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outre, ayant mis de la vapeur d’éther sulfurique en comparaison avec de l’air dans deux tubes placés au milieu d’une étuve à 60°, il éleva la température de 60 à 100 degrés. et il eut la satisfaction de voir et de faire voir à Bertholet que, soit en montant, soit en descendant, la vapeur d’éther et l’air atmosphérique correspondaient toujours aux mêmes divisions. C’est seulement quelques degrés au-dessus du point d’ébullition de l’éther que les condensations de sa vapeur se montrèrent plus rapides que celles de l’air. Gay-Lussac considère ces divers résultats comme prouvant que de zéro à cent degrés, sous une pression constante, les gaz se dilatent tous de la même quantité, et que cent volumes de l’un de ces gaz à zéro deviennent cent trente-sept volumes à cent degrés. Il ignorait que Dalton, en Angleterre, avait obtenu un peu avant lui le rapport de cent à cent trente-neuf pour l’air atmosphérique, et qu’il avait aussi considéré ce rapport comme devant s’appliquer à tous les autres gaz, sous la même pression. Il restait à compléter ce travail en déterminant la loi de dilatation des gaz, afin d’en conclure le coefficient de dilatation pour un degré quelconque de chaleur. Ces recherches se trouvèrent comprises plus tard dans le grand travail de Dulong et Petit, qui confirmèrent et étendirent les résultats de Gay-Lussac. D’après la manière dont ce dernier présente les nombres obtenus dans son travail, ou voit qu’il ne songeait pas à trouver des chiffres exacts au delà des centièmes ; il est évident même que son procédé, pratiqué dans le temps dont nous parlons, ne comportait pas plus d’exactitude. À une autre époque, Rudberg, Magnus et surtout M. Regnault, en évitant de mettre les gaz en contact avec l’eau, et en profitant de données précises inconnues à Gay-Lussac, ont pu estimer exactement jusqu’aux millièmes, et trouver pour quelques gaz des différences qu’il n’avait pas aperçues. Mais cela ne diminue en rien le mérite d’un jeune homme qui, venant de faire son entrée dans la science, reconnaît la cause des erreurs de ses devanciers et emploie pour les éviter tous les moyens que l’on pouvait connaître alors, imaginant d’ailleurs des appareils analogues à ceux qu’on a employés après lui. Il est bon de remarquer que la plupart des auteurs des traités de physique, tout en citant le mémoire de 1802, n’ont ni figuré ni indiqué l’appareil qui a servi aux expériences. C’est un autre appareil, imaginé plus tard par Gay-Lussac, pour les explications de ses cours, qui, d’abord figuré dans le grand ouvrage de M. Biot, a été ensuite copié par tout le monde. L’abbé Haüy, dans son Traité de physique, dont la publication suivit de près le premier travail de Gay-Lussac, a seul décrit son appareil. — Le 10 septembre 1821, Laplace présenta à l’Académie des sciences un travail de haute analyse, ayant pour titre : Considérations sur l’attraction des corps sphérique et sur la répulsion des fluides élastiques. Un extrait de ce travail fut inséré par l’auteur dans le t. 94, page 84, du Journal de physique. Nous y trouvons le passage suivant : «… On voit d’abord que la température restant la même, la pression est proportionnée au nombre des molécules du gaz, et par conséquent à la densité. On voit ensuite que la pression restant la même, ce nombre est réciproque à la température, qui, comme on l’a vu, est indépendante de la nature du gaz. D’où résulte évidemment la belle loi que M. Gay-Lussac nous a fait connaître, et suivant laquelle, sous la même pression, le même volume des divers gaz croît également par un accroissement égal de température. » Laplace aurait donc démontré que tous les gaz permanents doivent se dilater également, par les mêmes changements de température! — Il est impossible d’analyser ici tous les travaux de Gay-Lussac en physique. Pour le plus grand nombre, nous devons nous contenter de simples indications. En commençant par la mesure des effets capillaires, nous rappellerons pourtant que les résultats obtenus par lui servirent de base à la théorie mathématique insérée dans le supplément au 10e livre de la Mécanique céleste ; et que l’appareil nommé plus tard kathétomètre n’est autre chose que celui qu’employait Gay-Lussac dans ses expériences. « Elles sont faites avec une grande précision, dit Laplace. M. Gay-Lussac a bien voulu les entreprendre à ma prière ; il a imaginé, pour mesurer les ascensions et les dépressions des fluides dans les tubes capillaires transparents, un moyen qui donne à ses expériences la précision des observations astronomiques ; en sorte que l’on peut en adopter les résultats avec confiance. » (Tome 4, pages 522 et suivantes.) Les Recherches et les déterminations numériques relatives à l’hygromètre ; les Observations sur la formation des vapeurs dans le vide et sur leur mélange avec les gaz ; les Indications relatives à la construction et à la graduation des thermomètres ; à la persistance du volume du fer ou de l’acier au moment où ils deviennent magnétiques ; la Note sur la densité des vapeurs d’eau, d’alcool et d’éther (1811) ; l’Invention d’un baromètre portatif très-ingénieux (1816) ; les Divers Perfectionnements de l’eudiomètre de Volta, etc., etc., dévoilèrent dans Gay-Lussac une grande habileté pour les expériences de précision et une aptitude spéciale pour l’invention des appareils nouveaux. Enfin les idées de Gay-Lussac sur la suspension des nuages et sur la formation de ceux qui deviennent orageux ; ses réflexions sur la cause générale des phénomènes volcaniques, font voir qu’il se tenait toujours au sommet de la science, non-seulement sur ce qui se rapportait à son double enseignement, mais encore sur les questions qui sortaient du cercle ordinaire de ses travaux. Mais c’est surtout à ses deux ascensions aérostatiques, et au voyage qu’il entreprit avec M. de Humboldt en France, en Allemagne, en Italie et en Suisse, qu’il dut, au commencement du 19e siècle, sa grande réputation