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Cantacuzène, tels que celui qu’avaient.payé les prêtres et les monastères, et le vacarít, roit sur es bœufs et les chevaux ; il fut le premier qui mit une taxe sur les vignobles ; il diminua considérablement le nombre des troupes nationales,

et dépouilla les officiers de leurs privilèges. Il tua, dit-on. de sa main, le grand écuyer de son prédécesseur, fit condamner à mort un évêque grec, beau-Père du prince George Cantacuzène, et força es ecclésiastiques et les religieux diocésains de ce prélat d’assister à son supplice. Enfin la tyrannie cruelle qu’il paraît avoir exercée tant sur le peuple que sur les boyards et le clergé de la Valachie, seconda merveilleusement les vues de la Porte pour l’asservissement de cette province, qui fut consommé par son fils (voy. l’article qui suit). Nicolas, devenu odieux à ses sujets, n’en reçut aucun secours, lorsqu’un détachement de troupes impériales, auquel s’étaient joints un grand nombre de nobles mécontents, s’avança dans la Valachie, par ordre du comte de Steinville. commandant en Transylvanie : ce eorps pénétra jusqu’à Bucharest, et après un combat très-vif contre la garde turque et tartare de l’hospodar, enleva ce prince, avec sa femme et ses quatre enfants, le 8 décembre 1716, et les conduisit à Hermanstadt, puis à Carlsbourg, où ils furent traités avec beaucoup d’égards. Maurocordato promit cinq cent mil e écus pour sa rançon ; mais ses offres n’eurent pas plus de succès auprès de la cour de Vienne que les sollicitations de la veuve et du fils de Cantacuzène, appuyées par une députation des Valaques, qui demandaient ce jeune prince pour hospodar, sous la protection de l’Autriche dont ils consentaient à étre tributaires. La paix de Passarowitz, en 1718, fit avorter les desseins que la maison d’Autriche avait sur la Valachie ; et Maurocordato recouvra sa liberté. par une stipulation expresse du douzième artic e du traité ; témoignage inouï chez les Turcs d’estime et d’intérêt pour un chrétien grec. Reçu avec de grands honneurs à Constantinople, il y apprit la mort de son frère Jean, le plus bel homme de son siècle, et qui l’avait successivement remplacé dans les charges de premier drogman et d’hospodar de Valachie. Nicolas fut alors rétabli dans cette principauté, dont il jouit paisiblement jusqu’à sa mort, arrivée le 14 septembre 1730. Il était âgé d’environ 60 ans Ce prince, à l’exemple de son père, encouragea les ettres et les sciences. Il avait rassemblé une bibliothèque aussi nombreuse que bien choisie. Savant lui-même, et non moins versé dans la connaissance des anciens que dans celle des meilleurs livres modernes, il écrivait et parlait avec facilité le grec ancien et vulgaire, le latin, le français, l’italien, le turc, l’arabe et le persan. Son goût pour le travail et la méditation lui fit supporter philosophiquement sa longue détention ; et ce fut pour en charmer les ennuis qu’il demanda les débris de sa bibliothèque, et qu’il composa son ouvrage grec : De qfioiù, publié en 1719, et réimprimé avec une traduction latine, Leipsick, 1722, in-4°, précédé d’un beau portrait du prince. Ce livre, dans lequel l’auteur, à l’exen)x(ple des anciens, ne s’est assujetti à aucune méth e, et parait avoir voulu imiter le style de Platon, est un traité de morale et de politique chrétienne, divisé en dix-neuf chapitres, àl’usage des princes. La bibliothèque de Paris possède un manuscrit grec de Nicolas Maurocordato (sans nom d’auteur) intitulé Loisirs de Phílothde, sorte de roman instructif et amusant, suivant l’abbé Bignon, qui en a loué l’élégance du style, la vivacité des descriptions et la ressemblance des portraits de diverses nations. Ce prince avait composé d’autres ouvrages qui n’ont pas été publiés ; et l’on conservait dans la bibliothèque de Mencke (1), quelques Mélanges d’¿v-édition, tirés de ses manuscrits grecs. Comment un prince si sage, si éclairé, si pénétré des obligations d’un souverain, a-t-il pu être le tyran de son peuple ? Il est probable que l’envie de quelques familles rivales a exagéré ses torts. Maurocordato eut deux fils, Constantin qui suit, et Charles qui se distingua, comme son père, par ses connaissances et son goût pour les lettres. A-r.


MAUROCORDATO (Constantin), fils et successeur du précédent, fut le dernier hosgodar de Valachie nommé par les boyards et con rmé par la Porte ottomane, qui, depuis, s’est réservé le droit de donner seule des souverains aux Moldaves et aux Valaques. L’élection de Constantin doit justifier la mémoire de son père, car il n’est pas probable qu’un peuple eût choisi pour souverain le fils de son tyran (voy. l’article précédent). Ce prince était à peine installé, qu’il faillit être victime de la révolution qui entraîna la déposition d’Achmet III, en octobre 1730. Il fut arrêté avecsa famille, et l’on séquestra ses biens ; mais, dès l’année suivante, le sultan Mahmoud lui rendit sa liberté, ses biens et sa principauté. Le règne de Constantin Maurocordato a fait époque en Valachie a cause de la fameuse réforme de 1739, à laquelle on a donné son nom et qui consomma l asservissement et la ruine de cette province. Il établit de nouveaux tribunaux, en remplaça quelques-uns par des juges militaires, priva les boyards des gardes dont ils se faisaient escorter, acheva la suppression des milices nationales et n’en réserva qu’un petit nombre

pour le service civil et pour les postes. Aussi mauvais financier que maladroit politique, au lieu d’asseoir le poids principal des impôts sur les productions et les consommations du pays, il augmenta la capitation, et mit en ferme toutes les autres contributions. Quoique les changements opérés par Constantin n’eussent pour objet que d accroître ses revenus, sa réforme embrassa (li Voyez la description de cevolume page 881 de la Bibliolheca Ilenclseninna, édition de 1727.