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inépuisable de droiture et de moralité, un désintéressement louable, une indéfectible fidélité à ses engagements et à ses principes. « Qui l’avait observé, disait madame de Staël, pouvait savoir d’avance avec certitude ce qu’il ferait dans toute occasion (1). » Bel éloge, et rarement mérité dans un siècle mémorable pour l’abaissement des caractères, et où les opinions ne représentent guère que des intérêts ! Personne enfin ne portait plus loin le sentiment de la bienveillance et le charme des relations privées. Père adoré d’une nombreuse famille, bon époux, maître indulgent, ami fidèle, sa bourse était toujours ouverte aux malheureux, et « son dévouement facile, empressé, sérieux, était d’aussi bon aloi que de bonne grâce (2). » Mais la postérité juge moins les intentions que les résultats, et les vertus privées pèsent d'un faible poids dans sa balance. Cœur droit, esprit chimérique, Lafayette apparaitra dans l'histoire comme le type de ces novateurs impatients et inflexibles dont le lot est de frayer par l'agitation révolutionnaire l’accès aux pouvoirs absolus, qui la contiennent ou l’assoupissent, mais ne la désarment pas (3). — De son mariage avec mademoiselle de Noailles, morte le 24 décembre 1807, le général Lafayette avait eu un fils, Georges-Washington Lafayette, et deux filles, dont l’ainée avait épousé M. Charles de Latour-Maubourg, et la seconde M. de Lasteyrie. A. B-ÉE.

(1) Considérations sur la révol. franç., 2e part, ch. 3.
(2) Mémoires de M. Guizot, t.1, p.238.
(3) Parmi les nombreux écrits publiés sur la vie et la personne du général Lafayette, nous devons mentionner : les Mémoire pour servir à son histoire, par Regnault-Warin, 1824, 2 vol.in-8°, - Lafayette en Amérique en 1824 et en 1826, par M. Levasseur, 1826, 2 vol. in-8°; Le général Lafayette, mémoires authentiques, par A. Châteauneuf, Paris, 1831, in-8°; - Lafayette et la Révolution de 1830, par Sarrans jeune, 1834, 2vol. in-8°; - les Souvenirs sur sa vie privée, par M. le docteur J. Cloquet, 1836, in-8°; Le portrait que Rivarol a tracé de Lafayette dans son pamphlet intitulé Vie politique, fuite et capture de M. de Lafayette, est une des productions les plus piquantes et les plus satiriques de cet écrivain. La famille du général a publié, en 1837 et 1838, ses Mémoires et des manuscrits, 6 vol. in-8°. M. de Corcelles, petit-gendre du général, a accompagné cette intéressante collection de notes qui se recommandent par le ton de vérité et de modération sur lequel elles sont généralement écrites. Parmi les morceaux originaux dont elle se compose, on distingue surtout la lettre de Lafayette au bailli de Ploën sur la révolution de 1789, celle qu'il écrivit à M. de Latour-Maubourg à l'occasion de la mort de sa femme, une foule de confidences curieuses sur les événements remarquables auxquels il a pris part, et sous ce titre: Mes rapports avec le premier consul, un aperçu plein de finesse et d'élévation sur le caractère politique et militaire de Napoléon Bonaparte. A. B-ÉE.

LAFAYETTEE (GEORGES WASHINGTON), fils du précédent, né à Paris le 25 décembre 1779, eut pour parrain le général Washington, à qui il fut envoyé par sa mère, au mois de février 1795, pendant que cette noble et courageuse femme, accompagnée de ses deux filles, se dévouait à partager dans les cachets d’Olmütz la captivité de son mari. Au bout de deux ans et demi de séjour à Mount-Vernon, Georges revint en France, embrassa le métier des armes après la délivrance de son père, et obtint, à l’époque de la bataille de Marengo, une sous-lieutenance de hussards. Il fut successivement aide de camp des généraux Canclaux, Dupont et Grouchy, et fit avec honneur les campagnes d'Italie, d'Autriche, de Prusse et de Pologne. Au passage du Mincio, il fut atteint de trois balles qui ne lui causèrent que de légères blessures. À la bataille d’Eylau, il eut le bonheur de sauver le général Grouchy, qu’entouraient des escadrons ennemis. Georges de Lafayette fut proposé plusieurs fois pour un grade supérieur ; mais l’empereur, indisposé par l’isolement de son père, lui refusa toute espèce d’avancement, et ne voulut pas même consentir que son beau-frère Murat se l’attachât en qualité d’officier d’ordonnance. Georges de Lafayette renonça au service militaire après la campagne de 1807, se retira au château de la Grange, et ne prit aucune part aux affaires publiques jusqu’après 1815, époque où le département de la Haute-Loire l’envoya siéger à la chambre des cent-jours. Sa carrière parlementaire n’éprouva plus dès lors que de rares et courtes interruptions. Il profita de l’une d’elles pour accompagner son père dans le voyage triomphal qu’il fit aux États-Unis, en 1824, et reprit, par suite des élections de 1827, la place qu’il avait constamment occupée à l’extrême gauche de la chambre. Lors de la révolution de juillet, il remplit auprès de son père, alors commandant supérieur des gardes nationales de France, les fonctions d’aide de camp, et donna sa démission lorsque le général résigna son commandement. Georges de Lafayette ne cessa, jusqu’à la révolution de 1848, de représenter à la chambre l’arrondissement de Coulommiers, et se distingua par la persistance de son opposition au gouvernement de Louis-Philippe ; mais il n’aborda que rarement la tribune et seulement pour défendre les actes ou les principes politiques de son père, auquel il avait voué une vénération et un attachement sans bornes. Il appartint comme député de Seine-et-Marne à l’assemblée constituante de 1848, et fut nommé vice-président de cette assemblée. Il ne fit pas partie de celle qui lui succéda, et mourut le 29 novembre 1849. Georges de Lafayette n’a été mêlé que d’une manière très-secondaire aux événements qui ont rempli la première moitié de ce siècle, et son nom est demeuré, sous ce point de vue, sans importance historique. Comme personnage privé, il s’était fait honorer et aimer par la sûreté de son commerce, par l’aménité de ses mœurs et la rectitude de son jugement. Il avait épousé en 1802 mademoiselle Destutt de Tracy, dont il a eu deux fils et trois filles, mariées à MM. Adolphe Périer, Bureaux de Pusy et G. de Beaumont. A. B-ÉE.

LAFÉRANDIERE (MARIE - AMABLE PETITEAU, épouse de LOUIS-ANTOINE ROUSSEAU, marquis DE), née à Tours en 1756, se maria en 1756 ; et ce ne fut que plus de dix ans après qu’elle se trouva lancée dans la carrière des lettres. Une jolie chanson qu’elle avait faite pour sa fille, alors âgée de dix ans, fut à son insu envoyée et insérée au Mercure. Quelqu’un y répondit par un

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