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de reconnaître que l’orateur a traité son sujet avec toute l’éloquence qu’il comportait ; mais, par une de ces anomalies qui ne s’expliquent guère, il consacre quatorze pages de notes, à la suite de la notice sur l’abbé Roquette, non in faire connaître les passages les plus remarquables de l’oraison funèbre, mais à donner des extraits étendus des sermons de l’abbé de Boismont. Il y a d’autant moins de rectitude de jugement dans ce procédé que les sermons de l’abbé de Boismont sont généralement répandus et que l’oraison funèbre de Jacques II est rare et fort peu connue. 2° Procès-verbal de l’assemblée du clergé de France, tenue à Paris, l’an 1705 (avec Jacques-Antoine Phelypeaux), Paris, Muguet, 1706, in-fol. — Un autre Roquette, probablement aussi parent de l’évêque, mais à un degré très-éloigné, était ministre protestant à Toulouse et fut condamné, en 1761, à être pendu, pour s’être livré à des prédications publiques. Ce fut la dernière victime en France d’aussi déplorables persécutions.


RORARIO (Jérôme), littérateur, né en 1485 ii Pordenone, dans le Frioul, nous apprend lui-même qu’il eut pour maître François Amalthée (voy. ce nom), qui tenait une école de grammaire à Sacile, et qu’il alla depuis à Udine suivre les leçons de Marc-Antoine Cocceius Sabellicus[1]. Ayant eu le malheur de perdre son père, il resta sous la tutelle de son frère aîné, homme dur et violent, qui l’envoya faire son cours de droit à Padoue. Il avait quinze ans quand il se vit forcé de quitter la maison paternelle. Passionné pour les lettres, il n’éprouvait que du dégoût pour la jurisprudence. Cependant il ne tarda pas il se distinguer parmi les élèves de l’université. Comme il parle de ses enfants dans une épître au cardinal Madrucci[2], on doit en conclure qu’il avait été marié. Devenu veuf, il embrassa l’état ecclésiastique, et ses talents l’ayant bientôt fait connaître à la cour de Rome, il fut honoré de plusieurs fonctions importantes. Légat du pape Clément VII près de Ferdinand, roi de Hongrie, et ensuite de Paul III, en Pologne, il mérita la bienveillance de ces deux pontifes, qui le récompensèrent magnifiquement de ses services. En 1535, il accompagna le cardinal Clesi, qui se rendait à Naples pour complimenter l’empereur Charles-Quint. De retour à Rome, il y passa plusieurs années dans la société des savants et des plus illustres prélats, qui le comblèrent à l’envi de témoignages d’amitié. Cependant il se démit de ses emplois et revint habiter Pordenone, où il mourut en 1556. Apost. Zeno l’a cité parmi les savants qui dédaignaient de faire usage de la langue italienne (voy. les notes sur la Bibliot. de Fontanini, t. 1er, p. 35). Rorario n’est connu que par un opuscule intitulé Quod animalia bruta sæpe ratione utantur melius homine. Il y prouve, par un grand nombre d’exemples, que l’homme abuse presque constamment de sa raison, tandis que les brutes ne s’écartent jamais de la route que le Créateur leur a tracée. Boileau paraît avoir puisé dans cet ouvrage l’idée principale de la Satire de l’homme et quelques-uns des traits qu’il y a employés. L’opuscule de Rorario, qu’on doit regarder comme un badinage, a fourni l’occasion à Bayle de rassembler, dans l’article qu’il a consacré à notre auteur, les divers sentiments des écrivains anciens et modernes sur l’âme des bêtes, question qui partageait alors les philosophes et qui ne sera jamais complétement résolue (voy. le Dictionnaire de Bayle et les Remarques critiques de l’abbé Joly). La savant Gabriel Naudé, ayant rapporté d’Italie ce manuscrit de Rorario , le publia à Paris, 1668, in-8° ; il s’en fit une seconde édition, Amsterdam. 1656 et 1666, in-12 : elle est jolie ; mais la meilleure et la plus complète est celle qu’a donnée Georges-Henri Ribow, Helmstadt, 1728, in-B°. L’éditeur a réuni dans sa préface les différents traits qu’il a pu recueillir de la vie de Rorario. en avouant qu’il n’a jamais pu fixer l’époque de sa naissance ni celle de sa mort[3] ; il a éclairci par des notes les passages qui paraissaient avoir besoin d’explication ; enfin il a complété l’ouvrage de Rorario par une dissertation historico-philosophique « De anima Brutorum. Le Conservateur du mois de janvier 1760 contient un extrait abrégé de l’opuscule de Rorario : « Il y règne, dit le journaliste, une aménité et un air de légèreté qu’on trouve dans peu d’écrits du même siècle. La plupart des raisonnements y sont bien présentés, quoique peu approfondis. En général, c’est un livre agréable pour le style et estimable pour le fond. » Bayle, d’après Draud (Bibliotheca classica, p. 1093), cite un autre opuscule du même auteur : Oratio pro muribus adversus Nicol. Bortii edictum ; August. Rhet. (Coire), 1548. Cette défense des rats a été insérée dans le 1er volume des Petits écrits choisis de J.-G. Ester, 1732, lu-8°.


RORETO (Carlo-Hilarione Petitti, comte de), statisticien et économiste piémontais, né le 21 octobre 1790 près de Chiari, mort le 10 avril 1851 a Turin. Après avoir fait ses études à l’université de cette ville. Il occupa diverses charges dans l’administration des provinces, entre autres celle d’intendant à Asti. Appelé dans la capitale en 1836, il y devint directeur général des prisons, des maisons de travail et de correction, des institutions de bienfaisance et des hospices, avec le titre de


  1. Le texte de Rorario est évidemment erroné ; Coccelus Sabellicus n’enseignait plus à Udine en 1488 ; François Amalthée, né en 1476, n’avait alors que sept ans ; comment aurait-il pu, de l’école d’Amalthée, passer dans celle de Sabellicus !
  2. Cette épître au cardinal Madrucci, datée de 1547, se trouve à la tête de l’opuscule : Quod animalia bruta sæpe ratione utantur melius homine ; elle est précédée d’une autre dédicace au cardinal de Granvelle.
  3. Ces dates ont été déterminées depuis par Liruti, Letterati del Friuli, t. 2.