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outre chargé de l’enseignement de la pathologie. Des devoirs si multipliés auraient suffi pour occuper un homme d’une moins grande activité ; mais, indépendamment de ces cours, Araldi, comme médecin, était souvent appelé dans les consultations ; et cependant il se tenait au courant de toutes les découvertes en mathématiques, et il faisait marcher de front la culture de la philosophie et celle des lettres. À la création de l’institut national d’Italie, il en fut nommé l’un des premiers membres ; et après la mort de l’abbé Fortis (voy. ce nom), il en fut élu secrétaire perpétuel. Il mourut à Milan, le 3 novembre 1813. Il était chevalier de la Légion d’honneur et de la Couronne de fer. Zélé défenseur des principes fondamentaux de l’ordre social, Araldi chercha dans plusieurs mémoires à les justifier contre les attaques de philosophes moins audacieux encore qu’imprévoyants. Dans d’autres mémoires il essaya de donner des explications plus exactes de divers phénomènes physiologiques, et dans d’autres enfin il tenta de résoudre quelques-uns des grands problèmes dont la solution avait exercé longtemps les plus illustres géomètres. Les Actes de la société des sciences de Modène, dont il était un des principaux ornements, contiennent de savants mémoires d’Araldi sur les apogées ; — sur la force et l’influence du cœur dans la circulation du sang, etc. ; — sur la loi de la continuité. On en trouve aussi plusieurs[1] dans le recueil de l’institut national d’Italie, dont en outre il rédigea les préfaces, dans lesquelles, ainsi que dans plusieurs endroits de ses ouvrages, il cherche à relever l’honneur des italiens, et il les venger des injustes reproches que leur adressent les étrangers. On n’a d’Araldi que deux ouvrages imprimés séparément. L’un est son fameux mémoire : de l’Usage des anastomoses dans les vaisseaux des machines animales, et particulièrement dans le système de la circulation du sang, qu’il traduisit lui-même en français, Modène, 1816, in-8o ; et l’autre un Essai d’Errata[2] dans lequel il examine, en les opposant les unes aux autres, les opinions des plus célèbres physiologistes modernes. L’Éloge d’Araldi par Rovida, Milan, 1817, in-4o, contient une analyse des ouvrages de ce savant médecin ; celui que le marquis Louis Rangoni a lu dans une séance de la société des sciences de Modène (t. 19, Physiq.,1er) est terminé par la liste de toutes ses productions imprimées ou inédites. On y renvoie les curieux, ainsi qu’a la Storia della Letterat. de Lombardi, t. 2, p. 261. W-s.


ARAM (Eugène), savant anglais, né à Ramsgill, dans le comte d’Yorck, était fils d’un pauvre jardinier, et destiné a la même profession ; mais, animé du désir de s’instruire, il acheta des livres, qu’il apprenait par cœur dans ses moments de loisir. Ce fut ainsi qu’il acquit la connaissance des langues savantes, de plusieurs sciences, de l’histoire, des antiquités, etc. En 1744 il vint a Londres, où il se mit a enseigner l’écriture et la langue latine dans différentes maisons d’éducation, ne laissant échapper aucune occasion d’ajouter de nouvelles connaissances à celles qu’il avait acquises. Il travaillait a la composition d’un dictionnaire comparé des langues celtique, anglaise, latine, grecque et hébraïque, lorsqu’un événement affreux vint arrêter ses progrès : il fut saisi, en 1758, à Lynn, dans le comté de Norfolk, comme assassin d’un cordonnier nomme Daniel Clark, disparu depuis plus de treize ans. Aram fit une défense remplie de talent et d’adresse, mais n’en fut pas moins convaincu du crime, et il l’avoua ensuite lui-même au ministre qui l’assista au supplice, qu’il subit avec une grande résignation. Il parait que son crime lui avait été inspiré par la jalousie : il croyait avoir lieu de soupçonner Clark d’entretenir un commerce illicite avec sa femme. Il tenta vainement de se détruire après son jugement, et fut exécute à Yorck en 1759. X-s.


ARAMON, ou ARAMONT (Gabriel de Luetz, baron d’), ambassadeur de France à Constantinople, sous le règne de Henri II, est appelé citoyen de Nîmes par Poldo d’Albenas ; d’autres circonstances se réunissent pour prouver qu’il naquit dans cette ville, ou aux environs, dans le commencement du 16e siècle, et qu’ainsi Moréri et Bayle se sont trompes en le disant natif de Gascogne. Il se maria en 1526, et, ayant essuyé quelques dégoûts dans sa province, se rendit à la cour, où il obtint la confiance de François 1er et de Henri II. Ambassadeur à Constantinople, depuis 1546 jusqu’en 1553, il ramena dans les intérêts de la France Soliman II, qu’on en avait éloigné, et obtint de ce prince une flotte pour faire, en menaçant Naples et la Sicile, une utile diversion en Italie. Charles-Quint, informé de cette négociation, ne manqua pas de se récrier sur le scandale de l’alliance du roi très-chrétien avec des infidèles, plaintes hypocrites que l’Empereur, comme l’a judicieusement observé Bayle, se serait lui-même mis peu en peine d’exciter. D’ailleurs l’idée du renouvellement de l’alliance avec le Grand Seigneur avait été inspirée par le pape Paul III, et, sans doute, il n’en aurait pas fallu davantage pour triompher des scrupules de Henri II, si ce prince en avait eu dans une telle circonstance. Les fausses mesures de la cour de France rendirent à peu près inutile le succès de cet ambassadeur, et un incident qu’il s’efforça en vain de prévenir le compromit quelque temps d’une manière assez grave. Revenu en France pour rendre compte de sa mission, et prendre de nouveaux ordres, il retournait à Constantinople. De Malte, où il avait touché, il alla, sur la demande du grand maître, essayer d’engager, au nom du roi de France, Dragut, qui attaquait Tripoli, à renoncer au siége de cette place. Il n’y réussit point, et le grand maître, Espagnol de naissance, n’épargna rien pour accuser l’ambassadeur français ; mais d’Aramont se justifia, et alla reprendre son poste auprès de Soliman II. Quelques historiens disent que le don des îles d’or (d’Hières), érigées en marquisat en faveur d’Aramont, avait été le prix de ses services. C’est une erreur : il ne les posséda que par la cession que lui en fit un allemand,

  1. Dans le nombre. il faut distinguer son Sagio di un nuro commento delle opere di Virgilio (Essai d’un nouveau commentaire sur les œuvres de Virgile), tome 1{er}} de la classe de littérature.
  2. Saggio di un Errata di cui sembrano bisonosi alcuni libri elementari, Milan, 1812, tome 1er. C’est jusqu’ici le seul qui ait paru.