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s’accrédita dans le cours du 16e siècle : on en retrouve de fortes traces dans les écrits de Wier, de Brower, de Possevin, de Bodin même. Des lecteurs plus attentifs jugèrent que l’auteur n’avait emprunté des magiciens que leur langage : il eut pour apologistes et pour interprètes d’abord un abbé du monastère de Seon, en Bavière (Sígismundi abbatis, etc., Tríthemius sui ipsius vindex, Ingolstadt, 1616, in-4°) ; puis un duc de Brunswick-Lunebourg (voy. Brunswick-Lunebourg) ; ensuite Caramuel, Gasp. Schott, Naudé (voy. ces noms), Wolfg. Em. Heidel, Morhoff, Rich. Simon, etc. Il avait au surplus déclaré lui-même avec une extrême ingénuité qu’il n’aspirait ni à pénétrer des mystères, ni à opérer des prodiges ; qu’il ne se mêlait aucunement de sorcellerie ; que s’il avait lu néanmoins des livres qui enseignaient cet art des démons, c’était pour en concevoir plus d’horreur et pour se mettre plus en état de les réfuter. Aussi ne comprendrons nous pas au nombre de ses productions un volume in-8°, publié en 1612, comme tiré de ses manuscrits : Veterum sophorum sígilla et imagines magicæ, etc. : ce livre avait été imprimé dès 1502, comme l’une des parties du Speculum lapidum de Camille Leonardi, à Pesaro, in-4° — Nous n’avons pas non plus tenu compte de quelques opuscules dont Panzer cite des éditions et transcrit les titres, et que les autres bibliographes ont omis, soit qu’ils n’en eussent pas connaissance, soit qu’ils les aient réputés pour nuls : Tractatus dívísus in sex capítula de causis guerrarum, etc. : De vera conversione mentis ad Deum ; Oratio de duodecim excidiis observantiæ regularis : ce sont trois in-4°, sans date ; Collatio de républica Ecciesiæ et monachorum ordinis S. Benedicti, 1493, in-4° ; De Immaculata Conceptíone Mariæ epistola, Strasbourg, 1496 et 1506, in-4° ; Oratio de cura pastorali, Mayence , 1496, in-4° ; Oratio de opératione divini amoris, 1497, in-4°. Ces pièces ne sont en général que des extraits de quelques-uns des ouvrages ascétiques, mystiques, historiques, ci-dessus indiqués. Mais quelque longue qu’ait été la liste que nous venons d’offrir, il est indispensable d’y ajouter comme 43° et dernier article, le livre intitulé Nepiachus, dans lequel Trithème fait l’histoire de son enfance, de ses études, de ses travaux, et que J.-G. Eccard a inséré dans le tome second de sa collection d’écrivains du moyen âge. — À tant de livres de Trithème, on aurait à joindre une trentaine de compositions inédites, si l’on s’en rapportait au catalogue qui en a été dressé et qui se lit dans la bibliothèque latine med. et inf. ætatis de Fabricius ; mais outre les articles purement imaginaires, il y en a plusieurs qui se confondent avec ceux qui ont été imprimés ; ils n’en diffèrent que par les titres : quelques-uns même avaient été, à l’insu de Fabricius, publiés sous les propres titres qu’il leur donne. Il ne resterait guère à distinguer dans cette liste qu’une vie de Ste-Irmine, fille du roi Dagobert ; des questions sur le Psautier et sur l’Évangile de St-Jean ; 20 livres, ou plutôt, comme Mansi l’observe, 14 livres de questions naturelles, et un supplément à la stéganographie. Ces livres, aujourd’hui perdus ou inconnus, avaient été réellement composés par Trithème : il nous l’apprend dans ceux qui subsistent. À vrai dire, entre tous ses ouvrages, on n’en compterait pas plus de six qui aient conservé quelque intérêt : ce sont, avant tout, ses annales d’Hirsauge, puis ses notices sur les auteurs ecclésiastiques, ensuite ses lettres, et si l’on veut ses sermons ; enfin et seulement comme livres curieux, sa polygraphe et sa stéganographie. Quand Wharton prononce que peu d’écrivains l’ont égalé, et qu’aucun ne l'a surpassé, l’exagération de cet éloge est sensible. D’Artigny se contente de le placer au rang des historiens estimés ; et quoique ce jugement soit plus raisonnable, il y aurait encore lieu de le modifier ; car la chronologie de l’abbé de Spanheim est souvent fautive, et le cardinal Bona trouvait des inexactitudes dans ses récits : Bayle en a relevé une qui concerne Platina, dont Trithème prolonge mal à propos la détention jusqu’à la mort du pape Paul II. Possevin lui reproche de n’avoir point assez de respect pour la cour de Rome, tandis que Scioppius, au contraire, loue sa piété, sa véracité, sa candeur, et lui souhaiterait seulement une critique plus judicieuse. Trithème, en effet, partage la crédulité, les préjugés, le mauvais goût des auteurs allemands de son siècle : il raconte les apparitions et les métamorphoses d’un esprit follet nommé Hudekin ; il tient pour réels les enchantements de Faust, et il est le premier qui ait parlé un peu au long de ce prétendu magicien ; il est enfin persuadé qu’on peut à force de science et de vertu transporter les corps à de longues distances. En littérature, son goût est si peu éclairé, qu’il est presque tenté de préférer le Mantouan (Spagnuoli) à Virgile. Il était lui-même peu habile sans l’art d’écrire, malgré tout ce qu’il avait d’instruction, d’imagination et de facilité. Comme théologien, il a été loué parRichard Simon, pour avoir bien avant les protestants recommandé l’étude immédiate de la Bible, et pour s’être plaint des professeurs et orateurs qui citaient les philosophes plus que les apôtres, qui prêchaient Aristote plus que Jésus-Christ. On a conservé le portrait de Trithème ; et l’on puise dans ses propres ouvrages, particulièrement dans son Nepiachus, des renseignements sur sa vie plus sûrs que ceux qu’en donnent d’autres notices. On peut néanmoins consulter la lettre de Bovelles à Germain de Ganay, dans les Bovilli opuscula, Paris, 1610, in-fol. ; le Pinax mis par Duraclusius à la tète des éditions de la polygraphe, les préliminaires de l’édition donnée par J. Busée des Opera spiritualia, ceux de la Steganographia vindicata de W.-G. Heldel ; les articles Trithème, de la biblio-