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Dembarrère et Noël ont fait l’éloge de Vauban[1]. Allent a fait un récit fort exact et fort étendu des actions de ce grand homme dans l’Histoire du corps du génie, et nous ne pouvions puiser à meilleure source. La notice des écrits de Vauban serait aussi étendue que celle de ses travaux, et toutes deux ne pourraient qu’être incomplètes. On les divise en trois sections. La première comprend les mémoires sur les sièges, les places et les frontières, les canaux et les rivières navigables. Rappelons l’objet des principaux : 1° De l’importance dont Paris est à la France et soin que l’on doit prendre de sa conservation. La désastreuse campagne de 1706 faisait conseiller au roi d’abandonner sa capitale et de se retirer derrière la Loire. Vauban prouve qu’on doit garder Paris et qu’on peut s’y défendre : il appuie son projet d’un plan des fortifications que cette ville est susceptible de recevoir[2]. 2° Fragments d’un Mémoire sur la navigation générale de la France. Vauban mourut en le faisant. On a de lui un travail du même genre sur toutes les côtes de France. 3° Projets ou mémoires sur la navigation à établir dans les provinces du Nord ; sur les canaux : de Bourgogne, du Nivernais, du Charolais ; sur le moyen de joindre par un canal la Moselle à la Meuse ; sur le perfectionnement du canal des deux mers et son prolongement. La seconde section renferme les traités généraux ou œuvres militaires. Ce sont : 1° Instruction pour la conduite des sièges ; 2° le Traité de l’attaque des places ; 3° un autre pour leur défense[3] : 4° un Traité des mines ; 5° un Traité des fortifications de campagne ; 6° le Directeur général des fortifications ; 7° une Instruction pour servir au règlement du transport et du remuement des terres ; 8° le Livre de guerre ou des cinq principales actions militaires ; 9° des Mémoires militaires sur les défauts de notre infanterie, les moyens de la rétablir, etc. ; 10° Moyens d’améliorer nos troupes ; 11° Mémoire concernant la levée des gens de guerre ; 12° Méthode infaillible de procurer pour la défense de l’État tel nombre d’hommes dont on aura besoin ; 13° Moyen d’empêcher les abus dans la manière de faire subsister les armées ; 11° Mémoires sur les mineurs et sapeurs. Enfin, dans la troisième section sont comprises les œuvres diverses. Nous devons signaler : 1° la Dixme royale. Ce projet fut imprimé en 1707 (deux fois) et 1709 [4] ; mais on n’osa point y joindre le mémoire qui le termine et qui est intitulé Raisons secrètes et qui ne doivent être exposées qu’on roi seul, qui s’opposeraient à l’établissement du système de la dixme royale. Ces raisons sont le long chapitre des abus et des gens intéressés à les maintenir (voy. Saint-Pierre). Une quatrième édition de ce projet a été publiée par M. Daire en 1843, dans la Collection des économistes, mise au jour par l’éditeur Guillaumin. 2° Mémoires sur le rétablissement de l’édit de Nantes. Il y en a trois. Vauban y démontre la nécessité de rétablir l’édit de Nantes et de maintenir la tolérance religieuse. 3° Mémoire sur les limites de la puissance ecclésiastique dans les choses temporelles ; 4° Mémoires de statistique ; 5° Mémoires sur le commerce des Provinces- Unies ; 6° Mémoire concernant la course, les privilèges dont elle a besoin, les moyens de la faire avec succès sans hasarder d’affaires générales ; 7° État des affaires extraordinaires faites depuis 1689 jusques et y compris 1706. Noël, dans son éloge de Vauban, rappelle beaucoup d’autres mémoires sur les sciences économiques, la culture des forêts, les finances (voy. Renau d’Eliçagaray), la marine militaire et marchande, la population, la géographie, diverses branches de l’histoire et les mathématiques. On a imprimé, sous le nom du maréchal de Vauban, un Testament politique qui est de Bois-Guillebert (voy. ce nom). Les Italiens ont reproché à Vauban de s’être approprié diverses méthodes de fortifications de Marchi (voy. Marchi et Pagan). D-M-1’-

VAUBAN (Antoine Le Prestre, comte de), petit-neveu du précédent, lieutenant général des armées du roi, connu aussi sous le nom de seigneur de Puy-Vauban, né en 1659, entra dans le service militaire en 1672 avec le grade de lieutenant dans le régiment de Normandie. En 1674, il assista dans le génie au siège de Besançon, puis fut successivement nommé bri-


  1. L’Académie de Dijon ayant, en 1783. proposé pour sujet de prix l’éloge de Vauban, le prix lut décerné à Carnot (voy. ce nom). L’académie française proposa, en 1786, l’éloge de Vauban pour sujet de prix. Ce fut à cette occasion que Laclos, détracteur de Vauban, publia sa Lettre à l’Académie française, 1786, in-8° (voy. Laclos). Vers le même temps ’parurent des Mémoires pour servir à l’Eloge du maréchal de Vauban, par le chevalier de Curel, 1786. in-8°. Le prix n’était pas encore décerné en 1788, lorsque, à la séance publique du mois d’août, Gaillard lut des réflexions sur Vauban. Le prix fut remporté en 1790 par Noël ; son ouvrage a été imprimé, ainsi que celui de J.-A.-L. Sauviac, qui avait aussi concouru. Un Éloge de Vauban par A.-L. d’Antilly, qui avait concouru pour le prix de l’Académie française en 1787, a été imprimé en 1788, in-8°. MM. Vial et Reverony St-Cyr ont fait jouer, le 20 juin 1826, sur le théâtre de l’odéon, un drame intitulé Vauban à Charleroy, qui n’a eu que quelques représentations. Entre autres ouvrages relativisa l’illustre marechal, nous citerons une Notice de M. Amanton, Dijon. 1829, in-8° (tirée seulement a 60 exemplaires) ; la Notice historique de M. G. de Chambray, Paris, 1846, et l’ecrit de M. Augoyat : Abrégé des services du maréchal de Vauban, fait par lui en 1703, publié avec un supplément, Paris, 1839, in-8°. Un littérateur connu par une très-bonne Histoire de Louvois, M. Camille Rousset, a été chargé, en 1864, par le ministre de la guerre, d’écrire 1’histoire de Vauban d’après les pièces officielles conservées dans les archives du ministère. A. B-t et B-n-t.
  2. Ce Mémoire, tiré de l’ouvrage intitulé Oisivetés, a été imprimé pour la première fois à Paris. en 1821, avec l’Éloge de Vauban par Fontenelle. Les Mémoires sur Landau et Luxembourg ont été mis au jour par M. Augoyat, Paris, 1811, in-8°.
  3. M. Augoyat a donné, en 1829. Paris, in-Se, une nouvelle édition du traité de l'attague des places, entièrement conforme au manuscrit présenté par Vauban au duc de Bourgogne ; et le baron de Valazé, une nouvelle édition du Traité de la defense des places. Paris, 1829, lu-80, augmentée des agenda du maréchal sur l'attaque et la défense, et de ses notes critiques sur les discours de Deshoulières, relatifs à la défense.
  4. La Dixme royale pose d’une manière plus ou moins explicite, entre autres principes, que le souverain doit protection égale à tous ses sujets ; que le travail est le principe de toute richesse, et l’agriculture le travail par excellence ; que l’impôt doit frapper avec une égalité proportionnelle les revenus de toute nature qui existent dans l’État ; que les taxes indirectes nuisent à l’entretien du peuple, au commerce et a la consommation ; que le menu peuple qu’on accable et qu’on méprise est le véritable soutien de l’État. À Telles sont, observe M. Eug. Daire, les vérités principales qui dominent le livre de Vauban, et qu’il développe avec « a une sorte d’onction militaire, si l’on peut s’exprimer ainsi. »