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nous dit-il, des nonces et des orateurs, pour traiter d’affaires littéraires. Quoiqu’on rendît hommage à sa piété autant qu’à son savoir, à la pureté de ses doctrines théologiques autant qu’à la variété de ses connaissances ; quoiqu’il prescrivît sans cesse de puiser la science de la religion à ses véritables sources, c’est-à-dire dans les Livres saints plutôt que dans les écrits des philosophes et les controverses des docteurs scolastiques, il se vit pourtant soupçonné d’erreurs graves, accusé de nécromancie et de magie. La renommée avait fait de lui un sorcier qui évoquait les démons et les morts, qui prédisait l’avenir et usait d’enchantements pour sur*prendre les voleurs. On racontait, par exemple, que l’empereur Maximilien ne se consolant pas de la mort de sa première épouse. Marie de Bourgogne, Trithème, qui se trouvait à la cour de ce prince et qui prenait pitié de sa douleur, avait offert de lui faire apparaître la défunte ; qu’en effet Maximilien et un de ses courtisans s étant renfermés avec l’abbé dans une chambre écartée, Marie s’était montrée à leurs yeux parée de son éclat accoutumé ; que pour être plus sur que c’était bien elle-même, son auguste époux avait cherché et trouvé une verrue qu’il savait être située à la nuque de la princesse ; mais que, cédant bientôt à l’effroi mortel dont le frappait ce spectacle, il avait ordonné à Trithème de finir à l’instant un si terrible jeu, en lui défendant de jamais renouveler de pareilles expériences. Si ce conte avait besoin d’être réfuté, il le serait assez par sa date ; car Marie de Bourgogne est morte en 1482, époque où Trithème n’avait que vingt ans, et n’était encore ni abbé, ni connu dans le monde. En 1505, Philippe, comte palatin du Rhin, le pria de venir à Heidelberg, où il voulait conférer avec lui sur une affaire monastique. Trithème s’y rendit, y tomba malade et y reçut la nouvelle d’une révolte qui, en son absence, venait d’éclater contre lui dans son couvent de Spanheim. Pour être mieux informé des détails et des suites de cette révolution claustrale, il se retira d’abord à Cologne, puis à Spire ; mais il apprit que ses moines persévéraient à s’affranchir de son autorité, qu’ils ne voulaient plus d’un abbé qui prétendait les obliger à s’instruire et à se comporter raisonnablement. De son côté, il résolut de ne jamais retourner auprès d’eux, quoiqu’il se sentît rappelé dans leur monastère par la bibliothèque qu’il y laissait et ar le souvenir de tout le bien qu’il y avait fait durant vingt-deux années. On lui conféra l’abbaye de St-Jacques à Wurtzbourg ; il en prit possession le 15 octobre 1506, y passa les dix dernières années de sa vie, n’acceptant aucune des places plus éminentes qu’on s’empressait de lui offrir ailleurs, et y mourut le 27 décembre 1516 : nous écartons la date 1519 que donne G.-J. Vossius, trompé par Bellarmin. L’abbé Trithème fut enterré dans ce couvent de St-Jacques, où il avait paisiblement poursuivi le cours de ses travaux littéraires. Neuf de ses ouvrages ont été réunis sous le titre d’Opera historica, par Marquard Freher (voy. ce nom), Francfort,1681, in-folio. 1° Chronologia mystica de septem secundeis sive inlelligentiis orbes post Deum moventibus. Une ancienne doctrine platonique ou cabalistique, renouvelée et modifiée au 16e siècle, plaçait dans chaque sphère céleste une intelligence chargée de la gouverner. Le livre où Trithème veut rattacher des notions historiques à ce système a paru en allemand, à Nuremberg, en 1522, in-4°. Dans les éditions d’Augsbourg, 1545, in-8° ; de Cologne, 1567, in-8° ; de Strasbourg, 1600, in-4°, il est en langue latine, ainsi que tous les articles qui vont suivre. 2° Chronique (fabuleuse) des Francs, depuis Marcomir jusqu’à Pépin, mise au jour à Mayence, en 1515, et à Paris, en 1539, in-fol. ; insérée, en 1574, au tome 3 de la collection des historiens d’Allemagne de Schardius. 3° Origine de la nation des Francs, d’après Hunebauld ; autre tissu de fables, selon les critiques modernes, publié, avec le précédent, à Mayence, à Paris, et dans le Recueil de Schardius, et reproduit par Ludewig (Script. herbipol., Franclšort 1713). Ce roman remonte à l’an 140 avant J.-C. et descend jusqu’au milieu du 8e siècle de notre ère. 4° Chronique des ducs de Bavière et des comtes palatins, jusqu’en 1473, imprimée à Francfort in-4°, en 1544 et 1549, et traduite en allemand par Phil.-Ern. Voegelin, Francfort, 1616, in-4° ; 5° De luminaribus Germaniæ : il en a paru des éditions in-4° à Utrecht, en 1493 ; in Mayence, en 1497. Parmi les Allemands déclarés illustres dans ce catalogue, il en est dont aucun autre livre ne fait mention. Les notices jointes in tous ces noms sont fort succinctes, mais quelquefois remarquables par leur singularité. 6° De scriptoribus ecclesiasticis, série chronologique de 963 articles sur un égal nombre de Pères de l’Église et de théologiens, depuis le pape Clément Ier jusqu’à l’auteur lui-même, qui achevait ce travail en 1494 et le dédiait à l’évêque de Worms, Jean de Dalberg. Le nom de chaque personnage amène un exposé sommaire des principaux traits de sa vie, et l’indication de ses ouvrages. Malgré beaucoup d’omissions et d’erreurs, ce livre a été fort utile à ceux qui ont depuis mieux traité la même matière : on le consulte encore aujourd’hui. Les premières éditions sont de Bâle, 1494, in-fol. ; de Mayence, en la même année, in-4° ; de Paris, in-4°, en 1497 : les suivantes contiennent des additions et des appendices ; elles ont été publiées in-4°, à Paris, en 1512 ; à Cologne, 1631 et 1546 ; à Bâle, 1594, et, la dernière et la meilleure est celle qui fait partie de la bibliothèque ecclésiastique de J.-Alb. gabricius, Hambourg, 1718, ln-fol. (voy. Fabricius). Aubert le Mire (voy. ce nom) a fait des supplé-