et ce n’est qu’à partir de Darius que cette ville magnifique devint le séjour des monarques persans. Dans la suite même, elle fut aussi la capitale religieuse de tout l’empire. C’est là que les princes reçurent la consécration royale, que les mages tinrent leurs assemblées les plus célèbres, que l’art couvrit les murailles, les temples, les palais, les tombeaux, de symboles sacrés et d’hiéroglyphes. Persepolis. berceau et sépulcre des rois, cité lumineuse des fils du Soleil, était pour les pieux sujets de la race hystaspide, ce que Jérusalem était pour les Hébreux, et ce que dans la suite la Mecque fut pour les musulmans. Mais rien de tout cela n’existait encore avec cette prédominance de formes à la naissance de cette religion : Hérodote même, qui se tait complétement sur Zoroastre, et dont le silence a été allégué fort mal à propos, il nous semble, comme une preuve de l’antériorité du prophète sur le monarque, dit formellement que les Perses, adorateurs des éléments et des astres, ne leur élevaient ni temples, ni autels, ni simulacres. Cette simplicité excessive doit-clle être considérée comme état primitif d’une religion qui dans la suite se surchargea de cérémonies dramatiques et (l’ornements empruntés aux arts ? ou bien n’est-elle que la simplification d’un culte originairement plus compliqué et plus riche ? Cette dernière supposition ne peut soutenir l’examen. En effet, sans nods demander lequel est le plus conforme à la nature et à la marche ordinaire de l’esprit humain d’aller du simple au composé ou du composé au simple, qui ne voit que, puisque longtemps après Darius la Perse et même l’Asie Mineure étaient remplies d’Atechgàhs, où se rassemblaient les disciples de Zoroastre, la complication des rites suivit la simplicité ? Comment d’ailleurs, si cette extrême épuration du culte avait eu lieu après la mission de Zoroastre, et la promulgation du Zend-Avesta, qui en est si éloignée ; comment, disons-nous, Hérodote aurait-il nié l’existence des temples, des autels en Perse ? Ces temples, ces autels sans doute auraient été vides ou consacrés à d’autres usages que ceux de la religion ; mais ils auraient été debout, et lors même que quelques-uns eussent été détruits, comment l’historien n’au-


rait-il pas fait mention et de leur ruine et de la révolution à laquelle leur destruction se rattachait ? De même, si Zoroastre, si ce philosophe illustre dans tout l’Orient avait vécu ongtemps avant lui, comment son nom aurait-il été omis dans ce recueil si exact des traditions alors en vogue dans l’orient ? Tout s’explique si l’on fait de Zoroastre un contemporain d’Hérodote. En effet, autant, grâce à l’imprimerie, à la célérité des communications et à la diffusion des connaissances, il est facile aujourd’hui de connaître parfaitement les événements contemporains, autant alors l’absence de toutes ces circonstances rendait en quelque sorte insaisissable la connaissance de ces événements, à moins qu’ils ne fussent de nature à froisser, à servir de grandes masses. Or, la réformation de Zoroastre ne semble presque avoir été d’abord qu’une affaire de cour, qu’un essai tenté dans une province lointaine ; et c’est à la longue qu’on voit les doctrines et le code du réformateur gagner du terrain et arriver au rang de culte dominant et de religion de l’empire. Peut-être même cette révolution commencée sous Darius ne se consomma-t-elle que sous Xercès ou sous Artaxerce. Mais l’on ne peut douter qu’à cette étpoque Zoroastre ne fût mort. Anquetil, qui,’après l’assertion formelle du petit Ravaet, folio 63, lui donne soixante-dix-sept ans de vie, le fait naître l’an 589 avant.l.-C., et mourir en 512. Peut-être vaudrait-il mieux avancer cette époque d’environ vingt-cinq années, et par conséquent distribuer ses principaux événements sur l’espace compris entre 564 et 487. Par là du moins on verrait plus longtemps ensemble Darius et Zoroastre. On expliquerait aussi avec plus de facilité les voyages du philosophe à Babylone et ses conférences avec Pythagore, voyages et conférences qui durent avoir lieu avant l’époque de sa prétendue mission et ses excursions dans l’lran. Tous les historiens s’accordent à faire voyager Pythagore en Orient vers le temps de Cambyse, qui, selon quelques-uns, l’aurait fait prisonnier en Égypte. Zoroastre était alors âgé d’environ trente-six ans ; ce qui ne choque nullement les traditions orientales, qui le font arriver à la cour de Darius âgé de quarante ans (dans notre système il en aurait eu quarante deux), et ce qui cadre parfaitement avec l’idée que l’on doit se faire de cette absence de dix ans, de cette vie solitaire sur les montagnes, et de cette retraite dans une grotte que tout annonce avoir été un laboratoire astronomique. On n’objectera pas sans doute que, dans cette hypothèse, Zoroastre se trouverait avoir cinq ans de moins que Pythagore, né, selon Dodwell (De eme Pythagore), l’an 569 avantl.-C. Pythagore venait conférer avec les sages de la Chaldée, plutôt que se faire leur disciple, et qu’est-ce d’ailleurs que cette différence d’âge ? Ces points principaux une fois admis, quel sera le résumé le plus probable de la vie de Zoroastre ? Le voici : né dans l’Ader-