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plus heureux. Il espérait de la part de Spangen une diversion favorable, et ce général se rendit avant lui, à la tête de 7000 hommes. Un autre de ses généraux se laissa enlever avec un parc d’artillerie et des munitions considérables… Mack ne voulut tenter ni le sort des combats, ni une retraite devenue presque impossible. Pour l’empêcher de prendre l’un et l’autre de ces partis, on avait séduit un de ses espions, l’Alsacien Schulmeister, qui lui annonça que l’armée française allait être obligée de se retirer par suite d’une grande révolution survenue à Paris. Mais bientôt désabusé, manquant de vivres et la tête perdue, il consentit, par une capitulation signée le 17, à rendre la place le 25. » Puis, après une conférence avec Napoléon, qui réussit à le persuader de l’inutilité d’un plus long retard, il livra la place dès le 18, et l’armée française put marcher aussitôt sur Vienne. Ce fut un bien déplorable événement pour l’Autriche, que sa plus belle armée se rendant ainsi sans combattre, et Napoléon se plut singulièrement à ce triomphe. Placé sur un point élevé, au milieu de son état-major, il contempla radieux, pendant cinq heures, toutes ces troupes qui défilaient silencieusement, et fit appeler successivement tous leurs chefs, auxquels il adressa des paroles plus dures que consolantes. Lorsque Mack se présenta aux portes de Vienne, on lui défendit d’entrer dans la ville, et il fut arrêté et conduit, sous escorte, à la citadelle de Brunn, en Moravie. On assure qu’avant de quitter Napoléon, il lui avait demandé un certificat de ses talents et de ses bonnes dispositions militaires, et qu’il apportait ce papier à Vienne pour justifier sa conduite : on ajoute qu’il était en même temps porteur d’une lettre de Bonaparte pour l’empereur, et qu’il s’étaít chargé d’être lui-même le médiateur d’une négociation pacifique entre ces deux souverains ; mais tout cela n’eut alors aucun succès auprès du monarque autrichien, et Mack dut rester prisonnier. Il publia, en 1806, un mémoire justificatif de sa conduite, dans lequel il prétendait démontrer : 1° que la bataille d’Ulm avait été perdue par trahison ; 2° qu’il ne commandait pas en chef ; 3° que la réunion imprévue des Bavarois aux Français l’avait mis dans une position très-critique ; 4° enfin, qu’on avait commencé les hostilités trop tôt et sans son consentement. Transféré, dans le cours de cette même année, à la forteresse de Josephstadt, en Bohème, il fut traduit devant une commission militaire,

présidée par le comte de Colloredo[1], et fut condamné à mort ; mais l’empereur commua la peine en deux ans de prison et la dégradation. Il obtint sa grâce plus tard, et vécut obscurément dans une petite terre en Bohème, puis à St-Polten, près de Vienne, où il mourut le 22 octobre 1828. Ce général, dont le début fut si brillant et la fin si déplorable, n’était assurément dépourvu ni de valeur ni d’habileté ; mais, toujours retenu par des ordres supérieurs dans des limites très-étroites, et contrarié dans tous ses plans par la politique du cabinet autrichien, ne connaissant ni les secrets, ni le véritable but de cette politique insidieuse et si peu franche, il la seconda mal ; et fut victime d’une loyauté aussi inutile d’intempestive. L’empereur François savait fort bien tout cela, et ce fut par de tels motifs sans doute qu’il lui fit grâce de la vie, au moment où toute l’Allemagne s’attendait à le voir mourir sur un échafaud. La conduite de Mack sera jugée avec d’autant moins de sévérité que les secrets de la diplomatie contemporaine seront plus connus.

M-d j.


MACKAU (Ange-René-Armand, baron de), amiral français, né à Paris le 19 février 1788, d’une ancienne famille originaire d’Irlande. Compagnon d’études de Jérôme-Napoléon au collége de Juilly, le jeune Mackau dut à cette circonstance son admission dans la marine, où le prince avait reçu un commandement. Il fit en 1806, sous ordres, une campagne comme aspirant provisoire, à bord du Vétéran. Employé d’abord dans la mer des Antilles, il fut bientôt attaché à l’état-major du contre-amiral François Baudin ; parvenu au grade d’aspirant de première classe et monté sur le brick l’Abeílle, il était en surveillance en 1811 dans les eaux de la Corse et de la Méditerranée. Le 26 juin, les officiers de son bord étant descendus à terre, il se trouvait momentanément seul chargé du commandement du brick ; il découvrit une voile anglaise sous le cap St-André (île de Corse) ; c’était le brick Alacríty, de force supérieure. Le jeune officier ne se laissa pas intimider par l’apparition soudaine du bâtiment anglais. Il arbora son pavillon et se prépara résolument au combat. Grâce à l’habileté de sa manœuvre et à la précision de son feu, le brick français, après une lutte acharnée, réduisit son antagoniste et le ramena capturé à Bastia, aux acclamations de la foule. Cette action d’éclat attira sur Mackau l’attention publique ; il fut nommé lieutenant de vaisseau, décoré de la Légion d’honneur, et reçut le commandement du brick dont il s’était si valeureusement emparé. Les corsaires anglais ne cessaient d’inquiéter les côtes méditerranéennes de la France et de l’Italie. Le jeune lieutenant, monté sur l’Alacrity, eut pour mission de les poursuivre. Le 7 février 1812, il fut promu au grade de capitaine de frégate, et eut sous ses ordres la flottille de Livourne. Il contribua à la défense de cette ville assiégée par les Anglais, et en 1813, les Français ayant évacué l’Italie, il ramena à Toulon une partie du matériel des ports de Livourne et de Gênes, et la garnison de Corfou. Après la restauration, Mackau, pourvu

  1. On a dit que cette commission avait été présidée par le général Melas, le même qui avait capitulé non moins honteusement à Marengo.