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hanséatiques. Ces fonctions rigoureuses, qu’il exerça jusqu’en 1814, il s’appliqua à les adoucir autant qu’il dépendait de lui ; cependant il en fut en quelque sorte puni par l’oubli où on le laissa depuis cette époque. Pour se consoler de la perte de ses emplois, il se livra avec une ardeur infatigable aux études les plus diverses et les plus abstraites. La révolution de 1850 trouva en lui un partisan chaleureux, et satisfit des ressentiments personnels que l’homme le moins passionné ne sait pas toujours étouffer. Appelé au congrès, il vota l’exclusion des Nassau, et fit ensuite partie du sénat, où son talent parut l’avoir abandonné. Des idées confuses, une jovialité déplacée, de l’érudition de collège, voilà ce qu’on gémit de trouver dans la plupart de ses discours. Mais l’âge avait affaibli sa tête, et, par une longue inaction, il était devenu presque étranger aux affaires publiques. Il mourut au commencement de l’année 1852. Ses manuscrits, achetés pour la bibliothèque de Bourgogne, sont des recueils de notes et de dissertations sur l’astronomie, la physique et le système planétaire. Parmi ses essais, qui occupent les numéros 1286-1292 du catalogue de sa bibliothèque, il en est un intitulé Manethon restitué, et un autre, Histoire ancienne et critique de l’ouvrage (de M. de Grave) qui a pour titre : la République des Champs-Élysées. Il avait conçu, en 1815, et fait exécuter à Paris, en 1825, un globe céleste destiné à vérifier les dates et à constater ou a combattre la haute antiquité des monuments sur lesquels l’histoire écrite des nations manque de renseignements suffisants. Le premier supplément à la Galerie des contemporains, Bruxelles, 1829, t. 9, p. 65, en offre une description fournie par l’inventeur lui-même. Il avait été inspecteur général des écoles de droit, spécialement chargé de celles de Bruxelles, de Strasbourg et de Coblentz, et chancelier de la troisième cohorte de la Légion d’honneur. Nous ne connaissons rien d’imprimé de sa façon, excepté un discours français, prononcé le 25 mars 1806, lors de l’installation de l’école spéciale de droit à Bruxelles, et inséré dans le procès-verbal de cette cérémonie, Bruxelles, 1806, in-4o ; plus deux discours latins, prononcés en 1810 et en 1815, Bruxelles, 1815, 10 et 11 p. in-4o. Ils se terminent également par le cri officiel de Vive l’empereur ! et sont surtout destinés à protester de l’admiration et du dévouement de l’orateur pour la personne sacrée du héros du 19e siècle.

— Pierre Beyts, frère du précédent, fut professeur de chimie et de physique expérimentale à l’école centrale du département de l’Escaut. On a de lui : Discours inaugural sur les progrès récemment faits dans les sciences physiques et chimiques, sur les avantages de la nouvelle méthode d’enseigner ces sciences, etc. Bruxelles, an 10 (1802), 57 p. in-12. Voy. le Magasin encyclopédique, 8e année, t. 5, p. 156-140.

R—g.


BEZBORODKO. Voyez Besborodko.


BÈZE (Thédore de), naquit à Vézelay, petite ville de la Bourgogne, le 24 juin 1519, et passa à Paris les premières années de sa vie, chez son oncle, Nicolas de Bèze, conseiller au parlement, qui l’envoya à Orléans, avant l’âge de dix ans, pour faire ses études[1]. Il eut pour maître Melchior Volmar, homme très-savant, surtout dans les lettres grecques, et l’un des premiers par qui les idées de la réforme furent apportées en France. Volmar ayant quitté Orléans pour aller remplir à Bourges une chaire de professeur, Théodore de Bèze l’y suivit et y demeura avec lui jusqu’en 1555. Il n’avait alors que seize ans et avait déjà fait de grands progrès dans les lettres et dans les langues anciennes. Il retourna à Orléans pour étudier en droit, et y reçut des grades en 1559. Il employa ces quatre années bien moins à des études sérieuses qu’à la culture des lettres, et surtout de la poésie latine. Ce fut dans cet intervalle qu’il composa la plupart des pièces dont il forma quelques armées après un recueil, sous le titre de Poemata juvenilia. De retour à Paris, il fut pourvu du prieuré de Lonjumeau et d’un autre bénéfice. Un de ses oncles, qui possédait une riche abbaye, était aussi dans l’intention de la lui résigner. Bèze jouissant ainsi d’un revenu considérable, qui devait encore s’accroître, joignait aux agréments de la jeunesse et de la figure, la réputation de bel esprit : il ne profita de ses avantages que pour se livrer mieux à toutes les dissipations. Il raconte lui-même comment ses amis et ses parents le pressaient de choisir un autre genre de vie, et de prendre un état qui aurait pu le conduire à des emplois considérables ; mais il était retenu par la force des habitudes et par l’attrait des voluptés. Quoiqu’il possédât des bénéfices, il ne s’était point engagé dans les ordres. Il passa ainsi neuf ans, professant une grande liberté dans ses mœurs, bien plus que dans ses opinions ; et sans aucune relation avec les hommes qui, déjà en très-grand nombre, avaient embrassé la réforme. Attaché depuis longtemps à une femme d’une naissance très-inférieure, mais à qui il avait promis secrètement de l’épouser, il était arrêté par les inconvénients d’une alliance peu honorable, et surtout par la crainte de perdre le revenu de ses bénéfices. Enfin, en 1548, à la suite d’une maladie grave, il sortit de cet état d’irrésolution, et abandonna ses bénéfices, ses espérances et sa famille, pour se rendre à Genève, où il épousa cette femme, aux instances de laquelle il résistait depuis quatre ans. Il embrassa en même temps la religion réformée, et « abjura, comme il le dit, la et papauté, ainsi qu’il l’avait voué à Dieu, depuis a l’âge de seize ans. » On a vu quelles circonstances


  1. Le vrai nom de sa famille était Besse et non pas Besje, ainsi que le dit Ménage dans l’Anti-Baillet. La preuve s’en tire de la dédicace de l’Historiæ universalis Epitome, offerte en 1521 par J. Lazjard à Nicolas de Besse, oncle de Théodore, et des épitaphes que celui-ci avait faites lui-même pour ce personnage, et qu’on voyait à l’église St-Come à Paris. L’épitaphe française, rapportée avec la grecque, par la Monnoie, dans le Menagiana, contient ces vers :

    De Beze eut nom, nom d’antique maison,
    Qui, nonobstant mainte forte saison,
    Et la fureur de guerre continue,
    En son honneur s’est toujours maintenue,
    Et qu’ainsi soit, Bourgogne te dira
    Tout le surplus que ma plume taira.