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nes et Lacédémone ne songeaient qu’à humilier les Thébains, qui, pour conserver la supériorité que leur avaient acquise les batailles de Leuctres et de Mantinée, se liguaient avec ce prince, et, sans prévoyance, l’aidaient eux-mêmes à forger les chaînes de la Grèce. Philippe menace la ville d’Olynthe, qui invoque l’appui des Athéniens. Démosthènes tonne en vain contre lui ; en vain il le représente tantôt comme un guerrier infatigable, que son activité multiplie ; tantôt comme un imprudent qui mesure des desseins trop vastes moins sur ses forces que sur son ambition ; comme un téméraire qui ouvre devant lui des précipices où il ne faut que le pousser ; comme un usurpateur et un tyran qui soulève contre lui tous les peuples par ses parjures et son impiété, et jusqu’à son armée par l’infamie de ses mœurs et son mépris des lois divines et humaines. Démosthènes montrait aux Athéniens la victoire ; mais il leur demandait de rendre à la guerre les trésors que Périclès avait prêtés aux jeux et aux plaisirs. Le réspltat de cette harangue fut la défense sous peine de mort de renouveler une semblable proposition. Cependant, sur les instances de l’orateur, Athènes envoya d’abord quelques soldats mercenaires au secours d’0lynthe, et, quand le siége fut pressé plus vivement, elle fit partir, sous la conduite de Charès, 2,000 citoyens et 300 cavaliers. Ce faible secours retarda, sans l’empêcher, la prise d’une ville qui peu d’années auparavant avait résisté aux armées réunies de la Macédoine et de Lace démone. Olynthe fut livrée à Philipple par la trahison de deux de ses principaux abitants, Euthycrate et Lasthène, qui, se voyant reprocher leur perfidie, même par les soldats macédoniens, osèrent s’en plaindre à celui qui l’avait achetée. Mais Philippe aimait la trahison et n’aimait pas les traitres. Il répondit par une ironie plus sanglante que l’injure même : « Ne prenez pas a garde à ce que disent ces hommes grossiers « qui nomment chaque chose par son nom. » Cependant, après avoir saccagé Olynthe, enchainé une partie de ses habitants et vendu l’autre, Philippe célébra par une grande pompe de s cetacles et de jeux publics le succès de ses artiiÿces et l’heureuse issue de sa trahison. Bientôt il commence à prendre part à la guerre sacrée. Des pgysans, voisins du temple de Delphes, avaient la uré des champs consacrés à Apollon. D’autres paysans maltraitèrent les profanateurs. Telle fut l’origine de cette guerre qui embrasa toute la Grèce. Le tem le fut pillé par ses défenseurs. Les villes rivales se disputaient la suprématie en couvrant leurs intérêts du voile de a religion, et cette grande querelle dura dix ans. Philippe, sur l’invitation des Thébains, prend leur parti contre les Phocéens. Il veut enfin s’assurer des Thermopyles, n’il sait être les clefs de la Grèce, et obtenir (lhonneur de présider aux jeux Pythiques. Mais il fallait d’abord tromPHI per les Athéniens, qui s’étaient déclarés contre Thèbes en faveur des Phocéens. Athènes envoie en Macédoine dix ambassadeurs, et parmi eux sont Eschine et Démosthènes. Philippe achète Eschine et ses collègues, excepté son célèbre rival. Pendant qu’on négocie, il ait avancer son armée jusqu’à Phères, en Thessalie ; c’œt là qu’enfin il ratiiie le traité de paix arrêté entre les ambassadeurs d’Athènes et les siens ; mais il refuse d’y comprendre les Phocéens. C’est à cette époque qu’Isocrate, alors âgé de quatre-vingt-huit ans, transmit à Philippe un discours ayant pour but de l’exhorter à profiter de la paix qu’il venait de conclure pour concilier ensemble tous les peuples de la Grèce, et à porter ensuite la guerre chez les Perses. « Il suffira, disait Isocrate, de faire entrer dans cette confédération Athènes, Sparte, Thèbes et Argos, dont alors dépendaient toutes les autres villes. Plusieurs personnes, ajoutait-il, vous décrient comme un prince artificieux qui ne cherche qu’à envahir et opprimer ; mais il n’est pas vraisemblable que celui qui se fait gloire de descendre d’Hercule, lequel fut le libérateur de la Grèce, songe à s’en rendre le tyran ; il ambitionnera plutôt d’en être le pacificateur, titre plus glorieux que celui de conquérant. » Isocrate connaissait mal Philippe. Ce prince pensait bien à porter ses armes en Asie, › mais il voulait auparavant soumettre la Grèce, et, ne faisant lui-même aucun cas des alliances et des traités, sa politique était non de gagner les peuples, -mais de les soumettre. Démosthènes avait mieux jugé l’ennemi de sa patrie. De retour à Athènes, il déclara n’avoir été rassuré ni par les paroles ni par les actions du roi de Macédoine, et il annonça que tout était à craindre de sa part. Mais Eschine, vendu à Philippe, protesta n’avoir vu dans les discours et dans la conduite de ce prince que droiture et bonne foi. L’avis de Démosthènes ne pouvait prévaloir chez un peuple qui aimait qu’on llattåt son indolence et son goût elïréné pour les plaisirs de la paix. Tandis qu’on délibérait à Athènes, le roi s’empare des Thermopyles, entre dans la Phocide, s’annonce comme le vengeur d’Apollon, fait prendre à tous ses soldats des couronnes de laurier, et les mène au combat comme sous la conduite du dieu même, qui vient punir les sacrilèges. A leur aspect, le Phocéens se croient vaincus, demandent la paix et se livrent à la merci des Macédoniens. Ainsi fut terminée sans combat une guerre longue et sanglante, qui avait épuisé les deux partis. Philippe se hâta de convoquer le conseil des Amphictyons, déjà dévoués à ses volontés, et il *les établit juges de la peine qu’avaient encourue les Phocéens. Les Amphictšons ordonnèrent la ruine des villes de la P ocide, leur réduction en bourgs de soixante feux, et la levée d’énormes tributs pour la restitution entière des sommes enlevées du temple d’Apollon. Il obtint facilement des