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copier avec tout le reste la phrase où le narrateur en vient à parler de lui-même comme témoin oculaire. Quoique Villani donne des détails circonstanciés sur les événements de Florence pendant les huit années suivantes, on ne voit point qu’il y ait pris une part active, et l’on ignore s’il vit le siége de cette ville, que l’empereur Henri de Luxembourg forma sans succès en 1312. Plusieurs passages de ses histoires attestent qu’il était Guelfe prononcé ; cependant on n’a point retrouvé son nom sur la liste des Florentins dont l’empereur prononça la condamnation juridique après sa retraite à Pise. En 1316 et 1317, il siégea parmi les Priori de la république. En cette qualité, il sut, par un artifice ingénieux concerté avec ses collègues, effrayer les Pisans, qui se refusaient à conclure la paix avec Florence. Des lettres pour engager le roi de France à entrer en Italie, avec des offres de service très-considérables de la part des magistrats florentins, furent interceptées par les Pisans, sur un avis qu’on leur fit tenir à dessein ; et dans la crainte qu’ils conçurent de cette négociation simulée, ils se bâtèrent d’adopter des dispositions pacifiques. Villani, devenu vers le même temps directeur de la monnaie, fit faire un travail qui avait été négligé jusque-là, et qui convenait particulièrement à son goût pour les monuments historiques ; ce fut un registre exact de tous les citoyens qui avaient exercé la même charge avant lui, et la description des monnaies qu’ils avaient fait frapper. Il exerça de nouveau le priorat en 1321, et bien qu’il ne s’en trouve aucun témoignage dans son livre, d’anciens actes l’attestent suffisamment. Bientôt après, il fut chargé de présider à la construction des remparts et des tours dont on acheva de fermer enceinte de Florence, depuis la porte de San-Gallo jusqu’à celle de St-Ambroise. Il se trouvait, en 1323, à l’armée qui sortit de la ville pour repousser le tyran de Lucques, Castruccio Castracani. Cette armée, divisée en deux factions, celle des bourgeois peu exercés aux travaux guerriers, mais impatients de combattre, et celle des nobles qui s’opposaient à une action décisive, laissa échapper l’ennemi qu’elle eût pu sur ; prendre, et rentra sans honneur dans ses foyers (liv. 9, ch. 213). Castruccio ne cessant de causer aux Florentins de vives inquiétudes, Villani s’avisa d’envoyer à Paris une lettre au frère Denis de Borgo San-Sepolcro, son ami et celui de Pétrarque, pour lui demander quand finirait cet état de choses. La réponse fut une prédiction formelle de la mort prochaine de Castruccio, et de l’empire qui serait offert à Florence sur la cité de Lucques, prédiction renouvelée dans une seconde lettre que Villani, alors Priore pour la troisième fois, montra à ses collègues (liv. 10, ch. 85). Castruccio mourut en effet peu de temps après cette correspondance, en 1328 ; et la domination de Lucques fut offerte aux Florentins, par des aventuriers allemands, qui s’en étaient emparés, à condition de leur payer une somme de quatre-vingt mille florins d’or. Villani s’intéressa vivement à cette proposition, et se joignit à une compagnie de riches citoyens et d’exilés lucquois, qui offraient d’avancer l’État les trois quarts de la somme si l’arrangement était adopté. Mais les intrigues, les inimitiés qui régnaient dans la république, le firent échouer, au grand regret de notre historien (liv. 10, ch. 142). Pendant une grande disette qui eut lieu vers la même époque, il rendit d’importants services en qualité d’officier de la commune, par l’ordre qu’il établit dans la préparation et la distribution du pain (ibid., ch. 120). En 1331, il fut accusé de concussion avec deux religieux servites qui avaient été ses collègues, relativement à la gestion des deniers employés dix ans auparavant pour la construction des remparts. L’a(l’aire fut rigoureusement examinée, et se termina par l’entière absolution des accusés. L’année suivante les Florentins ayant résolu de fonder une place forte sur les confins du Bolonais et de la Romagne, comme on délibérait sur le nom à donner au nouvel établissement, ce fut Villani qui proposa de l’appeler Firenzuola, et il appuya son avis de plusieurs sages considérations qu’il rapporte dans son ouvrage (liv. 10, ch. 201). Il vit ensuite plusieurs désastres s’appesantir sur sa patrie, et eut à supporter lui-même des revers de fortune. En 1333, un débordement de l’Arno fit les plus grands ravages dans la ville et les environs ; écrivant sous l’impression des faits à mesure qu’ils se présentent, l’historien ajoute à l’intérêt de ses récits, pleins de candeur et de vérité locale, celui de ses propres réflexions, où dominent un grave (patriotisme, une piété toute conforme à l’esprit de son temps, mais souvent aussi la manie astrologique. Le seigneur de Vérone, Mastin de la Scala, fit soutenir aux Florentins et à leurs voisins une guerre funeste et dispendieuse. Après s’être rendu maître de Lucques, il voulut s’en défaire à l’encan ; cette fois Florence s’efforça de prévenir la concurrence de Pise ; elle offrit deux cent cinquante mille florins d’or en divers payements, et envoya en otage cinquante nobles citoyens, au nombre desquels fut notre historien, bien que contre son gré, par le choix des magistrats. Il passa comme otage deux mois et demi à Ferrare, et y fut reçu avec distinction par le marquis Obizzo, fils naturel de Mastin ; mais le pacte fut rompu par une vive attaque des Pisans contre la ville de Lucques, et par la guerre qui en résulta (liv. 11). L’année suivante, Villani vit avec douleur les bouleversements occasionnés dans Florence par le règne éphémère de Gauthier, duc d’Athènes, suivi de l’insurrection populaire qui le renversa. Il décrit ces événements avec beaucoup de chaleur et d’énergie dans son douzième et dernier livre. Une compagnie de banque, la plus considérable