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grand nombre d’églises. Le roi, reconnaissant, fonda, sous l’invocation de ce saint, une église collégiale à Cracovie. La reine, qui était adorée en Pologne, ne survécut que peu de temps à la naissance de son fils. D’après l’avis d’Othon, chapelain de la cour, le roi épousa en secondes noces la princesse Judith, sœur de l’empereur Henri IV, et veuve de Vladislas, roi de Hongrie. En quittant la Pologne, le roi Boleslas avait emmené avec lui Mieczyslas, son fils ainé. Le roi, son oncle, rappela le jeune prince en Pologne, lui donna une princesse russe en mariage, et peu de temps après, Mieczyslas mourut subitement, sur quoi se répondirent en Pologne des bruits très-défavorables à l’honneur de Vladislas. Les habitants de la Poméranie orientale étaient encore païens. Selon leur usage, ils s’étaient révoltés pour se soustraire au tribut que les rois de Pologne leur avaient imposé. Vladislas marcha contre eux, et après leur défaite (1091), il prit des précautions contre de nouvelles révoltes; cependant dès l’année suivante ils tombèrent sur lui tout à coup, espérant le surprendre. On se battit jusqu’à la nuit, et le champ de bataille lui resta. Cette campagne n’ayant point été décisive, le roi en fit une troisième, et les Poméraniens se soumirent. Les Bohémiens s’étant jetés sur la Silésie, il envoya contre eux une armée qui ravagea la Moravie (l094). Son fils Boleslas, qui n’avait que neuf ans, demanda avec instance la permission de faire cette campagne, ce qui ne lui fût accordé que l’année suivante. Ce jeune prince s’opposa alors à Sieciech, lieutenant du roi, qui voulait lever le siège de Méséritz, et la fortune favorisa son audace. Sieciech abusait de la confiance du roi: Zbigniew, instruit de la haine que ce favori s’était attirée, sortit de son couvent, et se jeta dans la ville de Breslau, où il attirait les Polonais mécontents. Le roi vint mettre le siège devant cette ville, qui capitula. Zbignievv, qui avait pris la fuite, se rendit sur les frontières de la Poméranie, et arma contre son père. Vladislas attaqua ce fils rebelle, le fit prisonnier, et livra au pillage et au feu Kruszwicz, où il s’était enfermé. Cette ville, l’une des premières du royaume, fut ruinée au point qu’aujourd’hui on en voit à peine quelques vestiges. Zbigniew fut mis en prison. Le roi étant venu à Gnesne pour assister à la consécration de l’église cathédrale (1097), les évêques le conjurèrent de rendre la liberté à son fils, et d’éloigner de ses conseils Sieciech, qui était odieux à tout le royaume. Le favori fut exilé, et les Poméraniens s’étant de nouveau révoltés, le roi envoya contre eux ses fils Zbigniew et Boleslas. Les princes. comme il était facile de le prévoir, ne purent s’entendre, et la campagne ne fut point heureuse. Alors le père eut la pensée désastreuse de donner en apanage à Zbigniew la Mazovie et d’autres riches domaines. Ce premier partage est l’époque fatale où commencèrent les démembrements et les malheurs qui ont accablé la Pologne pendant plus de deux siècles. Sieciech étant rentré en faveur auprès du roi, les deux fils s’unirent contre leur père, qui se vit obligé d’éloigner de nouveau son favori. Le jeune Boleslas, alors âgé de quatorze ans, s’était déjà acquis une haute réputation de bravoure et de sagesse. Le roi de Bohême l’invita à un tournoi et à une fête royale, où il le créa son chevalier. Le père, qui voyait approcher sa fin, fit venir le jeune prince à Plock, où il tenait sa cour, pour le faire aussi son chevalier. On était occupé des préparatifs de la fête, qui devait avoir lieu le jour de l’Assomption, lorsque l’on apprit que les Poméraniens étaient venus assiéger Santock. Le jeune Boleslas se jeta aux genoux de son père, le conjurant de lui permettre d’aller délivrer la ville. Le roi et les seigneurs s’y opposèrent d’abord ; mais ils ne purent résister aux instances du jeune prince. Il rassemble des troupes, marcha en toute hâte contre l’ennemi, et le mit en fuite. Il revint à Plock, où le roi, au comble de sa joie, le créa chevalier (1100). Ce prince mourut le 5 juin 1102, dans la 39° année de son âge et la vingt et unième de son règne.

G—v.


VLADISLAS II, septième roi de Pologne, était fils de Boleslas III, dit Krzivousty, et d’une princesse russe, fille de Swientopelk. Étant l’aîné de la famille, il succéda, en 1139, à son père, qui avait donné à ses autres fils une partie de la Pologne en apanage. Vladislas avait épousé Agnès, petite-fille de l’empereur Conrad II, princesse ambitieuse et hautaine qui, pour le malheur de la Pologne, eut un grand ascendant sur son mari. En mourant, Boleslas avait donné à son fils ainé le titre de roi, avec autorité sur ses frères ; mais ce n’était qu’une vaine prérogative, puisque ce fils ne possédait en propre que la quatrième partie du royaume. Dans une diète convoquée à Cracovie, il fut résolu que les frères du roi gouverneraient, sans aucune dépendance les provinces qui leur étaient échues; que Vladislas aurait, avec le titre de roi, l’autorité suprême, le droit exclusif de déclarer la guerre, de commander les armées, et qu’en temps de guerre les princes seraient tenus de se trouver au lieu qu’il leur aurait assigné. Tous ces arrangements étaient plus que suffisants pour attirer sur la Pologne les maux qui accompagnent l’anarchie. Vladislas, excité par les discours de la reine, convoqua à Cracovie une seconde diète, où il représenta la nécessité de réunir les provinces que l’on venait de diviser, afin de donner au roi, avec une autorité réelle, les moyens de la soutenir. Il promettait de céder à ses frères ses domaines, dépendants de la couronne, avec lesquels ils pourraient vivre selon leur rang et leur dignité. La haute noblesse fit des représentations qui ne furent point écoutées. Vladislas, conduit par la reine, demanda un impôt général, dont ne furent point