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avec le cardinal de la Valette, ravitailler plusieurs places d’Alsace et faire lever le siége de quelques autres. Il surprit la forteresse de Hohenbaar et attaqua si vivement Saverne qu’elle se rendit, le 18 juillet, presque sous les yeux de Gallas, qui campait à Drousenheim. Après ces opérations, qui achevaient la complète de l’Alsace, le duc et le cardinal voulaient passer le Rhin afin de rejeter Gallas en Souabe et de se joindre au landgrave à Hanau ; mais leur dessein fut traversé par les ordres du roi, qui les rappela pour défendre ses frontières menacées à la fois par les Impériaux, les Espagnols et le duc de Lorraine. Le duc et le cardinal rentrèrent donc en Lorraine. Aussitôt Gallas passa le Rhin à Brisach, alla se réunir aux Espagnols en Franche-Comté et marcha vers la Bourgogne. Trop faible pour l’arrêter, le prince de Condé demanda des renforts au duc et au cardinal, qui accoururent ensemble. Ils rencontrèrent l’ennemi près de Champlitte et le suivirent du côté de Dijon, pour couvrir cette ville et prendre conseil avec le prince de Condé. La position avantageuse de Gallas sur une montagne et ses forces supérieures empêchèrent le duc de risquer une bataille. Il aima mieux se retrancher en face des Impériaux. Ce moyen obligea Gallas de quitter son camp. Il se porta rapidement sur St-Jean de Losne. On connaît l’héroïque résistance des habitants. Secondés par la vigoureuse diversion de Bernard, qui avait pénétré les desseins de Gallas, et par le comte de Rantzau, qui avait introduit un renfort de 1,600 hommes dans la place, ils forcèrent les Impériaux d’abandonner le siège de cette petite ville. La faim, les maladies, les attaques continuelles du duc, du cardinal et de Rantzau, détruisirent la majeure partie des troupes de Gallas et le forcèrent de repasser le Rhin avec 10,000 hommes, reste de 30,000 qu’il avait en entrant en Bourgogne. Bernard vint ensuite s’emparer de plusieurs places de Franche-Comté et des Vosges, et prit ses quartiers d’hiver aux confins de la Franche-Comté. Le mauvais état de ces quartiers et le défaut de solde occasionnèrent de grands mécontentements parmi les troupes : elles se livrèrent à de tels excès, en pillant même sur le territoire français, qu’il en résulta une vive mésintelligence dont Bernard prévint les fâcheux effets en se rendant à Paris au mois de février 1617. Le roi lui promit une somme d’argent pour l’entretien de ses troupes, moyennant quoi le duc s’engagea à entrer le plus tôt possible en Franche-Comté, et de là à passer le Rhin conjointement avec un corps français auxiliaire, enfin à reporter en Allemagne le théâtre de la guerre. De retour à son armée, qui campait près de Langres, Bernard commença ses préparatifs et envahit, dans le mois de juin, la Franche-Comté, où il fut rejoint par le corps fronçais promis, aux ordres du maréchal de l’Hôpital. Après avoir battu Mercy, lieutenant

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du duc Charles de Lorraine, à Grai et à Gy, sur les bords de la Saône, il parcourut le pays en se rendant maître de toutes les places jusqu’à Montbéliard. Il établit de grands magasins de vivres dans cette ville, passa en Alsace et parut inopinément sur le Rhin à la fin de juillet. Ayant établi, pour s’opposer à la marche de Jean de Werth, qui amenait des secours au duc de Lorraine, un pont de bateaux près du petit village de Rhinau, il fit passer ses troupes dans le Brisgau, non toutefois sans avoir assuré la défense de son pont par de forts retranchements. Il fut vigoureusement attaqué par les généraux ennemis, Jean de Werth, Saselli et par le gouverneur de Brisach ; mais il sortit toujours victorieux de ces attaques et ne s’empara pas moins de plusieurs places du Brisgau. Ce fut alors que les ennemis employèrent toutes leurs forces pour l’empêcher de pénétrer dans la haute Allemagne. Pendant que ces forces augmentaient, celles du duc diminuaient chaque jour, par suite de combats continuels et de maladies, et par l’effet d’une épizootie qui réduisit à quelques cents chevaux sa belle cavalerie. Néanmoins il s’était tellement retranché sur les deux rives du Rhin, aux abords de son pont, qu’il eût été difficile de l’en déloger, si la négligence du duc de Longueville en Franche-Comté n’eût laissé au duc Charles de Lorraine toute liberté d’attaquer Bernard et de le placer entre deux feux. Ce dernier se hâta de prévenir ce dessein et de se porter, avec la plus grande partie de ses troupes, du côté de Strasbourg et de Renfeld ; mais, n’y trouvant pas de quoi vivre, il se retira dans l’évêché de Bâle et en Franche-Comté. Pendant son absence, les Impériaux s’emparèrent du pont de Rhinau, gardé peu soigneusement. À la fin de janvier 1635, et par un temps rigoureux, le duc leva son camp et parut à l’improviste sur les bords du Rhin, qu’il fit traverser, près de Bâle, à une partie de ses troupes sur quelques bateaux dont d s’était pourvu. Ayant surpris les villes frontières de Seckingen, Waldshut et Laufenbourg, il construisit un pont sur le fleuve pour faciliter la communication, et se mit en mesure d’attaquer Rhinfeld des deux côtés du Rhin. C’était alors une place de grande importance. L’ennemi ne supposant pas qu’il fût possible au duc de tenter une nouvelle campagne, et encore moins le passage du Rhin, resta tranquille dans ses quartiers, au duché de Wurtemberg. Il ne faisait aucune disposition lorsqu’il apprit les progrès de Bernard vers le haut Rhin, du côté de la Forêt-Noire. Il accourut en hâte pour délivrer Rhinfeld, et la rencontre eut lieu le 16 février. Aussitôt commença un engagement assez vif. Bernard se retira alors en bon ordre vers Laufenbourg. Trois jours après, il revint en force surprendre les Impériaux au lieu où il avait eu la première affaire. Ce fut là qu’il donna, le 3 mars, la fameuse bataille de Rhinfeld, dont il