intime l’ordre de le suivre. « Volontiers, monsieur, répondit le prélat, qui était dans sa chambre ; mais vous me permettrez de passer dans le cabinet voisin pour faire ma toilette ?» Le lieutenant, examinant les lieux et ne voyant au pourtour de l’appartement que des rayons de bibliothèque chargés de livres, reste à la porte et l’attend. Mais la toilette ne finissait pas. Le lieutenant se décide à ouvrir… Plus de prisonnier. Il s’était sauvé par une porte secrète que les dispositions de la bibliothèque masquaient complétement. On apprit bientôt que, s’étant embarqué à Roscoff, petit port éloigné d’une demi-lieue de St-Pol de Léon, il avait gagné les côtes d’Angleterre. Ses instructions et ses mandements n’en circulèrent pas moins dans son diocèse et dans toute la Bretagne. Ceux qui ont connu la Marche pendant son émigration s’accordent à dire qu’il fut le modèle de toutes les vertus, le père et le consolateur non-seulement des émigrés et des prêtres réfugiés, mais encore des prisonniers français. Il mourut à Londres le 25 novembre 1806, comblé des bénédictions des pauvres. L’abbé du Chatellier, depuis évêque d’Evreux, prononça son oraison funèbre, dans la chapelle française de Conwey street, Fitzroy square. Le peintre Danloux porta en France le portrait original de l’évêque de Léon, et ce tableau, exposé dans la galerie du Louvre, excita un vif intérêt. La Marche a fondé le collége de Léon, dont l’édifice seul lui coúta trois cent mille francs. Il a introduit dans son diocèse la culture de la pomme de terre, dédaignée de son temps, et qui est aujourd’hui d’une si grande ressource pour les populations pauvres de la Bretagne.
LAMARCHE (Joseph Drouot), général français,
naquit à Wiche (Vosges), le 14 juillet 1755, d’une
famille obscure, reçut une éducation incomplète
et s’enrôla dès l’âge de dix-huit ans dans un régiment
de dragons, où il devint sous-officier après
huit ans de service, et lieutenant en 1760. Il était
alors à l’armée de Hanovre, et y fut blessé d’un
coup de feu à la poitrine, qui lui fit courir de
grands dangers. Nommé par suite capitaine en
second dans le même corps, il passa capitaine
commandant dans les hussards de colonel-général,
en 1785, et y parvint successivement au
grade de lieutenant-colonel. C’était le point le
plus élevé où pût arriver dans ce temps-là ce qu’on
appelait un officier de fortune. Dans cette position,
Lamarche devait suivre le parti de la révolution ;
et il le suivit avec d’autant plus d’empressement
que, dès le 25 juillet 1791, aussitôt après
l’émigration des officiers nobles, il devint colonel
de ce même régiment de hussards de colonel général,
l’un des plus beaux de l’armée française.
Placé dès le commencement de la guerre sous les
ordres de Luckner, il eut part aux opérations de
l’armée qui fut opposée aux Prussiens dans leur
expédition de Champagne, et il les suivit dans
leur retraite sous le commandement de Valence.
Ayant été nommé maréchal de camp le 10 octobre
1792, il prit pour aide de camp le jeune Ney,
devenu plus tard si célèbre, et qui était alors officier
de son régiment. Lamarche concourut à la
prise de Namur, et après quelques succès de peu
d’importance il passa l’Ourthe et alla s’établir à
Verviers, où il prit ses quartiers d’hiver. Dampierre,
qui commandait sur la Roër, ayant été
forcé le 1er mars suivant, par l’armée du prince
de Cobourg, de se retirer sur Liège, Lamarche
vint occuper la position de Henri-Chapelle, où il
soutint les efforts de l’ennemi et forma l’arrière-garde
jusqu’à Tirlemont. Il combattit encore à
Cumptich contre des forces très-supérieures, et
fut cité honorablement dans le rapport du général
en chef Dumouriez. Placé au centre de la bataille
de Nerwinde, il chassa d’abord l’ennemi de
ce village et passa rapidement la Nèthe. Mais la
gauche de l’armée, sous les ordres de Miranda,
ayant fait une retraite précipitée, ces premiers
avantages devinrent sans effet, et, après avoir couché
sur le champ de bataille, la droite et le centre
de l’armée française furent obligés de se retirer
le lendemain sur Tirlemont. Lamarche concourut
encore très-efficacement, dans cette retraite
difficile, à maintenir l’ordre dans les troupes, et
il soutint, notamment dans la position de la montagne
de Fer, près de Louvain, le choc d’une
grande partie de l’armée autrichienne. La fatigue
et ses anciennes blessures ayant alors épuisé ses
forces, il demanda et obtint du général en chef
la permission de se retirer à Douai. Ce fut pendant
son séjour dans cette ville qu’eut lieu la défection
de Dumouriez. Sommé aussitôt par les
commissaires de la convention de se rendre à son
poste, Lamarche vint joindre Dampierre, et il
s’efforça, avec le petit nombre d’autres généraux
qui ne suivirent pas leur chef, de réunir les faibles
débris de cette armée dispersée et divisée par
les défaites et les dissensions de l’esprit de parti.
Lamarche reçut du conseil exécutif l’ordre de se
mettre à la tête de l’armée des Ardennes, tandis
que Dampierre prit le commandement de celle du
Nord ; et bientôt ces deux armées, qui formaient
à peine trente mille hommes, se réunirent pour
secourir Valenciennes et attaquer le camp de Famars.
En présence de quatre-vingt mille Autrichiens
victorieux, l’entreprise était difficile, et elle
donna lieu à des attaques très-meurtrières où
Dampierre fut tué. Le commandement général se
trouvant alors tout entier dans les mains de Lamarche,
épouvanté d’une responsabilité et d’un
fardeau qui, dans de pareilles circonstances.
étaient véritablement effrayants et beaucoup au-dessus
de ses forces, il demanda un successeur
que l’on se hâta de lui donner. Ce fut Custine que
l’on nomma ; mais ce général, alors malade, ne
put venir que le mois suivant, et, en attendant,
Lamarche, aidé de Kilmaine, dut soutenir encore
une lutte très-inégale (voy. Kilmaine). La droite
et la gauche de l’armée se trouvant forcées par