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tard, à la place de ce titre précaire et provisoire il obtint le titularisai. Il justifiait ce rapide avancement par la réunion d’un talent incontestable et d’une rare activité. Peu de temps lui suffit pour prendre rang parmi les premiers professeurs de l’Allemagne, à la tête des légistes et surtout des cri mina listes. Koch, qui avait été regardé comme l’aigle de la faculté de droit de Giessen, en ressentit un dépit amer, et il eut la maladresse de le laisser percer en plus d’une occasion. Calme et se possédant toujours à merveille, non moins homme d’esprit et homme du monde qu’homme de cabinet et de science, Crolman maintint sans peine ses avantages vis-à-vis de son rival. Chaque jour d’ailleurs ajoutait à sa réputation d’originalité, de netteté dans l’appréciation des difficultés juridiques. Sa première brochure (Essai sur la nature juridique des loteries) avait fait sensation. Les premières livraisons de sa Bibliothèque de jurisprudence et de législation pénale : parurent l’année suivante (1798), et il donna lui seul et presque sans collaborateurs la totalité du premier volume. Feuerbach et Harscher d’Almedingen ne l’aidèrent qu’ensuite. Dans l’intervalle avaient encore été livrés au public les Principes fondamentaux du droit criminel. où l’auteur expose une théorie à lui, celle de la prévention ; et une première livraison de son Magasin pour la philosophie du droit et de la législation. dont plus tard le titre fut légèrement modifié, et pour lequel, à partir de 1808, il s’aida de la collaboration d’Aug. de Lehr. En 1799 et 1800 il entreprit, conjointement avec deux autres professeurs de Giessen, Schmidt et Snell, le Journal des droit : et ¢le : devoir : de l’homme et du citoyen (journal sur Aufklärung über die lteeIlte...), dont il ne parut au reste que deux livraisons. C’est en 1809 que, ne voulant point laisser sans réponse les objections faites à sa doctrine de la pénalité préventive, il la reproduisit accompagnée de preuves nouvelles, sous ce titre : Quelle est la base du droit criminel et de la législation criminelle. et comment en déroule la doctrine de gradation dans les charges juridiques et dans la pénalité ? (über die Begründung des Strafireclttr, ... nebst Entwickelung der Lehre...) Toutes ces publications avaient pour objet le droit criminel et pénal. Grolman fit voir qu’il ne s’était point exclusivement circonscrit à cette sphère d’étude, en donnant en 1800 sa Théorie de la procédure civile d’aprés le droit allemand vulgaire. Il faut avouer qu’après avoir ainsi fait succéder les ouvrages aux ouvrages avec une précipitation juvénile, Grolman parut avoir jeté tout son feu. C’est du moins ce que dirent ses rivaux. Le fait est qu’il refondait ou retravaillait pour de nouvelles éditions quelques-uns de ses écrits, et qu’il continuait les publications périodiques qu’il avait commencées (la Bibliothèque et le Magasin), et auxquelles on avait parié qu’il renoncerait vite. En 1804 il fut nommé juge à la cour d’appel de Giessen. 11806 il eut avec Schwabe commission de rédiger pour le grand-duché un projet de code pénal. Enfin, à partir de cette époque, ou même plus tot, une autre étude, celle des nouvelles lois françaises, vint absorber une part de son activité. La confédération du Rhin était en train de se former, et il devenait présumable que sous peu le grand-duc introduirait dans ses États l’usage du Code Napoléon. Effectivement, en 1808, ce prince, le prince-primat et le duc de Nassau nommèrent en commun une commission chargée de fixer en général les modifications avec lesquelles le droit français serait adopté dans les trois principautés. Cette commission se réunit à Nassau. Grolman y représenta Hesse-Darmstadt. Mais il fut impossible d’atteindre le moindre résultat. Le représentant de Nassau, Almedingen, se mit en violente opposition avec son collègue et collaborateur Grolmau ; il n’admettait la loi française qu’avec des modifications sans nombre qui, on peut le dire, en auraient dénaturé l’esprit. Il le savait bien, et probablement il n’agissait ainsi qu’avec la certitude de ne point mécontenter son souverain. Grolman au contraire souhaitait sérieusement que la loi napoléonienne devint loi-allemande, et conséquemment il s’opposait de toutes ses forces à la tactique d’Almedingen. Aussi l’unique résultat des conférences fut-il une brouillerie entre les deux savants naguère amis. Leur opposition éclata même dans les écrits d’Almedingen, qui affecta de se poser l’antagoniste scientifique de Grolman ; celui-ci, entraîné par d’autres travaux et dans une autre carrière, n’eut pas le temps de répondre à ces démonstrations hostiles. En 1810 il fut promu par le suffrage de ses collègues au rectorat de l’université, et, contrairement aux usages, il y fut prorogé au bout : de l’année. Entre autres mesures qui signalèrent son règne académique, doivent être placées en première ligne celles qu’il prit contre les associations d’étudiants dites Landmannschaft. Ces associations, reste de l’organisation primitive des universités, à l’époque ou la société se composait de corps armés les uns contre les autres, étaient souvent préjudiciables à la discipline, à la moralité et même à l’ordre public. Grolman, tant pour réprimer un état de choses qui vraiment n’est : point en harmonie avec la civilisation moderne que pour abonder dans le sens de Napoléon, qui avait en horreur l’esprit des écoles allemandes, et eût voulu les mener, comme en France ses lycées, au son du tambour, établit un tribunal académique disciplinaire qui eut mission d’instruire et. de prononcer sur les infractions et délits émanant des circonstances. Ce tribunal jouissait dans sa sphère juridique d’un pouvoir discrétionnaire on ne peut plus menaçant pour la pétulance des étudiants. Il prononçait en équité, c’est-à-dire sur ses convictions personnelles et sans avoir besoin de démonstration judiciaire. Les décisions étaient sans appel. On ne pouvait pas même avoir chance de recours au ministère grand-ducal. Les délin-