avec Danton ; celui-ci l’établit son lieutenant, et le fit entrer plus tard dans son club des cordeliers. Legendre s’était aussi lié à la même époque avec Marat, qu’il tint longtemps caché dans sa cave pour le soustraire aux poursuites de la police. On trouve encore Legendre au milieu des bandes qui se portèrent à Versailles, le 5 octobre 1789, sans qu’on l’ait cependant accusé d’avoir pris part aux attentats qui se commirent alors. Son crédit augmentant chaque jour parmi la populace, il figura en première ligne dans l’émeute qui eut lieu au Champ de Mars, en 1791, pour forcer l’assemblée constituante à mettre le roi en jugement après le voyage de Varennes. Obligé de fuir pour se dérober au décret de prise de corps porté contre lui à cette occasion, il ne rentra dans Paris qu’après la loi d’amnistie rendue lors de l’acceptation de la constitution. Alors il recommença ses manœuvres séditieuses, et fatigua l’assemblée législative de ses pétitions révolutionnaires. Le 20 juin 1792, il fit partie de la horde de factieux qui vint insulter le roi et menacer sa vie jusque dans son palais. Le 10 août, il était encore au milieu de ceux qui renversèrent le trône ; mais il ne prit point part aux assassinats de septembre. Malgré son intimité avec Danton, personne ne les lui a reproches. Nommé à cette époque député à la convention pour la ville de Paris, il se montra, dans cette assemblée, un des persécuteurs les plus acharnés de Louis XVI. Malouet, de Lally et de Bertrand-Molleville, ayant adressé aux accusateurs de ce monarque des lettres par lesquelles ils démentaient les faits calomnieux répandus contre lui, Legendre s’opposa à ce qu’on fit lecture de leurs lettres. Le 13 décembre 1792. il fit un crime à ce prince de s’être promené dans le faubourg St-Antoine et d’y avoir distribué de l’argent. Le même jour, il demanda que personne ne pût élever la voix lorsque le tyran par attrait à la barre : « Il faut, dit-il, que le silence des tombeaux effraye le coupable. » Le 26, Lanjuinais ayant démontré que toutes les formes, toutes les garanties de la justice étaient violées, Legendre l’accabla d’injures ; et dans l’impatience que lui causait l’hésitation de quelques députés à consommer le cruel sacrifice, il s’écria qu’il fallait. couper le tyran en quatre-vingt-trois parties pour les envoyer aux départements. Cette motion bien digne d’un boucher n’a pas été rapportée par le Moniteur : mais elle se trouve dans d’autres journaux ; et le rédacteur de cet article certifie l’avoir entendue. Aux appels nominaux, Legendre vota pour la mort, contre l’appel au peuple et contre le sursis. Le 21 janvier, jour de l’exécution, il fut nommé membre du comité de sûreté générale. Il fut ensuite un des premiers commissaires envoyés à Lyon : dans ses dépêches, il avoua n’avoir pas trouvé les habitants de cette ville à la hauteur des circonstances. On lui sut fort mauvais gré de s’être exprimé avec cette franchise, et surtout de n’avoir pas pris des mesures pour faire sortir les Lyonnais de leur apathie. Il était réservé à des individus moins passionnés, mais plus adroits, d’agir avec une tout autre énergie. Le 21 avril 1793, Legendre s’opposa au renouvellement du tribunal révolutionnaire (nommé alors tribunal extraordinaire) que les girondins voulaient détruire, ou peut-être seulement soustraire à l’influence de la faction de septembre. Au 31 mai, il se prononça de la manière la plus violente contre le parti qui succomba ; et il appuya toutes les motions de Robespierre, qui n’eut pas alors de défenseur plus zélé. On le vit surtout attaquer Lanjuinais, qui montra dans cette circonstance un courage au-dessus de ses forces (voy. Lanjuinais). Le 22 juin, il lit la motion que des commissaires de la convention se rendissent dans les départements pour y faire sonner le tocsin contre les rebelles et qu’il continuât de sonner jusqu’à ce que tous les contre-révolutionnaires fussent anéantis. Le 11 juillet, il dénonça Camille Desmoulins pour avoir osé défendre le général Dillon. Voulant faire pardonner la modération qu’il avait montrée à Lyon, il demanda, le 12 juillet 1795, que si dans quinze jours les habitants de cette ville ne rentraient pas dans l’obéissance, la convention libérât tous leurs débiteurs, comme le commerce des bouchers allait fort mal, et qu’ils ne pouvaient presque plus se procurer de bestiaux, il demanda, le 21l février 1794, que la convention ordonnât un carême civique pour empêcher l’entière destruction des espèces auxquelles on ne laissait pas le temps de se renouveler. Le 20 mars l794, il dénonça aux jacobins son ancien club des cordeliers, dont Robespierre voulait se débarrasser, et proposa à la société mère de cesser ses communications avec la nouvelle secte. Peu de jours après, Hébert et Vincent, régulateurs du club proscrit, furent envoyés a l’échafaud (voy. ces deux noms). Le 31 mars, Legendre annonça à la convention que Danton venait d’être arrêté ; il vanta les services que cet homme avait rendus à la révolution, et demanda qu’il fût admis à l’assemblée pour répondre aux griefs qui lui étaient imputés. Cette motion, d’abord appuyée, fut combattue par Barère, qui prétendit que la responsabilité des comités suffisait pour convaincre les amis de Danton que toute justice lui serait rendue ; et il invoqua la question préalable. Robespierre parut ensuite, traita Legendre et ceux de son parti avec une dédaigneuse arrogance, et les accabla de son ascendant. Le boucher législateur ne retrouva plus rien de sa première énergie. Il déclara humblement n’avoir voulu parler pour aucun individu, mais seulement pour la justice ; que peut-être il s’était trompé, mais que son intention était pure. Robespierre parut se contenter de cette réponse, et Legendre rentra dans les rangs de ses défenseurs. Le 7 avril, il fit décréter d’accusation le prêtre Simond, son collègue, et prétendit avoir reçu des lettres ano-
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