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démie des inscriptions et belles-lettres avait mis au concours une question qui touchait aux mystérieuses profondeurs de la mythologie antique. Rolle envoya un mémoire qui obtint le prix. De ce mémoire il fit un grand ouvrage, son titre d’honneur, qu’il intitula Recherche : Sur le culte de Bacchus, symbole de la force reproductive de la nature, Paris, 1824, 3 vol. in-8°. « Cette œuvre excellente, a dit un célèbre critique du temps dans la Revue encyclopédique, réunit les plus rares mérites : méthode parfaite d’exposition, bonne foi, sagacité, lumières, habitude et soin religieux de remonter toujours aux véritables sources et de les creuser jusqu’au fond. Le style réunit la concision à la clarté. On sent que l’auteur est un esprit étendu et pénétrant. Nos philosophes, nos poëtes, nos historiens feront bien de consulter ce savant ouvrage. » Tel est le jugement porté par Dacier, qui s’y connaissait. Rolle avait projeté de compléter ce premier travail par une Histoire générale de la religion de la Grève. Malheureusement la mort l’empêcha d’achever cette grande entreprise, et ne lui permit d’en publier que la première partie, formant un volume in-8°, imprimé à Châtillon-sur-Seine en 1828. Retiré dans sa chère Bourgogne, où il acheva une longue vieillesse, active et laborieuse comme sa jeunesse, Rolle cessa de vivre le 21 août 1855, laissant le souvenir d’une existence qui n’avait jamais eu d’autre ambition que celle de l’étude et de la libre possession de soi-même. Il était membre de la Légion d’honneur, de la société des antiquaires de France et de l’académie de Dijon. Z-n.


ROLLE (Dennis), membre du parlement anglais, naquit en 1725 dans le Devonshire, où sa famille, qui prétendait descendre de Rollon, premier duc de Normandie, possédait de grandes propriétés. Ses fermes seules lui rapportaient un revenu de quarante mille livres sterling. Plus d’un propriétaire se serait contenté d’un si beau revenu ; mais ce prétendu descendant de Rollon aimait, comme le chef des Normands, les grandes entreprises. Ayant acheté, en 1766, un district entier de la Floride orientale, il enrôla des centaines de colons et partit, à la tête d’un millier d’individus, pour l’Amérique, comme un second Cadmus ; cependant il ne fut pas aussi heureux que les fondateurs des colonies de l’antiquité : la plupart de ses colons enrôlés succombèrent aux effets d’un climat meurtrier ; les autres, effrayés de ce sort, s’enfuirent. Rolle, abandonné de tout le monde, ayant perdu dans ce projet quarante mille louis et n’ayant pas même de quoi retourner en Europe, s’engagea en qualité de matelot sur un vaisseau qui partait. Il retrouva en Angleterre ses fermes et le revenu de quarante mille livres sterling. Ayant été nommé membre du parlement et shérif, il employa son autorité pour remédier au désordre produit dans ses terres par les cabarets, établir des écoles de pauvres, répandre des livres de morale et enseigner aux enfants les procédés de l’agriculture. Ce qui l’avait le plus choqué à son retour en Angleterre, c’était la brutalité du peuple envers les animaux. Il ne négligea rien pour lui inspirer plus de douceur et pour faire abolir les combats de coqs et de taureaux. Dans une des brochures qu’il composa et qu’il fit distribuer à cette intention, il prétend s’être convaincu par son expérience que les animaux sont naturellement si doux ’pour celui qui les aime, que l’homme en peut faire tout ce qu’il veut. Après avoir siégé deux fois dans la chambre des communes, où il vota toujours d’une manière indépendante, Rolle se retira dans ses terres et se livra tout entier à l’agriculture. On le voyait aller aux champs, avec un sac plein de vivres et une bèche sur l’épaule. À Exmouth, il réserva une colline aride à la culture des bruyères, dont il rassembla un grand nombre d’espèces : il aimait et cultivait la botanique, et il était lié avec plusieurs habiles botanistes. Au milieu de ses travaux agricoles, il exerçait la plus grande bienfaisance : outre deux mille livres sterling, qu’il distribuait chaque année aux pauvres, il donnait des sommes considérables pour toute sorte d’entreprises utiles. Il ne haussait jamais le bail de ses fermiers. Rolle mourut le 24 juin 1797, dans une de ses promenades habituelles à ses terres du Devonshire.

D—g.


ROLLET (Le bailli du). Voyez Du Rollet.


ROLLET (Antoine Brun), géographe et voyageur piémontais, né en 1810 à St-Jean de Maurienne (haute Savoie), mort à Khartoum dans la haute Nubie, le 25 septembre 1858. Il reçut d’abord une instruction très-médiocre, qu’il put cependant compléter plus tard, grâce aux secours de Belley, archevêque de Chambéry. N’ayant pas trouvé moyen d’aller se perfectionner à Paris, il saisit l’occasion d’une place de passager gratuit pour l’Égypte. Dès le mois d’octobre 1831, nous le trouvons remontant le Nil. Il arriva dans cette première excursion à Khartoum, ville au confluent des deux grandes branches de ce fleuve, et qui est la résidence du gouverneur général égyptien pour les provinces soudaniennes. Après y avoir étudié quelques dialectes indigènes, il se remit en roule en 1835 et arriva, en mars 1837, à Kollahad, sur les frontières d’Abyssinie. Les relations hostiles entre les gouvernements de ce pays et le vice-roi d’Égypte empêchèrent d’aller plus loin. Sous le nom de Kawadji Yakoub (ou marchand Jacques), Brun Bollet établit alors des relations commerciales avec les différentes tribus soudaniennes. Il fit descendre leurs produits par le Nil jusqu’à Alexandrie. En 1812, il fut nommé vice consul, et en 1854 consul général sarde pour les provinces du Soudan. Vers cette époque, il envoya en Europe les premières notices sur diverses tribus nubiennes et soudaniennes, entièrement inconnues jusqu’alors, ainsi que sur l’adminis-