Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 36.djvu/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
88 RIV

Grimm et ses amis (voy. la Correspond. de Galiani, édit. de Treuttel, t. 1, p. 159).

« Ce n’est point une mauvaise plaisanterie, dit-il, mais une réfutation complète, puisqu’en changeant les noms des choses, je laisse subsister tous les raisonnements de M. la Rivière ; et dans l’instant on en découvre tantôt l’ineptie, tantôt l’absurdité.  »

L’expéríence a démontré que, dans cette querelle sur le commerce des blés, l’abbé Galiani avait mieux vu que les économistes (voy. GAliani). 3° De l’instruction publique, ou Considérations morales et politiques sur la nécessité, la nature et la source de cette instruction, Paris 1775, in-8o. Ce sujet, si important, disent les rédacteurs du Journal des Savants, est développé en peu de mots, mais de la manière la plus intéressante (voy. février 1776, p. 124). 4° Lettre sur les économistes, sans date, in-12 (1787), in-8o. C’est une apologie de leurs principes : elle a été insérée dans le Dictionnaire d’économie politique de l’Encyclopédie méthodique, à l’article Economiste (t. 1, p. 186) ; 5° Essai sur les maximes et les lois fondamentales de la monarchie française, ou Canevas d’un code constitutionnel, pour servir de suite à l’ouvrage intitulé les Vœux d’un Français, 1789, in-8o de 56 pages.

W-s.


RIVIÈRE DE RIFFARDEAU (CHARLES-FRANÇOIS, duc DE) fut l’un des officiers de l’ancienne armée qui, dans le cours des dernières révolutions, montrèrent le plus de dévouement à la monarchie des Bourbons et en furent le mieux récompensés. Né en 1765 à la Ferté-sur-Cher, d’une ancienne et noble famille de la province du Berry[1], il reçut une éducation très-soignée, et voué dès l’enfance à la carrière des armes, il entra fort jeune comme sous-lieutenant dans les gardes françaises, où il commandait une compagnie en 1789, lorsque la révolution commença. Ses efforts, comme ceux de tous les autres officiers, furent vains pour maintenir dans l’ordre et la soumission cette troupe indisciplinée. Il ne la quitta néanmoins que lorsqu’elle fut dissoute, ou qu’elle reçut une autre organisation. Alors le marquis de Rivière se rendit à Turin, auprès du comte d’Artois, à qui il garda depuis cette époque la plus constante fidélité. Ce prince en ayant fait son aide de camp, il le suivit dans tous ses voyages en Allemagne, en Russie, en Angleterre et dans la malheureuse expédition de Quiberon. Au moment des plus terribles crises de la révolution, il pénétra secrètement, jusqu’à sept fois, dans l’intérieur de la France, sous divers déguisements, et porta à plusieurs reprises les ordres des princes frères de Louis XVI aux généraux Charette, Stofflet, Sapinaud, Cadoudal et Bour-

RIV

mont. Souvent même il combattit dans les corps d’armée que commandaient ces chefs royalistes. Arrété et conduit au château de Nantes, en 1795, il réussit à s’en échapper par sa présence d’esprit, et se rendit à Paris, où il avait une mission à remplir près des agents des princes, Lemaître et la Villeurnoy. Il retourna ensuite vers les côtes de l’océan, et rejoignit le comte d’Artois à l’île-Dieu. Ayant reçu de ce prince une nouvelle mission, il fit naufrage sur les plages inhospitalières de la Normandie. Vivement poursuivi, il fut près de tomber encore une fois dans les mains des républicains. Enfin il parvint de nouveau jusqu’à Charette, et réussit à lui porter les ordres de son roi. C’est alors que le frère de ce prince, qui avait été vivement alarmé des périls auxquels son aide de camp s’était exposé pour le servir, lui écrivit : « 

« Tu m’as fais une belle peur, cher Rivière ; grâce à Dieu et à ton couragen tu t’en es tiré, et j’en ai été bien heureux. J’ai annoncé le premier à tes amis que tu vivais. — Je t’embrasse. »

Après tant et de si terribles épreuves, le marquis de Rivière suivit son prince en Angleterre, puis en Écosse, où il vécut paisiblement pendant plusieurs années, jusqu’à ce que de nouveaux ordres du comte d’Artois vinssent le mêler à la malheureuse entreprise dans laquelle devaient périr si misérablement les Georges Cadoudal, les Pichegru et tant d’autres royalistes dévoués. Ce fut vers la fin de 1803 qu’ils s’embarquèrent sur la Tamise pour aborder aux côtes de Normandie et se rendre secrètement à Paris (voy. GEORGES). On sait comment ils tombèrent dans les pièges de la police, et comment ils furent successivement arrêtés dans le mois de mars 1804. Le marquis de Rivière le fut un des premiers, et il eut à subir toutes les douleurs d’une longue et rigoureuse détention, d’une cruelle procédure devant le tribunal criminel de Paris. Toujours franc et loyal, il ne dénia, en présence des juges, ni ses affections ni ses projets contre Bonaparte. Le président lui ayant fait représenter un portrait du comte d’Artois, trouvé sur lui au moment de son arrestation, il le baisa avec transport, et souhaita hautement à celui qui était alors le maître de la France des serviteurs aussi dévoués, aussi fidèles qu’il avait juré de l’être à cet excellent prince. Ce caractère chevaleresque sembla toucher les juges eux-mêmes ; cependant ils le condamnèrent à mort, ainsi que dix autres de ses coaccusés ; mais il obtint la commutation de cette peine par l’intervention de l’épouse de Bonaparte et de madame de Montesson, et non par celle de Murat, à qui plus tard on a voulu en faire honneur. Rivière fut envoyé d’abord au fort de Joux, et il resta quatre ans dans le cachot où avait péri Toussaint Louverture peu de mois auparavant. On lui permit ensuite d’habiter le département du Cher, où il resta sous la surveillance de la police jusqu’à la chute du trône impérial en 1814. À cette époque, Semouville, qui se trouvait dans ce pays comme com-

  1. Le père du duc de Rivière (Charles-François), comte de Corsac, avait fait, de la manière la plus honorable, les guerres d’Italie au commencement du 18e siècle, puis celles de Flandre et d’Allemagne sous le maréchal de Saxe et le duc de Richelieu. D’abord capitaine de cavalerie, il parvint successivement aux de colonel, de brigadier et de maréchal de camp. Il mourut en 1786.