Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 45.djvu/20

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de luxe, mais tout simplement d’ajouter à l’étude de l’arabe celle du persan et du sanscrit. Parfaitement accueilli par les savants français, toujours empressés de témoigner leur bienveillance à leurs confrères du dehors, il fit de la France sa seconde patrie. La société asiatique, dont il devint membre, et la bibliothèque de Paris mirent à sa disposition tous leurs trésors, on lui permit même emporter et d’étudier chez lui les manuscrits arabes. Il en résulta que, dès l’année suivante, en 1851, il put publier l’Algèbre d’Omar Alkhyyàmi. Cet ouvrage, dans lequel l’auteur fait ressortir les progrès des Arabes à cet âge de la science, fut suivi, en 1853, de la publication de l’Extrait du Fakhri. Woepcke le présenta à l’Institut, et il fut imprimé aux frais du gouvernement. Une œuvre nouvelle, malheureusement la dernière du regrettable mathématicien orientaliste, attira ensuite l’attention du monde savant, nous voulons parler du Mémoire sur la propagation des chiffres indiens, publié en 1863, aux frais de la société asiatique, dans le journal de cette société. Woepcke y fait avec une remarquable clarté l’histoire de l’introduction du calcul indien en Europe, où les caractères qui le représentent reçurent le nom de chiffres arabes. Mais cette dénomination indique-t-elle que les Arabes en furent les inventeurs ? L’auteur établit, par des rapprochements qui peuvent paraître concluants, que l’origine indienne de ces chiffres ne saurait être mise en doute. Il observe d’ailleurs que les Arabes eux-mêmes conviennent d’avoir reçu leurs chiffres des indiens, et que l’on aurait tort de leur attribuer une invention à laquelle ils ne prétendent point. Seulement, on doit aux Arabes d’Espagne, « calculateurs habiles », dit l’auteur, « cette forme cursive que présentent les chiffres gobar, et sous laquelle on les voit tout à coup paraître chez les peuples chrétiens de l’Europe au 13e siècle et se répandre sous le nom de chiffres arabes, parce qu’ils leur étaient venus des Arabes d’Espagne ». Il serait difficile peut-être d’affirmer positivement que c’est ainsi que se fit cette sorte de migration, mais cette explication n’a rien d’invraisemblable ; en tout cas, elle serait ingénieuse, et l’on ne peut que s’affliger de voir disparaître sitôt du monde scientifique un érudit consciencieux comme Woepcke. Il mourut le 24 mars 1864. Ce savant a écrit d’intéressants mémoires sur des questions de philologie et de mathématiques. Voici la liste complète de ses ouvrages : 1° Disquisitiones archeologico-mathematicæ circa solaria veterum, Berlin, 1847 ; 2° l’Algèbre d’Omar Akrhyyâmi, publiée, traduite et accompagnée d’extraits des manuscrits inédits, Paris, 1851 ; 3° Extrait du Fakhri, traité d’algèbre par Mohammed Alkarkhi, précédé d’un mémoire sur l’algèbre indéterminée chez les Arabes, ibld., 1853 ; 4° Mémoire sur l’introduction de l’arithmétique indienne en Occident, Rome, 1859 ; 5° Notice sur des traductions arabes de deux ouvrages perdus d’Euclide (Journal asiatique, 1851) ; 6° Notice sur une théorie ajoutée par Thabit-ben-Korrah à l’arithmétique spéculative des Grecs, ibid., 1852 ; 7° Notice sur des notations algébriques employées par les Arabes, ibid., 1854 ; 8° Analyse et extrait d’un recueil de constructions géométriques par Aboul-Wafa, ibid., 1855 ; 9° Sur une mesure de la circonférence du cercle due aux astronomes arabes et fondée sur un calcul d’Aboul-Wafa, ibid., 1860 ; 10° Discussion de deux méthodes arabes pour déterminer une valeur approchant de sin 1° (Liouville, journal de 1854) ; 11° Sur un essai de déterminer la nature de la racine d’une opération du troisième degré, contenu dans un ouvrage de Léonard de Pise, ibid., 1854 ; 12° Note sur le traité des nombres carrés de Léonard de Pise, ibid., 1854 ; 13° Sur le mot kardaga et sur une méthode indienne pour calculer les sinus (Nouvelles Annales des mathématiques, 13, 1854) ; 14° Sur une donnée historique relative à l’emploi des chiffres indiens par les Arabes (Tortolini, Annales des sciences mathématiques et physiques, t. 6, 1855) ; 15° Essai d’une restitution des travaux perdus d’Apollonius sur les quantités irrationnelles (mémoire présenté à l’Académie des sciences de Paris, t. 14, 1856) ; 16° Sur un astrolabe arabe qui se trouve dans la bibliothèque de Berlin (dissertation adressée à l’académie de cette ville, 1858) ; 17° Traduction d’un chapitre des Prolégomènes d’Ibn Khaldoun, relatif aux sciences mathématiques, dans les Atti dell Accadem. pontifc. de Nuovi Lincei, 1856 ; 18° Traduction d’un fragment anonyme sur la formation des triangles en nombres entiers, et d’un autre traité arabe sur le même sujet, 1861 ; 19° Note sur les puissances de puissances et sur les fonctions inverses correspondantes (Crelle, Journal, 1851) ; 20° Propriétés générales des courbes algébriques et théorèmes sur les coniques homothétiques, ibid., 1857 ; 21° Propriété d’un système de courbes algébriques ayant en commun un certain nombre de points, ibid. ; 22° Propriétés de certains systèmes de surfaces du second ordre, ibid. ; 23° Note sur une propriété d’un système de quatre coniques, (Journal de Liouville, 1851) ; 24° Théorèmes relatifs aux intersections de certains systèmes de courbes ou de surfaces, ibid., 1855 ; 25° Sur l’équation générale du neuvième degré à deux variables dans laquelle on fait varier un des coefficients, ibid., 1859 ; 26° Sur une classe de fonctions qui peuvent s’exprimer rationnellement les unes par les autres, ibid.; 27° Théorèmes sur le cône de révolution, ibid., 1861 ; 28° Sopra la teorica dei numeri congrui, dans les Annales des mathématiques pures et appliquées, 1860. On peut consulter sur Woepcke : 1° l’exacte nécrologie de ce savant d’après les notes de son père, dans les Archives de mathématiques et de physique de Grunert ; 2° les Nouvelles Annales des mathématiques, 2e série, t. 2 ; 3° enfin le Manuel biographies-littéraire