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dits considérables qu’elle était obligée d’accorder
aux femmes des grands seigneurs, qui la payaient
fort mal et t’ort-tard, et les dépenses qu’elle faisait
pour soutenir l’espèce de rang qu’elle tenait à la
cour, dérangèrent sa fortune peu d’années avant la
révolution, et cet événement fâcheux, qui l’exposa
aux inconvenantes railleries de ses illustres débitrices,
aurait suffi pour la discréditer totalement, si
la reine n’eût pas continué à lui faire le même ac- p
cueil et contribué peut-être à rétablir ses affaires. j
Mademoiselle Bertin se montra digne de ces bienfaits.
Il paraîtrait, d’après les Mémoires publiés sous
son nom, qu’à la fin de 1791 ou au commencement
de 1792 elle fut chargée par son auguste protectrice
d’une mission secrète pour l’Angleterre ; que, s’étant
rendue ensuite à Vienne, elle y eut un entretien
avec l’empereur François II, qu’elle fit revenir
de ses préventions contre sa tante Marie-Antoinette.
Elle était de retour en France lors de la détention
de cette princesse, et lui fut fidèle dans le malheur.
En 1795, des agents du gouvernement révolutionnaire
se présentèrent chez elle, et lui demandèrent
l’état des fournitures qui lui étaient dues par Marie-Antoinette.
lnformée d’avance de cette demande,
et prévoyant les suites funestes qu’elle pouvait entraîner,
mademoiselle Bertin avait brûlé ses registres
de commerce où figuraient le nom et les dettes
de —son infortunée bienfaitrice. Elle répondit avec
assurance que la reine ne lui devait rien, oubliant
ainsi ses propres intérêts pour ne se souvenir que de
sa reconnaissance. Mademoiselle Bertin est morte à
Paris, le 22 septembre 1815, à l’âge de 69 ans. Les
Mémoires publiés sous son nom, tant à Paris qu’à
Leipsick, 1824-, in-8°, sont regardes comme apocryphes,
et sa famille a réclamé contre leur authenticité.
Cependant le style de ces Mémoires porte assez
bien le cachet d’une femme qui, peu versée dans la
connaissance de la langue et de la littérature, écrit
comme elle parle. Ils n’offrent d’ailleurs rien de
neuf ni de piquant, et ne contiennent aucun fait postérieur
à l’année 1791, quoiqu’ils paraissent avoir
été écrits en 1795. L’auteur, quel qu’il soit, a cu
pour but de disculper Marie-Antoinette des torts
que lui ont imputés de perfides courtisans, surtout
dans la fameuse affaire du collier. Les notes sont,
au reste, plus curieuses que le texte. A—·r.
BERTIN (TmEononr :—Pu·: mu·:), littérateur, était né, vers 1760, dans la Brie ; il avait une sœur mariée à Provins, et l’on a quelque raison de conjceturer qu’il était lui-même originaire de cette ville. N’ayant reçu de ses parents aucune fortune, la connaissance qu’il acquit de l’anglais devint sa principale ressource. Il en donna des leçons à Paris, et jeune encore il publia les traductions des satires d’Young, en prose, de la Vie de Bacon par David Mallet, et de quelques ouvrages politiques de Guill. Paley (voy. ce nom), entre autres de ses Réjlexiom sur le jury. En simplifiant le système de et plaidoiries où les avocats s’égayèrent sur le compte de ces demoiselles. L’arrêt devait intervenir le 12 décembre ; mais la reine assonplt l’affaire. Iv !
BER 161 } sténographie inventé par Jean Taylor, et en l’adaptant à la langue française, il contribua beaucoup à répandre cette utile invention ; et des 1790, il employa lui-même ce procédé pour recueillir les discours prononcés à la tribune législative, qu’il transmettait ensuite aux journaux. Il fut compris, en 1795, dans le nombre des gens de lettres auxquels la convention accorda des secours, et il reçut 1,500 francs. À cette époque il avait un magasin de librairie et faisait aussi le commerce des médailles. Le 27 septembre 1799, il obtint un brevet d’invention pour une lampe docimastique. Cette lampe, qui ne différait de celles qu’on avait employées jusqu’alors que par une modification dans Pajustage de l’éolipile, n’eut aucun succès (1). Il prit un second brevet, le 12 juin 1811, pour l’application à la reliure des livres d’un cartonnage recouvert d’un vernis (2). Aidé de M. Froehot, préfet de la Seine, qui s’intéressait ai lui, il établit un vaste atelier de reliure dans l’ancien bâtiment du Châtelet, qui a été démoli ; mais, toujours malheureux dans ses entreprises, il fut bientôt obligé de l’abandonner. En 1811, il salua le retour des Bourbons, et, comme tant d’autres, crut devoir attaquer le pouvoir qui venait d’être renversé (5) ; mais son zèle sans doute ne reçut pas la récompense qu’il attendait, puisque, arrivé à l’âge où le repos devient nécessaire, il fut forcé de continuer le métier ingrat et pénible de traducteur. Cet écrivain laborieux et digne d’un · 1 meilleur sort mourut à Paris, en janvier 1819, âgé > d’environ 60 ans. On lui a reproché la négligence de son style, en général diffus et incorrect ; mais, obligé par sa position de faire vite, il ne lui était. guère possible de faire mieux ; et il faut lui savoir 1 gré d’avoir, dans ses traductions comme dans ses écrits, toujours respecte les mœurs et la religion. ; La liste que M. Quérard a donnée dans la France. littéraire des traductions et des opuscules de Bertin ; 1 ne s’élève pas ai moins de cinquante, formant plus 1 de cent volumes. Nous nous bornerons à citer les · principaux : 1° Système universel et complet de ste’- · 1 no graphie, adapté à la langue française, d’après 1 s Taylor, Paris, 1792, in-8° ; et avec des améliorations, 1 l ibid., 1791, 1796, 1804, in-8°. C’est de tous les ouvrages de Bertin le seul qui paraisse destiné à lui, survivre. 2° Histoire des principaux lazarets de l’Europe, traduit de l’anglais de J. Howard. ( Voy. ce nom.) Cette traduction, dont on trouve des exemplaires séparément, fait partie du Recueil de mémoires sur les établissements d’humanité, traduit de l’anglais et de l’allemand, publié par ordre du ministre de l’intérieur, Paris, 1799-1804, 15 vol. in-8°.’( Voy. Ann. Duoussivor.) 50 L’Eté du Nord (Northern Summer), trad. de John Carr, ibid, 1808, 2 vol. in-8°.4° Les Misères de la vie humaine, trad. de l’anglais de James Beresford, sur la huitième
(1) Cette lampe est décrite dans le Recueil des brevets, t. 2 E p. 51, et représentée sur la pl. 15.
(9) Voy. le Recueil des Brevets, t. 6. p. 215. Les livres étaient ainsi très-brillants, mais de peu de durée.
(3) Le Cri de l’indignation. ou l’Ami des Bourbons, Paris, 1811, in-8° de 48 p. 21