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cune occasion de manifester ses affections pour l’Allemagne, sa patrie. Au mois de juin 1801, après la signature de la paix de Lunéville, voyant que cette paix n’était qu’un armistice et que l’empire ne tarderait pas à reprendre les armes, il adressa à l’archiduc Charles, sur la situation de la monarchie autrichienne, un Mémoire qui renferme le germe des idées dont quatorze ans plus tard les conseils des puissances alliées ont offert le développement. Cependant l’article 7 de la paix de Lunéville, qui portait que les princes héréditaires dépossédés par la France seraient indemnisés par l’empire, commençait à mettre en mouvement toutes les ambitions et toutes les rivalités. Une diète extraordinaire, composée de quatre électeurs, ceux de Mayence, Bohême, Saxe et Brandebourg, de trois princes, ceux de Bavière, Wurtemberg, Hesse-Cassel, et de l’archiduc Charles, comme grand maître de l’Ordre teutonique, sous la direction du commissaire impérial au nom de l'empereur, s’était constituée le 24 août 1802, pour la répartition des indemnités. La France et la Russie y furent les grandes dispensatrices des faveurs, et, grâce à leur appui commun, les souverains de Bade, Wurtemberg et Bavière reçurent une bonne part des pays sécularisés, des villes désaffranchies et des seigneuries médiatisées. Plusieurs mois déjà avant l’acte final de recès de l’empire du 233 février t808, le bruit des diverses mutations de territoire qui devaient s’opérer était connu des parties intéressées. On savait que le Palatinat serait cédé par la Bavière au pays de Bade. La ville de Manheim, qui craignait cette cession, chercha à réclamer. l’électorat palatin regrettait, après plusieurs siècles d’illustration, de passer par lambeaux dans les mains de souverains d’une importance historique bien inférieure à la sienne. Ce fut alors que la ville de Manheim députa MM. de Dalberg, de Schmidt et Ruprecht à Munich auprès de l’électeur bavaro-palatin, pour le prier de conserver le Palatinat, ou si cela ne lui était pas possible, pour qu’il recommandât particulièrement la ville de àfauheim au nouveau souverain. La Bavière recevait de trop amples dédommagements de la perte du Palatinat situé loin de son territoire, pour élever quelques difficultés à cet égard. Tout ce qu’obtint la députation fut un accueil amical de la part de l’électeur, qui donna en particulier à Dalberg de nombreux témoignages de son affection pour lui et sa famille, mais sans vouloir ni pouvoir rien changer aux dispositions prises relativement à Mannheim et au Palatinat. Du service de Bavière, Dalberg passa ainsi avec cette partie de lié lectorat palatin au service de Bade. Le margrave, devenu électeur, comprenait tout l’avantage qu’il y ’ avait pour lui ir ménager une famille si illustre dans l’empire, et dont l’éclat venait encore d’être rehaussé par l’élévation de Charles Dalberg à l’électorat de Mayence ; aussi montra-t-il le plus vif désir de faire tout ce qui pourrait lui être agréable, dès qu’il aurait obtenu de l’électenr de Bavière l’autorisation de passer au service de Bade. Cette autorisation qui n’était qu’une formalité fut accordée sans difficulté, et l’électeur de Bade étant venu à Manheim annonça à M. de Dalberg père qu’il le nommait grand maître et ministre d’État de la cour de Bade, en lui laissant la direction du musée de Manheim, fondé par lui ; et à Emmerick de Balberg son fils, qu’il l’envoyait comme ministre de Bade à Paris. Leur parent, l’électeur, écrivit à tous deux pour les féliciter, et se chargea d’augmenter à ses frais le traitement et la pension de famille faite au jeune ministre. Dalberg partit de Carlsruhe pour Paris le 20 mai 1803, et eut dès le 16 juin, du premier consul, son audience de présentation. À peine était-il arrivé que le gouvernement autrichien lui offrit un emploi à son service ; mais il connaissait trop l’Autriche pour ne pas voir qu’elle resterait l’ennemie de la France ; et la situation de ses propriétés sur la rive française du Rhin lui faisait un devoir de ne pas les exposer à de nouvelles chances. il refusa donc des propositions que son affection pour le gouvernement autrichien lui eussent rendues fort agréables. Plusieurs mémoires qu’il adressa à la cour de Bade dans cette même année prouvent toute sa sollicitude pour l'Allemagne, sa patrie. Il voyait la France tous les jours grandissante ; et, redoutant pour son pays la prépondérance de cette domination, il crut qu’il fallait se préparer à l’attaquer par des efforts plus universels et mieux soutenus, avant qu’elle se fût plus fermement consolidée. C’est dans ce dessein qu’il écrivit un mémoire sur les moyens de former une coalition et de pacifier l’Europe par suite d’une guerre générale qui rétablirait les masses politiques. Cet écrit, fait à la demande du ministre d’Autriche et communiqué aux ministres des autres grandes puissances, servit en effet de base a la coalition de 1804 et l805, et la plupart de ses conclusions, déjouées alors par le succès de nos armes, sont celles qui furent reproduites en 1814. La France, dépouillée des provinces rhénanes et belges, devait rentrer dans ses anciennes limites avec l’accroissement de la Savoie, du comté de Nice, de celui de Montbéhart, du territoire d’Avignon et de quelques enclaves belges. La Belgique devait former une royauté séparée, la Hollande être donnée à la souveraineté héréditaire des Nassau ; la Suisse devait être rétablie dans ses anciennes limites et son ancienne constitution ; l’Italie partagée entre les maisons d’Autriche, de Bourbon et de Sardaigne ; cette dernière indemnisée de la perte de la Savoie par Gênes et la Corse. La formation d’un corps de troupes royales en France, à l’aide d’un noyau de 20,000 Russes et Allemands qui y auraient été débarqués, devait aider les tentatives royalistes de l’intérieur et aurait ainsi, à ce qu’on pensait, facilité le retour de la maison de Bourbon, dans laquelle on trouvait une garantie contre le caractère d’envahissement manifesté par les gouvernements révolutionnaires. C’est dans ces circonstances que fut arrêté en pleine paix, sur le