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d’Italie, connue sous le nom des Bardi, ayant fait banqueroute en 1315, par suite d’avances énormes faites aux rois d’Angleterre et de Sicile, un grand nombre de maisons de Florence furent entraînées dans cette ruine, entre autres celle des Buonaccorsi, dans laquelle Villani était intéressé. Lui-même, devenu insolvable, fut jeté en prison ; on a conservé un document authentique de cette dernière disgrâce, à laquelle il ne fait qu’une allusion éloignée dans son Histoire ; seulement il s’élève vivement contre la faiblesse des citoyens qui consentaient à compromettre la fortune publique et privée, en la confiant à cette aristocratie financière si imprudente dans ses entreprises. Enfin, la fatale année 1348 étendit sur Florence cette vaste contagion qui, dans toutes les contrées du monde connu, moissonna une grande partie du genre humain, et notre historien fut une des victimes atteintes par le fléau. On voit s’interrompre à cette même époque les travaux de plusieurs autres annalistes, entre autres les Istorie Pistijesi, dont les auteurs périrent sans doute de même que Jean Villani. Ses derniers chapitres sont remplis par des événements funestes, et par des tremblements de terre, qui semblaient faire pressentir un malheur plus grand encore. — Son Histoire fut continuée par son frère, Matthieu Villani lequel composa onze livres, dont le dernier va jusqu’en 1363. Cette année fut marquée par une nouvelle peste, dite dell’ anguinaja ; et Matthieu Villani y succomba à son tour, dans un âge assez avancé, après cinq jours de maladie. Il devait cette prolongation de souffrance à la force de tempérament qu’il avait conservée par une vie sage et régulière. Tels sont, avec les noms des deux femmes auxquelles il fut marié, retrouvés par Manni, savoir, Lisa dé Buondelmonti et Monna de’ Pazzi, les uniques détails qui nous restent sur ce digne continuateur de Jean Villani, auquel il n’est inférieur que par son style un peu lâche et diffus, mais non pour l’exactitude, la sincérité, l’observation des faits et le bon sens, qualités qui ont fait invoquer son témoignage avec confiance par tous les auteurs qui sont venus depuis. — Ce peu de renseignements sur sa destinée nous a été transmis par son fils, Philippe Villani, dans le début d’une nouvelle continuation des Histoires à laquelle il ne put donner beaucoup de suite. Le travail de ce dernier se borne à quarante-deux chapitres, ajoutés au onzième livre de Matthieu, et comprend seulement la fin de 1363 avec l’année 1364. Philippe Villani a laissé d’autres ouvrages, dont nous parlerons plus bas ; mais nous commencerons par rendre compte des principales éditions du corps d’histoire composé par ces trois écrivains. Pendant près de deux siècles, leurs livres restèrent cachés en manuscrit, et furent connus seulement d’un petit nombre d’annalistes. Enfin

parut à Venise, en 1537, une première édition,

in-fol., de Jean Villani, à laquelle manquaient ses deux derniers livres, et en outre très-fautive. En 1559, les frères Giunti en donnèrent une bonne édition complète, collationnée sur des textes manuscrits et avec des notes de Remigio Nannini, Venise, in-4°. Plus tard, les mêmes Philippe et Jacques Giunti donnèrent les premiers l’Histoire de Matthieu Villani, Venise, 1562, sur un manuscrit appartenant à Jacques Castelvetro, non retrouvé depuis, dans lequel manquaient le livre huit et une partie du neuvième. Les éditeurs, s’étant établis à Florence, y trouvèrent, dans la famille Ricci, un manuscrit entier, sur lequel ils publièrent ce qui manquait des trois derniers livres, avec le supplément de Philippe Villani, Florence, 1577, in-4° ; et pour compléter l’ouvrage, ils réimprimèrent les neuf premiers livres de Matthieu Villani. en 1581, Florence, in-4°. Ces deux parties sont recherchées, et doivent étre réunies. On estime particulièrement aussi l’édition de Jean Villani, de 1587, Florence, in-4°. Muratori a donné un excellent texte des trois historiens, dans les tomes 13 et 14 des Scriptores rerum italicarum, collationné sur deux manuscrits Florentins de Matthieu et de Philippe, et sur un autre plus précieux encore de Jean, appartenant à J.-B. Recanati, noble vénitien. Le savant éditeur s’attacha à conserver scrupuleusement l’ancienne orthographe du temps des Villani, et reproduisit quelques passages avec des leçons toutes nouvelles et d’assez longues variantes à côté de l’ancien texte ; ce qui introduit dans les numéros des chapitres un léger changement, de peu d’inconvénient pour les recherches, attendu que ces chapitres sont souvent très-courts et précédés de titres assez étendus. En même temps que Muratori donnait cette édition, et la faisait tirer à part de sa grande collection, Milan, 1729, in-fol., on s’occupait à Florence d’une publication semblable d’après d’autres manuscrits ; et l’esprit de concurrence des nouveaux éditeurs semblait animé par le ressentiment d’une opinion littéraire blessée ; car Muratori avait combattu, dans un autre ouvrage (son traité Della perfetta poesia italiana), la doctrine exclusive des littérateurs toscans. qui faisaient du siècle de Boccace et de Jean Villani l’âge d’or de la prose italienne. Ce débat donna lieu à une guerre de plume assez vive ; et l’impression du manuscrit Davanzati, annoncée à Florence par les libraires Tartini et Franchi, ne s’acheva point. Les éditeurs des classiques de Milan ont donné, en 1802, l’Histoire de Jean Villani, formant les tomes 10 à 17 de cette collection in-8°, et précédée d’un éloge de l’auteur, par Massai, morceau utile à consulter. Cette édition est du reste conforme à celle de Muratori, excepté pour l’orthographe, dans laquelle on suit le système moderne. L’édition publiée par M. Tynagio Moutier, Florence, 1823, 8 vol. in-12, contient plusieurs morceaux importants publiés pour la première fois. Le même éditeur a fait reparaître en 1825-1826, en 6 vol.