troupes pour se faire reconnaître, et prit le chemin
de la Grande-Pologne, pensant qu’à sa vue
tout rentrerait dans le devoir. Malheureusement
il s’arrêta quelque temps à Olmutx pour attendre
des renforts ; et là, tandis qu’il donnait des festins
et des fêtes, ne songeant qu’aux plaisirs et
semblant avoir perdu de vue son entreprise, il
fut assassiné par un gentilhomme thuringien,
nommé Conrad Potenstein, en 1306. Le meurtrier,
arrêté sur un escalier, fut aussitôt déchiré
en pièces par les officiers qui entouraient le roi,
et ne put indiquer ses complices ou ses instigateurs.
On dit, ans le temps, qu’un époux déshonoré
par ce prince voluptueux avait conduit le
coup ; mais il semble plus naturel de chercher
les auteurs du crime dans la maison de Habsbourg.
Venceslas mourait à peine âgé de 16 ans,
et sans postérité ; en lui s’éteignait la race antique
des Przémislas Ottocare : deux filles seulement
et la veuve de Venceslas le Vieux vivaient
encore. Rodolphe d’Autriche, second époux de
celle-ci, fut un de ceux qui prétendirent à la
couronne de Bohême, et le grand chambellan
Béchin ayant osé parler en sa faveur, Crussina,
riche bohémien, lui répondit publiquement :
« Comment osez-vous nommer ici l’assassin de
nos rois ? » P-OT.
VENCESLAS VI, empereur d’Allemagne et roi de Bohême, surnommé tantôt l’Ivrogne et tantôt le Fainéant, naquit en 1359, de ce Charles Ier ou Charles IV (de Luxembourg), dont on a répété souvent qu’il avait ruiné sa maison pour arriver à l’Empire, et l’Empire pour relever sa maison. Fils ainé de ce potentat ambitieux, il porta, dès son enfance, le titre de marquis de Brandebourg, que dans la suite il céda à son puîné Sigismond, et à l’âge de dix-sept ans (1376), il fut présenté par son père à la candidature de l’Empire. Un manifeste fut publié, dans lequel l’Empereur s’étendit sur la nécessité de conserver l’Empire dans une maison puissante et riche, telle que la sienne, et sur la sagesse dont Dieu avait doué de jeunes princes de l’âge de son fils, par exemple, Salomon, Joas, et plus récemment Othon III et Henri IV. Toutes ces raisons, appuyées de la promesse formelle de cent mille florins à chacun des électeurs, déterminèrent ceux-ci à faire le choix désiré par le souverain ; et Venceslas fut proclamé dans une diète tenue d’abord à Rentz et ensuite transportée à Francfort, roi des Romains, ce qui était synonyme d’héritier présomptif de l’Empire. Mais comme quelques difficultés pouvaient encore survenir, du moins de la part du saint-siège, le jeune monarque, par ordre de son père, fit hommage de sa couronne au souverain pontife, et lui envoya des ambassadeurs chargés de pleins pouvoirs pour offrir, discuter, promettre et faire tout ce qui serait nécessaire pour sa promotion à l’Empire. Cette conduite indisposa violemment les grands, généralement ennemis de la cour de Rome. D’autre part, le pape se presse peu de se concerter avec l’ambassade du jeune roi. Rien ne s’opposa cependant à l’accomplissement de ses vues ; et quelque temps après (1378), Charles IV étant mort au retour d’un voyage en Brabant et en France, voyage dans lequel son fils l’avait suivi, celui-ci hérita non-seulement du diadème légalement héréditaire de Bohème, mais encore du trône électif de l’Empire. Conformément aux dernières intentions de son père, il donna aussitôt le marquisat de Brandebourg à Sigismond, son frère puîné ; et au cadet Jean la Lusace, avec les duchés de Swicnitz et de Gorlitz. Le nouvel Empereur apporta d’abord aux affaires publiques beaucoup d’attention et manifesta les desseins et les vues les plus sages. Il diminua les impôts, défendit d’en ajouter de nouveaux sans le consentement des États, promit d’obéir aux constitutions de l’Empire, ôta au commerce une partie de ses entraves, et convoqua à Nuremberg une diète, qu’en suite il transféra à Francfort. On espéra un instant voir renaître les beaux jours de Henri VII. Mais bientôt l’illusion s’évanouit à l’aspect de mille actes de faiblesse, de versatilité, d’avarice, de barbarie et de débauche. Il avait créé vicaire du royaume d’Italie Josse, marquis de Moravie, avec injonction formelle d’examiner l’élection des deux papes qui, nommés en même temps, se disputaient le siège de St-Pierre. Bertrand de Théflis, qui fit cet examen à la place de Josse, n’osa décider, et les renseignements qu’il avait recueillis furent soumis à la diète. Là, une grande contestation s’éleva ; et tel fut le peu de force et d’ascendant de Venceslas, que la question, de plus en plus indécise, ne fut pas même tranchée par son jugement, et que, tandis qu’il embrassait l’obédience d’Urbain VI, les évêques de Bavière, d’Autriche et de Lorraine se rangèrent du côté de Clément VII. Bien plus, les deux papes soutinrent leur querelle par la voie des armes ; et Clément, repoussé, alla siéger dans Avignon, tandis que son rival régnait en Italie. Ainsi commença le schisme d’Occident, qui dura quarante ans, et qui ne fut terminé que par l’autorité du concile de Constance. Peu après, Venceslas donna une autre preuve d’impéritie et de légèreté en confirmant une des extorsions les plus condamnables des grands feudataires sur l’Empire. Charles IV, son père, après avoir acheté la voix des électeurs pour le faire élire roi des Romains, s’était trouvé hors d’état de payer les cent mille florins promis à chacun d’eux ; et pour se soustraire à leurs importunités, il leur avait cédé plusieurs des revenus de l’Empire, tels que des droits sur divers objets, des forts, des villes, des châteaux, etc., ce qui, du vivant même de l’Empereur, avait fait dire qu’il arrachait bien des plumes à l’aigle germanique. Venceslas, par lettres confirmatives de 1379, consentit à ce que désormais ces domaines, ces droits et ces revenus ne pussent être revendiqués par l’Empire, et sanctionna à perpétuité des usurpations scanda-