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ne, » allusion d’autant plus cruelle qu’elle reposait sur une odieuse calomnie. Dès les premières semaines de la restauration, Dupuy des Islets fut nommé chevalier de St-Louis et promu au grade de major de cavalerie. Alors sa muse fut toute aux Bourbons. Il composa d’abord une romance très agréable, intitulée la Vertu couronnée, et dédiée à madame la duchesse d’Angoulême ; il adressa à Monsieur, lieutenant-général du royaume, une cantate en l’honneur de S. M. Louis XVIII, dans laquelle le poète dépassait toute mesure, aussi bien que dans ses dithyrambes en l’honneur de l’empereur déchu. On en jugera par cette strophe finale :

Prince anglais, qui veillas à l’espoir de la France,
Jouis de son bonheur, il est ta récompense.
Vive à François, Guillaume et tous les souverains,
Dont l’amitié fidèle affermit nos destins!
Célébrons Wellington et le noble Alexandre, etc.

L’anecdote suivante prouve qu’eu toute occasion, Dupuy des lslets déployait le même caractère. Le 16 juin 1816, jour de la Fête-Dieu et de l’entrée de madame la duchesse de Berri, quelques gouttes de pluie faisaient craindre que les processions ne fussent pas favorisées par le temps : « Rassurez-vous, dit-il, ce sont les larmes des bonapartistes. » Les journaux ont beaucoup vanté, en 1820, des stances adressées à cette princesse, à l’occasion de la naissance de Monseigneur le duc du Bordeaux, et intitulées la Jeune veuve. On doit dire que cette pièce est d’une extrême fadeur, et qu’un sujet si touchant avait assez mal inspiré le poète. Dupuy des Islets est mort en 1831. Ses poésies fugitives ont paru séparément dans divers recueils, entre autres

l’Almanach des Muses, le Souvenir des ménestrels de Laffilé, et les Hommages poétiques. Il a publié en outre les Œuvres poétiques de Boileau, avec des Notes de Lebrun et les Œuvres de J. -J. Rousseau, avec les notes du même. On lui a attribué une brochure qui fut écrite sous les inspirations de la police et sous le voile de l’anonyme, intitulée : Examen critique du poëme de la Pitié, de Jacq. Delille, précédé d’une Notice sur les faits et gestes de l’auteur et de son Antigone, Paris, an 11 (1803), in-8°, avec cette épigraphe : Point de pitié pour la pitié. L’auteur ayant eu la maladresse de révéler dans cet écrit des particularités qui s’étaient passées dans l’intérieur de Delille, lorsqu’il y était admis, on le reconnut aisément ; mais tout mauvais cas est niable, et Dupuy des Islets nest jamais convenu de méfait. En 1820, il concourut à la rédaction d’un recueil périodique intitulé l’observateur, dont les premières livraisons ont paru sous le titre de Défense des coloníes.

D—r—r.


DUPUY-DU-GREZ (Bernard), avocat au parlement de Toulouse, qui doit être regardé comme le laudateur de l’Académie royale de peinture de cette ville fut un des hommes les plus savants du 17e siècle. Il s’appliqua particulièrement à l’étude de l’histoire et des arts, publia en 1699 un Traité de la peinture, et mourut le 18 août 1720, âge de 80 ans. Il laissa un grand nombre d’ouvrages manuscrits dont plusieurs contiennent de savantes remarques sur l’histoire ancienne, et les autres sont relatifs à l’histoire de Toulouse, depuis la fondation de cette ville, jusqu’à la mort du président Duranti. Il avait établi, en 1694, une école publique pour le dessin : il y faisait exposer, à ses frais, un modèle vivant, réunissait chez lui les artistes les plus habiles, et distribuait aux élèves des prix consistant en des médailles représentant Pallas appuyée sur son égide, et portant sur le revers cette inscription : Tolosæ Pallad. præmium graphices privato sump. datum. ann. 1697. L’école établie par Dupuy-du-Grez devint

le berceau de l’école royale de peinture, sculpture et architecture de Toulouse. Cammas, un des meilleures peintres toulousains, mit, avec Rivals et Crozat, beaucoup de zèle à soutenir cet établissement, et lui donna plus de consistance et plus d’éclat. En 1726, les capitouls se chargèrent de la dépense des prix, et le roi accorda des lettres patentes pour l’érection de l’école en académie.

V-ve.


DUPUYTREN (le baron Guillaume), naquit à Pierre-Buffière, petite ville du Limousin, le 3 octobre 1777, et non 1778, comme l’ont dit quelques-uns de ses biographes induits en erreur par Dupuytren lui-même, qui s’était fait plus jeune d’une année pour éluder les lois alors si rigoureuses de la conscription militaire. Aucun chirurgien français n’a joui d’une réputation aussi étendue, aucun n’a laissé en mourant une fortune plus considérable. Pour arriver à ce double but, aucun ne s’est servi avec plus de bonheur et d’adresse, et des dons qu’il avait reçus de la nature, et des moyens de publicité que fournit aujourd’hui la presse quotidienne. Né de parents peu aisés, et chargés d’une nombreuse famille, Dupuytren fut amené à Paris vers l’âge de douze ans et mis sous la protection du principal du collège de la Marche, où il termina ses études classiques, et resta jusqu’en 1794. La ruine de tous les établissements consacrés à l’instruction publique l’ayant forcé d’en sortir, sa situation fut un moment pénible ; mais bientôt le besoin de former des médecins et des chirurgiens pour le service des armées amena, dès 1795, la création de l’école de médecine de Paris. Dupuytren, qui depuis une année, suivait la pratique des hôpitaux et s’y livrait à l’étude de l’anatomie, fut attaché au nouvel établissement comme prosecteur, puis eu 1801, en qualité de chef des travaux anatomiques, et enfin comme professeur à la place de Sabatier, mort eu 1811. Dans cet intervalle, il obtint au concours, en 1803, la place de chirurgien en second de l’Hôtel-Dieu de Paris, bientôt après celle de membre du con-