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de hors la loi. Mais on sait comment il rentra bientôt précédé de Murat et de ses grenadiers. Bigonnet, comme ses collègues, se sauva par les jardins ; et la république cessa d’exister… On pense bien qu’après un pareil éclat, il ne fut compris dans aucune fonction du nouveau gouvernement. Cependant il ne figura pas sur les listes de proscription qui accompagnèrent ce triomphe de Bonaparte, mais qui ne furent au reste que comminatoires. Il se retira sans bruit dans son département, et il y vécut sans essuyer la moindre persécution, jusqu’au mois de mars 1815, époque à laquelle il dut à celui qui l’avait fait rentrer dans l’obscurité l’avantage d’en sortir momentanément. Ce fut à son retour de l’île d’Elbe que Napoléon, cédant aux vœux de la populace de Mâcon, destitua M. de Bonne, maire de cette ville, pour mettre à sa place son ancien adversaire du 18 brumaire, resté invariablement attaché au parti républicain, que Napoléon se croyait alors obligé de ménager. Nommé deux mois après député à la chambre des représentants par l’arrondissement de Mâcon, Bigonnet y vota encore avec le parti le plus exagéré. Cependant il ne s’y lit guère remarquer, si ce n’est dans la séance du 25 juin, où il s’opposa à la proposition de Defermont et de Boulay de la Meurthe, qui voulaient faire reconnaître Napoléon II aussitôt après l’abdication de son père. Retourné dans sa patrie après la dissolution des chambres, Bigonnet rentra dans l’obscurité, et il mourut dans le mois de mai 1852, d’une attaque du choléra. On a de lui deux écrits qui jettent un nouveau jour sur les projets de Bonaparte : 1° Coup d’État du 18 brumaire, Paris, 1819, in-8o ; 2° Napoléon Bonaparte cosidéré sous le rapport de son influence sur la révolution, ibid., 1821, in-8o. M—D j.

BIGOT (GUILLAUME), né en 1502, à Laval, dans la province du Maine, poète français et latin, et l’un des plus savants hommes de son siècle. Sa vie ne fut qu’une suite d’événements malheureux ; il faillit mourir de la peste étant encore au berceau. Sa première éducation avait été entièrement négligée. Une querelle qu’il eut pendant qu’il faisait à Angers son cours de philosophie l’obligea de se sauver pour éviter les poursuites qu’on dirigeait contre lui. Il se retira à la campagne, où il se livra a l’étude avec plus d’application qu’il ne l’avait encore fait. Il apprit, sans le secours d’aucun maître, la langue grecque, et fit des progrès rapides dans la philosophie, l’astronomie, l’astrologie et la médecine. Il suivit en Allemagne du Bellay de Langey, qui était chargé d’une mission secrète. En 1555, il professait la philosophie à l’université de Tubingen ; mais les devoirs de cette place ne l'occupaient pas tellement qu’il ne trouvât encore le loisir de suivre les leçons d’Antoine Curéus et de Guillaume Casterot, fameux médecins ; il se perfectionnait en même temps dans la langue grecque, et il étudiait les mathématiques sous le célèbre Fossanus. Ce fut dans la même ville qu’il composa son poème latin, intitulé Catoptron, ou le Miroir. Il le fit imprimer avec quelques autres pièces, à Bâle, en 1556, in-4o. Il s’était réfugié à Bale pour se soustraire aux persécutions des disciples nombreux de Mélanchthon, dont il avait combattu le système. De là, il revint en France, où on lui avait promis une chaire de professeur, qu’il n’obtint pas. On lui offrit une place à l’université de Padoue ; mais il la refusa pour en accepter une à l’université de Nîmes. Il ne l’occupa pas tranquillement ; il fut même obligé de faire plusieurs fois le voyage de Paris, pour obtenir des arrêts qui le maintinrent dans ses privilèges. Sa femme, qu’il avait laissée à Toulouse, se conduisit mal, et le complice de ses débauches ayant été mutilé, on accusa Bigot d’être · le premier auteur de ce crime, exécuté par un de ses anciens domestiques. Il fut mis en prison, où il resta longtemps. Cette malheureuse affaire n’était pas encore terminée en 1519. Il publia, cette même année, un poème latin, dans lequel il se plaint amèrement de son sort. Il est probable que le chagrin abrégea sa vie. On ignore l’époque de sa mort. On trouvera un bon article concernant Guillaume Bigot dans le Dictionnaire de Bayle, et un autre, dans la Bibliothèque franç. de Goujet, t. 15, p. 65. Suivant la Monnoie, il n’a publié qu’un seul poème français, imprimé avec les poésies de Ste-Marthe, à qui il est adressé, Lyon, 1510, in-8o. Bigot engage Charles de Ste-Marthe à renoncer à la poésie, et c’est en vers qu’il lui donne ce conseil ; il aurait pu être plus conséquent. Outre son Catoptron dont nous avons déjà parlé, il est encore auteur d’un poème latin, intitulé : Somnium in quo imperat. Caroli describitur ab regno Gallia expulsio ; explanatrix Somnii Epistola, Paris, 1557, in-8o. Cet ouvrage, inspiré par des sentiments tout français, est dédié à Guillaume du Bellay, que l’auteur nomme son Mécène. Il a fait imprimer à la suite son Catoptron, corrigé : Christianæ philosophiæ Prœludium ; ejusd. ad Jesum Christum carmen supplex, Toulouse, 1519, in-1°. On avait avancé que c’était à Guillaume Bigot que Calvin reprochait, dans une lettre, de n’avoir pas abjuré, pour le protestantisme, la religion romaine. Bayle a relevé cette erreur en observant que le Bigot auquel Calvin écrivait portait le prénom de Pierre, et non celui de Guillaume. W——s.

BIGOT (ÉMERY), né à Rouen, en 1626, d’une famille ancienne et illustre dans la magistrature, ne voulut entrer ni dans la robe ni dans l’état ecclésiastique, afin de pouvoir se livrer entièrement à l’étude des belles-lettres. Son père (1), doyen de la cour des aides de Normandie, lui laissa une bibliothèque de 6.000 volumes parmi lesquels il y avait plus de cinq cents manuscrits. Ce riche dépôt s’accrut considérablement dans ses mains ; il était estimé à sa mort 40.000 fr., et, afin qu’il ne fût ni partagé, ni dissipé, il le substitua dans sa famille, et légua un fonds considérable pour l’augmenter chaque année. Cependant elle fut vendue en juillet 1706. Le catalogue en est imprimé et recherché. C’était dans cette bibliothèque que se tenaient toutes les semaines des

(1) Jean Bigot, sieur de Sommenil. Il recueillit surtout dans sa bibliothèque des manuscrits originaux sur l'histoire de la province de Normandie D—R—D