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tions, ainsi que plusieurs autres, aujourd’hui peu intéressantes, que Rœderer a publiées ou composées sur les femmes enceintes, sur les nouvelles accouchées et sur le fœtus, sont réunies dans un recueil qui a pour titre : Opuscula medica, sparsim priua édito, num demum collecta, aucto et recusa, ibid., 1765, in-4°. B-N.


ROEDERER (Pierre-Louis), l’un de nos personnages les plus célèbres de nos révolutions, naquit, le 15 février 1754, à Metz, où son père était distingué comme un jurisconsulte profond, et surtout très-zélé dans l’opposition que les parlements faisaient alors au pouvoir royal. Ce fut lui qui, premier substitut du procureur général du parlement de Metz, fut l’auteur du réquisitoire sur lequel cette cour prononça, en 1766, l’expulsion des jésuites de son ressort. Pour prix de ses services, parmi lesquels il faut compter ses démarches pour le rétablissement, en 1775, du parlement que le chancelier Maupeou avait supprimé, il fut, par les trois états de Metz, proclamé grand et généreux citoyen et reçut d’ex l’offre, qu’il n’accepta as, de la finance d’une charge d’avocat général) pour son fils, alors âgé de vingt-et-un ans. Le jeune Rœderer avait déjà débuté avec éclat au barreau. Dès qu’il eut atteint sa vingt-cinquième année, il acheta une charge de conseiller au parlement. En se livrant a la jurisprudence, il avait étudié à fond les grandes questions du droit public, qui, dès cette époque, occupaient fortement les esprits et les dirigeaient vers une révolution que les fautes et l’impéritie du gouvernement rendaient de jour en jour plus imminente. Dès son entrée au parlement de Metz, Rœderer avait été chargé de la rédaction des remontrances, dont il a dit que le gouvernement fournissait trop fréquemment l’occasion. Plusieurs années avant qu’il fût question d’une convocation d’états généraux, il avait composé un long et important ouvrage sur les avantages qu’il y aurait à reculer jusqu’à l’extrême frontière les barrières des traités ou douanes, qui rendaient nos provinces étrangères les unes aux autres et causaient au commerce, qui a besoin de tant de liberté, les plus funestes embarras, les dommages les plus préjudiciables. C’était un bon traité sur le commerce intérieur et sur la théorie des douanes en général. Rœderer n’avait donc pas attendu la révolution pour étudier les matières qu’il a discutées avec une grande supériorité dans nos assemblées représentatives et les hautes fonctions qu’il a remplies. Membre de l’académie de Metz, il y avait lu, en 1782, un discours Sur la nécessité et sur les moyens de former un traité élémmtaíre et complet des finances. En 1788, il répondit et l’appel du ministère en publiant une brochure, qui fut bien accueillie, sur la députation aux états généraux qui était alors la question à l’ordre du jour. On trouve dans cet écrit, fort étendu et fort remarquable, l’origine et le type de toutes les opinions prononcées depuis par l’auteur, d’après la théorie qu’il s’était faite d’un état social bien ordonné. La ville de Metz, comme ancienne république unie à la France sous Henri II, n’avait pas perdu le privilége de s’administrer elle-même par une assemblée de ce qu’on appelait alors les trois ordres. En vertu de cette prérogative, elle dut nommer directement un député. Rœderer fut nommé (26 octobre 1789) seul représentant des trois ordres de Metz à l’assemblée nationale, et (comme on l’a dit dans les tables du Moniteur et dans quelques biographies) député d’Alsace, ni député du tiers état de Metz. La réputation de Rœderer l’avait précédé à cette assemblée, et il y fut accueilli avec une faveur qu’elle manifesta par des applaudissements réitérés lors du premier discours qu’il prononça, peu de jours après son arrivée, au sujet d’une protestation du parlement de Metz contre un décret de l’assemblée nationale. Ce fut ainsi qu’il prit rang parmi les députés favorables aux réformes. Il ne tarda pas à se faire remarquer par sa logique vigoureuse, des principes arrêtés et un esprit philosophique qui éclairait les questions les plus abstraites. Admirateur de Voltaire et de Rousseau, élève de Montesquieu en politique, il l’était de Locke et de Condillac en philosophie, comme, en économie politique, il l’était de Quesnay, de Gournay, de Turgot et d’Adam Smith. Il se lia, dès son arrivée, avec les notabilités de l’époque qui se faisaient le plus remarquer dans le parti de la révolution, tels que Sieyès, Mirabeau, Talleyrand, Lameth, Chamfort et autres députés et gens de lettres. Comme eux il fut membre de cette société des amis de la constitution qui, parce qu’elle tint ses séances dans le réfectoire des Jacobins de la rue St-Honoré, fut : connue sous le nom de Jacobins. Le 17 novembre 1789, le parlement de Metz ayant été dénoncé à cause de sa résistance aux décrets de l’assemblée, Rœderer proposa de mander à la barre six de ses membres pour y rendre compte de leur conduite, et il fit décréter, bientôt après, la même mesure contre la chambre des vacations de Rouen. Le 21 décembre il parla en faveur des comédiens, s’éleva contre les préjugés dont ou avait entouré leur profession et réclama pour eux l’universalité des droits civils et politiques, qui, selon lui, ne devaient être suspendus que pour les personnes attachées à un service personnel. En janvier 1790, il demanda que les biens des ecclésiastiques absents fussent acquis au domaine public, provoqua en même temps l’abolition de tous les ordres religieux et s’opposa à ce que la religion catholique fût déclarée nationale. Le 21 janvier 1790, il fut nommé membre du comité des impositions, et il en devint un des plus habituels rapporteurs. Ce fut surtout dans la manière dont il présenta les systèmes de finances qu’il fit adopter, et dans l’habileté avec laquelle il sut repousser les attaques que ses rap-