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il abandonna le parti de Fox (lord Holland) pour se réunir à celui de Pitt (lord Chatam) (1), qu’il chercha vainement à réconcilier avec Newcastle. Après la retraite de Pitt, Sackville, à cette époque major général, fut proposé pour le département de la guerre ; mais le roi, qui ne l’aimait pas, s’y opposa formellement. Le mois suivant (juillet), le ministère offrit à Sackville de le mettre à la téte d’une expédition contre Rochefort ; mais le plan arrêté lui paraissant impraticable, il s’y refusa. L’expédition, confiée à sir John Mordaunt et à Conway, ayant totalement échoué, ces deux généraux furent traduits, en novembre 1757, devant une commission d’enquête composée du duc de Malborougb, de lord George Sackville et du général Waldegrave ; dans la décision qu’elle rendit, cette commission évita de se prononcer d’une manière positive. L’habileté que Sackville avait déployée dans la chambre des communes et ses liaisons avec Pitt lui assuraient un grand poids dans le gouvernement ; depuis la retraite de Conway, il se trouvait sans rival dans l’armée, où tout’ semblait lui promettre le premier rang. Choisi pour commander en second, sous le duc de Marlborough, une expédition dirigée contre les côtesde France, et en particulier contre St-Malo, il fit son devoir, mais n’obtint aucun succès. En 1758, Pitt lui ayant offert le commandement d’une nouvelle expédition contre

St-Cast, il refusa et, faisant allusion à celles qui avaient été entreprises précédemment et qui n’avaient pas réussi, il répondit « qu’il était las de « faire le métier de flibustier ». Ce fut afin d’éviter ce service qu’il insista pour aller en Allemagne, et qu’il parvint, malgré la volonté du roi, à yétre envoyé ; il y eut même le commandement en chef, sous le prince Ferdinand. Ces deux généraux aimaient peu à recevoir des ordres et même de légères observations ; aussi la mésintelligence la plus complète ne tarda pas à régner entre eux. Le dprince Ferdinand saisissait toutes les occasions e mortifier Sackville ; et celui-ci s’opposa, dans plusieurs circonstances, à l’exécution des mesures adoptées par le prince. Le 31 juillet 1759 se donna la bataille de Minden, où les Français, sous les ordres de Contades, furent battus par le prince Ferdinand : Sackville commandait la cava erie de l’aile droite, composée d’Anglais et de Hanovriens, divisée en deux lignes : les Anglais à l’extrémité de la droite s’étendant jusqu’au village d’Hartum, et la cavalerie hanovrienne formant la gauche. Il parait que Ferdinand donna deux fois l’ordre au général anglais de se porter’ en avant, et que celui-ci n’obéit pas, soit qu’il n’eùt pas compris l’ordre du prince, soit qu’il eût reçu à peu de distance l’un de l’autre des ordres contradictoires, soit enfin que, mécontent du silence que Ferdinand (I) Walpole attribue cette détection à lnjalousie de Sackville contre Conway, dont. Fox fêtait montré le partisan. G1 fl’¢¢ 10quel sa famille était sur le point de contracter une alliance. —

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avait gardé à son égard sur le plan de la bataille dont il prétendait que la communication aurait dû lui être faite, il eût formé le projet de diminuer la gloire du prince allemand ; soit enfin par lâcheté, ainsi que le prétend Walpole, qui parait au surplus très-mal disposé pour Sackville. Quoi qu’il en soit, après le gain de la bataille, comme il s’était mélé aux autres généraux réunis à la table de Ferdinand, ce prince dit à ceux qui l’entouraient, en parlant de Sackville : « Voilà cet homme aussi à son aise que « s’il avait fait des merveilles. » Ferdinand ne s’en tint pas là ; dans son ordre du jour qu’il publia le lendemain de sa victoire, il manifesta autement le regret de ce que le marquis de Granby n’eût pas commandé la veille la cavalerie de l’aile droite (1), pour rendre la journée plus brillante encore et plus décisive. Cette accusation indirecte, quoique fort claire, et d’autres mortifications que Sackville eut à essuyer le déterminèrent à demander son retour en Angleterre, ce qui lui fut accordé. Mais une multitude de pamphlets attaquèrent sa réputation et l’accusèrent positivement d’insubordination et de lâcheté. A peine arrivé à Londres, il écrivit à lord Holderness pour demander de se justifier devant une cour martiale ; mais ce ministre lit une réponse évasive, en lui disant que les officiers nécessaires étaient emplošés au dehors. Lord Ligonier, commandant en c ef, et lord Barrington, secrétaire de la guerre, s’expliquèrent plus clairement et lui mandèrent que s’il désirait une cour martiale il la trouverait en Allemagne. Ce dernier accompagna cette réponse d’un message pour informer Sackville que non-seulement le roi lui retirait le commandement de son régiment, mais qu’il lui ôtant son grade de général et le poste de lieutenant général de l’artillerie ; il lui demanda en même temps avec politesse s’il était satisfait de cette notification verbale, ou bien s’il désirait la recevoir fpar écrit. Lord Sackville ayant annoncé qu’il pré était le dernier mode : à Cela sera aisé, « rép iqua Barrington ; je connais un précédent, « celui de feu lord Cobham ; je vous enverrai la « même qui fut faite pour lui. » « Vous m’enverrez, j’espère, en même temps, la copie de « la réponse de lord Cobham, » dit Sackville en souriant (2). Cette conduite sévère de la cour étonna et fut diversement interprétée : on prétendit assez généralement qu’on avait agi ainsi afin de sauver Sackville, dont le père était extrêmement aimé du roi. Le généra anglais dpublia d’abord un mémoire pour prier la nation e suspendre son jugement jusqu’à ce qu’il eût été mis à portée de se justifier ; et il renouvela ses in(I) On a vu que Sackville la commandait. ¢2› Lord Cobham s’étant prononcé contre les opérations du ministère, en 1733, fut privé du commandement de son rîflment. Cette mesure fut vivement attaquée, quoique une anc, dans la chambre des communes, dont il était membre ; et il parait, qu’en recevant sa démission, il ilt une réponse extrêmement mordante, a laquelle Sackville faisait allusion.