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-ghna, des villes qu’il peupla de Slavo-Novogorodiens, de Krivitches, de Tchoudes et de Viatitches. Il entoura de murs Biélogorod, dont il fit une de ses résidences favorites. Il eut, en 993, avec les Crovates ou Chrobates, qui habitaient les frontières de la Transilvanie et de la Gallicie, une guerre dont on ne connait point les circonstances. Pendant qu’il était occupé dans cette partie de ses frontières, il apprit que les Pieczyngowiens, ayant passé la Soula, s’étaient jetés sur la principauté de Kiow. Il aocourut, et les rencontra sur les bords du Troubége. Un nouveau Goliath, qui, d’après le rapport des chroniques russes, venait tous les jours insulter le camp de Vladimir, fut terrassé par un jeune Russe, de petite stature, qui avait fait preuve de force et de bravoure, en saisissant des buffles furieux, comme David avait autrefois terrassé des lions. En mémoire de cet événement, Vladimir fit bâtir, sur les bords du Troubège, en l’endroit où le combat avait eu lieu, une ville qu’il appela Péréyaslaw ou Ville de la victoire. Le jeune vainqueur et son père, qui l’avait amené à Vladimir, furent élevés au rang de boyards. Vers l’an 996, le temple que les architectes grecs élevaient à Kiow étant achevé, le prince donna à la nouvelle basilique les ornements et les vases qu’il avait emportés de Cherson, comme les seuls trophées de sa victoire. Pour l’entretien du temple, qui s’appelle encore aujourd’hui l'église de la Dime, il affecta la dixième partie de ses domaines, et ses successeurs, à leur avènement, devaient s’engager par serment à accomplir cette fondation, dont la charte est déposée dans les archives de l’église. Il en célébra la dédicace par un festin auquel il invita les pauvres de Kiow. Dans une nouvelle guerre qu’il eut à soutenir contre les Pieczyngowiens, il échappa comme par miracle à un grand danger. Afin d accomplir le vœu qu’il avait fait en cette circonstance, il bâtit à Vasilew, sur la Stougna, une église en l’honneur de la Transfiguration de Notre-Seigneur. Il en célébra la dédicace par une fète dont les annales russes relèvent la magnificence en observant que l’on y but trois cents tonneaux d’hydromel, et que les convives passèrent avec lui huit jours assis à table. Les pauvres y furent traités d’une manière splendide. Étant rentre à Kiow, Vladimir donna un nouveau repas également somptueux ; depuis cette époque, es tables du palais étaient, même en son absence, richement servies et ouvertes à toutes les personnes distinguées qui se trouvaient dans la capitale. Un jour, raconte Nestor, les convives, qui avaient bu largement, se plaignaient entre eux de ce qu’à la table d’un si grand prince ils étaient obligés de se servir de cuillers et de fourchettes de bois. Vladimir, lorsqu’il l’apprit, se hàta d’en faire faire d’argent : « Ce n’est pas avec de l’or et de l’argent, dit-il, que j’aurai des officiers et des généraux fidèles ; mais j’ai besoin de leur affection pour me procurer de l’or et de l’argent.» Il était le père des pauvres ; l'entrée du palais leur était toujours ouverte : « Mais, disait-il, les malades ne peuvent pas venir me voir. » Ainsi il envoyait dans la ville des voitures chargées de pain, de viande, de poisson, de fruits, de miel, etc., et les distributions se faisaient dans les maisons. Ses serviteurs allaient de rue en rue, criant en son nom : « Où sont les pauvres et les malades ? » C’est ainsi que l’Evangile avait changé le cœur de ce prince, auparavant si dur, si féroce et si voluptueux, Ces paroles de Jésus-Christ : « Bienheureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde, » avaient fait sur ce prince une si forte impression, que sa bonté devenait nuisible aux intérêts de l’Etat. Il avait aboli la peine de mort, et il ne punissait plus l'homicide que par une amende. Le nombre des malfaiteurs s’étant accru d’une manière effrayante, on lui fit de fortes représentations : « Je crains la colère de Dieu, » dit-il. Cependant, sur de nouvelles instances, il rétablit la peine capitale. En 997, il s’était rendu à Novogorod ; les Pieczyngowiens, profitant de son éloignement, s’avancèrent jusque sous les murs de Biélogorod, dont ils levèrent · le siège, en apprenant que Vladimir approchait. Pendant son règne, ce prince prit toujours part aux événements politiques de la Norvège, d’où étaient sortis les princes Varègues ses ancètres. Olaüs se réfugia en Russie. Etant retourné en Norvège, et ayant chassé Eric, celui-ci s’en vengea en attaquant les côtes septentrionales de la Russie, qu’il fut bientôt obligé d’abandonner devant des forces imposantes. En 1011 Vladimir perdit son épouse, la princesse Anne, dont le ciel s’était servi pour le gagner à l’Evangile. En 1014, il apprit qu’Yaroslaw, celui de ses fils qu’il avait établi son lieutenant à Novogorod, révolté contre son père, avait appelé les Varègues à son secours. Ayant envoyé contre ce fils dénaturé son fils Boris, qu’il affectionnait particulièrement, il mourut à Bérezow, sans avoir pris aucune mesure pour régler sa succession (1015). Les courtisans voulurent cacher la mort de Vladimir, afin de donner à Boris le temps d’arriver, mais la triste nouvelle se répandit promptement, et la douleur éclata dans toute la ville. Le corps du monarque fut déposé près de celui de la princesse Anne, pendant que l’armée, le peuple, et surtout les pauvres faisaient retentir dans le temple les cris de leur douleur. Vladimir avait usurpé le trône par un fratricide ; mais il expia, en quelque sorte, son crime par ses exploits, et plus encore par les vertus dont il donna l’exemple après sa conversion. Il avait reculé les frontières de l’empire russe, et. protégé l’empire grec. Ce fut lui qui fonda les premières écollels en Russie. Il bâtit plusieurs villes, et donna à l’empire des institutions civiles et judiciaires. Un ancien code qui lui est attribué, mais qui paraît postérieur à son siècle, soustrait à la juridiction séculière les