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maternelle. et il eut le bonheur de réussir. On a de lui des épîtres, des églogues, des fables, des chansons, des stances, des pensées. — Après avoir habité quelque temps sa ville natale, Gros se rendit à Paris. Il eut alors la malencontreuse idée de revenir à la poésie française. Ses nouvelles pièces sont restées inédites. On assure qu’elles ne méritaient aucune espèce d’attention.

— Gros obtint plus tard un petit ’emploi dans les fermes de Pont-Voisin. Tranquille sur ses moyens d’existence, il put se livrer entièrement a ses études favorites. Il reprit ses premières poésies patoises, les corrigea et les perfectionna. En même temps, il en composa d’autres généralement supérieures aux premières.—Gros est mort à Lyon, d’une attaque de paralysie, à l’âge de 50 ans. Ses œuvres ont été réunies en un volume. Il en existe trois éditions, dont voici les titres et les dates : 1° Recuil dé pouéxies prouomçnlo : de M. F.-T. G.. dé Manille. Marseille, 1754, in-8° ; 2° Recuíl de pouésier provençale : de M. F.-T. Gros. dé Manille, nouvelle edicîen. courrigeado et augmenta do per Faulour, eme : mo ezplicacien dei mot : lei plus dfiler. Marseille, 1765, in-8° ; 5° Olšuvrer complètes de T. Gros, suivie : de morceau. : choirir de quelque : poële : provençaux (Germain, Dageville, Vigne, Favre, Chailan), Marseille, 18-11, in-8°. Cette dernière édition est accompagnée d’un portrait de l’auteur et d’une notice sur sa vie. Un manuscrit de Gros, renfermant dix de ses meilleures fables, se trouve dans la bibliothèque de l’auteur de cet article. — L’ouvrage de notre poete a été considéré comme un des principaux monuments de la littérature provençale. Les épîtres de Gros sont assez gracieuses. Uune d’elles est adressée à madame de Simiane-Grignan, petite-fille de madame de Sévigné. On estime sa traduction de la première idylle de Moschus. Ses stances contre la poésie passent généralement pour son chef-d’œuvre. « Les vers de Gros coulent « partout, dans son recueil, avec une facilité qui « n’exclut ni l’élégance de l’expression ni la « force de la pensée. » (Lavalette). L’auteur dit que ses poésies lui coûtaient beaucoup. On a de la peine a le croire. On sait toutefois qu’il les retouchait et les polissait avec un soin extrême. Les compositions de Gros offrent de l’harmonie et de l’originalité, parfois même de la chaleur ; il est tantôt sensible et presque mélancolique, tantôt railleur et enjoué. On n’est pas surpris d’apprendre que notre troubadour est regardé comme un des premiers poëtes de la Provence. On est étonné seulement qu’il n’ait pas écrit davantage. Gustave Brunet, de Bordeaux, l’a jugé trop défavorablement (Lettre sur les ouvrages pat., 1859, p. 22). Fabre, de Marseille, est beaucoup plus

juste à son égard (Hist. Mars., in-8°, 2 vol.).

A. M.


GROS (Antoine-Jean), peintre célebre, naquit à Paris le 16 mars 1771. Son père, originaire de Toulouse, était venu très-jeune se fixer dans la capitale, où il peignait agréablement la miniature. Sa mère, fille d’un joaillier, faisait de très-jolis pastels. Dès qu’il fut en état de lire, ses parents ne négligèrent rien de ce qui pouvait lui assurer une bonne éducation, et il seconda leur zèle en se livrant avec assez d’ardeur aux études classiques du collége Mazarin, où on l’envoyait comme externe. Mais il avait puisé avec le lait, dans la maison paternelle, le goût de la peinture : son père fut son premier maître. Dès Page de six ans il le fit dessiner, et fut sur ce point d’une telle sévérité qu’il lui faisait refaire un pied ou une main jusqu’à douze ou quinze fois. Gros a parlé souvent d’un dessin au crayon rouge d’après Vanloo, de 18 pieds sur 12, auquel l’exigence paternelle l’avait tenu longtemps attaché. Il attribuait à ces études surveillées avec tant de rigueur la sûreté de main et la justesse de coup d’œil qu’il posséda par la suite. Cependant il était sans cesse distrait de l’étude des langues anciennes parla pensée de l’art auquel il se sentait appelé. Nous avons vu des Rudiments, des Gradus ad Parnassum, couverts de figures à la plume de sa main. Les chevaux et les guerriers surtout, qu’il devait plus tard représenter si énergiquement, étaient l’objet de ses distractions, et il en barbouillait tous ses livres. D’autres enfants sans doute ont eu de semblables goûts ; mais ce qui est plus significatif, et ce qui prouve admirablement la puissance de l’instinct qui guidait le jeune Gros, c’est qu’après avoir sollicité longtemps et enfin obtenu de ses parents la permission de consacrer au dessin et à la peinture plus de temps qu’il n’avait fait jusque-là, il demanda lui-même in choisir un maître, et qu’alors son père l’ayant conduit à une exposition de tableaux, il le présenta devant les ouvrages des hommes qui étaient le plus en réputation, et lui dit : « Nomme celui de tous ces peintres sur les traces « duquel tu veux marcher. » Le jeune Gros ému prend son père par la main, et, en silence, le conduit au tableau de David, Hector et Andromaque. « Tu iras chez David, » dit aussitôt le père rayonnant de joie. C’est ainsi que Gros entra dans l’atelier de David en 1785, à l’âge de quatorze ans. Il y devint bientôt un de ses élèves de prédilection, et, aux yeux des meilleurs esprits, le plus distingué des peintres créés par ce maître. Peu de temps après il quitta le collége n’ayant fait que sa troisième, mais assez avancé dans le latin pour avoir pu par la suite lire avec plaisir et avec fruit les auteurs classiques. En 1791 il perdit son père, dont la fortune avait été fortement dérangée par la crise révolutionnaire et par une banqueroute qui lui enleva 60,000 francs, prix de son cabinet de tableaux qu’il avait vendu. Ce double malheur ne fit que redoubler l’ardeur du jeune Gros pour un art dont il prévoyait qu’il aurait besoin de tirer parti ; et il renonça à toutes ses autres occupations afin de s’y livrer exclusivement. En 1792 il concourut pour le grand prix ; le sujet était Eléazar refusant de manger de :